Les Manuscrits Ne Brûlent Pas.

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Histoire, Biographies & Documents.

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samedi, août 18 2007

Les Stones - Philip Norman.

The Stones Traduction : Danièle Laruelle

A ce jour et bien qu'elle se termine au début des années 80, la biographie consacrée aux Stones par Philip Norman demeure, avec celle du Français François Bon (que je compte relire un de ces jours et qui est parue au Livre de Poche), la meilleure que j'aie lue sur le sujet.

Elle débute lors du concert d'Altamont, voulu par Jagger pour faire pendant à celui de Woodstock et où cet incorrigible égomaniaque entendait bien tenir le premier rôle. Pour on ne sait quelles raisons, les Stones avaient accepté que les Hell's Angels assurassent le service d'ordre parmi cette assemblée de jeunes adeptes du flower power, qui fumaient de l'herbe et consommaient force drogues (dont le fameux LSD) tout en s'abreuvant de bières. La réaction ne tarda pas : alors que Jagger faisait son numéro, un Hell's Angel agressa un jeune Noir, lequel devait décéder à l'hôpital.

Dans l'histoire des Stones, le concert d'Altamont, qui date du 6 décembre 1969, confirme le tournant amorcé par la mort de Brian Jones, trouvé mort dans la piscine de sa propriété de Hartifield, dans le Sussex (l'ancienne maison du créateur de Winnie l'Ourson : A. A. Milne) le 3 juillet précédent.

C'est Jones qui avait fondé le groupe en 1962, lui donnant dès le départ une connotation puriste de R&B. Le nom du groupe vient d'ailleurs du répertoire du blues. Peu à peu évincé par Mick Jagger et Keith Richards, s'enfonçant de plus en plus dans les drogues et l'alcool, menant une vie sentimentale chaotique, l'abandon d'Anita Pallenberg, sa compagne, en faveur de Keith Richards, semblait l'avoir achevé. Ce musicien d'un génie incontestable, capable de maîtriser très vite n'importe quel instrument et qui possédait de rares dons de mélodiste, mourut à 27 ans. Janis Joplin et Jim Morrison devaient le suivre, au même âge.

Philip Norman, c'est très clair, préfère de beaucoup le fondateur des Stones à leur chanteur-vedette. La seule chose qu'il admire chez Jagger - peut-être n'est-ce au fond que la seule chose admirable chez lui - c'est son indéniable sens des affaires mis au service d'une égomanie soigneusement calculée. Mais pour Norman, les seuls vrais musiciens du groupe mythique sont Jones, Richards et Charlie Watts, à la batterie.

Solidement documentée, sa biographie ne tombe jamais dans les paillettes people et nuance les portraits, notamment celui de Keith Richards. Si vous ne deviez lire qu'un seul livre sur les Rolling Stones, c'est celui-là que je vous conseillerai. ;o)

dimanche, août 12 2007

Mesdames de France - Bruno Cortecuisse. ( V ).

Leur existence, plus ou moins effacée à Versailles où elles détestaient la vie de parade presque autant que le faisait leur père puis, pour deux d'entre elles, brinquebalée de lieu d'exil en lieu d'exil où on les regardait de haut comme les vestiges ridicules d'une époque révolue, valait-elle qu'on la retraçât dans un livre ?

Oui car, à travers leurs espoirs, puis leurs désillusions, à travers ces passe-temps presque mécaniques (musique, apprentissage de l'italien avec Goldoni, promenades avec Beaumarchais, etc ...) qui rythmaient leur vie fastueuse mais sans profondeur réelle, à travers évidemment les deuils qui les accableront jusqu'au bout, se révèle une époque pour nous essentielle, celle où le système monarchique français commence à branler dans le manche.

Mesdames ne tinrent malheureusement pas de "Mémoires" et on ne peut se fier par exemple à celles de Mme Campan qui, avant de passer au service de Marie-Antoinette, entra chez elles comme lectrice. Malheureusement aussi, il leur a manqué un Saint-Simon pour les statufier à jamais dans notre langue. ( 1 ) Ah ! Saint-Simon ! Quel magnifique personnage lui aurait présenté Madame Adélaïde ! Et comme il nous aurait conté avec délectation les mille intrigues de Madame Infante !

Aussi, même si - à l'exception notable de l'aînée d'entre elles - elles ne purent tenir de rôle véritablement important, n'est-il que justice de ressusciter la mémoire de ces princesses oubliées et raillées déjà de leur vivant et qui se sont si bien effacées dans la Mort que seuls les ossements des deux exilées, Mesdames Adélaïde et Victoire, ont échappé à la fosse commune où reposent, pêle-mêle, les restes des Capétiens.

Il nous reste à souhaiter que, désormais, grâce notamment à ce blog, vous pouviez mettre un visage sur le nom des filles de Louis XV. Pour le reste, lisez "Mesdames de France" de Bruno Cortequisse, aux Presses Universitaires de France. ;o)

( 1 ) : Goldoni, qui leur enseigna l'italien, évoque cependant Mesdames dans ses mémoires, au Mercure de France.

Mesdames de France - Bruno Cortecuisse. ( IV ).

Madame Sophie, dite "Madame Sixième", vécut dans l'ombre de ses soeurs, solfiant comme elles et, comme elles (et d'ailleurs pratiquement toute la famille royale), passionnée de musique. Elle mourut à 48 ans, en 1782 et ne connut donc pas la douleur de voir périr son neveu - et la Royauté - sur l'échafaud :

        

Madame Victoire, elle, eut moins de chance. Elle fut la compagne de Madame Adélaïde jusque dans l'exil où elle mourut en 1799 :

         

Mesdames de France - Bruno Cortecuisse. ( III ).

Il semble bien pourtant que Louis XV - comme la Reine - ait aimé ses filles. On a même prétendu qu'il ne fit vraiment pas grand chose pour les marier. Certaines mauvaises langues, qui se rappelaient le scandale du Régent et de la duchesse de Berry, lui prêtèrent même une liaison continue et un fils incestueux avec sa fille, Madame Adélaïde :

        

Madame Adélaïde de France, la plus intelligente, la plus "politique" peut-être avec sa soeur, Madame Infante. Avec sa soeur Victoire, elle sera la seule à traverser les horreurs de la Révolution, fuyant d'abord devant les Jacobins, ensuite devant Bonaparte et terminant ses jours en exil à Trieste, le 27 février 1800. Amoureuse d'un certain franc-parler, elle passait pour froide et revêche mais beaucoup de témoins crédibles évoquent sa sensibilité et sa très grande bonté.

Pourtant, la fille préférée du Roi, après Madame Infante, était "Madame Deuxième", sa jumelle, Henriette-Anne, que la Mort emporta à 25 ans. Ce célèbre tableau de Nattier fut terminé après sa mort :

      

Mesdames de France - Bruno Cortecuisse. ( II ).

Grâce à Saint-Simon, nous savons à quelles dépenses pouvait atteindre "la maison" d'un prince ou d'une princesse. Alors, imaginez un peu le train nécessaire pour huit filles de roi ! Le cardinal Fleury voyait la chose d'un mauvais oeil et décida de réduire les frais au maximum en envoyant les petites princesses à l'abbaye de Fontevrault - la meilleure du royaume - afin d'y faire leur éducation.

C'est ainsi que, très jeunes, Victoire, Sophie et Louise-Marie furent séparés de leurs trois aînées, Louise-Elisabeth, future "Madame Infante" et Henriette qui étaient jumelles, et la petite Adélaïde, dite un temps "Madame Quatrième."

Dans son livre, Bruno Cortequisse n'hésite pas à se poser des questions sur les sentiments parentaux des illustres géniteurs de Mesdames, Louis XV, dit le "Bien-Aimé" et son épouse, fille de l'ex-roi de Pologne, Stanislas Leszczyinski :

           
     Louis XV, arrière-petit-fils du Roi-Soleil - On le surnommait, non sans raison, "le plus bel homme du Royaume." Il mourut méconnaissable, dans les souffances atroces de la petite vérole, à l'âge de 64 ans.
   

Marie Lesczcynska, peinte par Nattier "en son privé" et "sans rouge" - La reine était de sept ans l'aînée de son fringant époux et ses grossesses répétées avaient évidemment nui à son physique - Elle fit comme presque toutes les reines - de France et d'ailleurs - trompées par leur époux : elle se tourna vers la dévotion.

Mais en ces temps de forte mortalité infantile - y compris dans les palais royaux - l'idée de la paternité comme celle de la maternité n'était pas tout à fait la même que celle qui prévaut aujourd'hui. Tout le monde n'est pas Catherine de Médicis, toujours prête à s'inquiéter pours "ses mignons."

Mesdames de France - Bruno Cortecuisse. ( I ).

De son mariage, à l'âge de 15 ans, le 4 septembre 1725, avec Marie Leszczynska, qui en avait 22, Louis XV eut dix enfants : huit filles et deux garçons. Parmi les filles, les petites Marie-Louise et Thérèse-Félicité moururent en bas âge (respectivement à 5 et 8 ans) tandis que le second des fils, Philippe, titré duc d'Anjou, fut emporté à 3 ans. Par la suite, le Dauphin Louis, père des futurs Louis XVI (duc de Berry), Louis XVIII (comte de Provence) et Charles X (comte d'Artois) décéderait lui-même à l'âge de 36 ans, neuf ans avant son père.

De mémoire de courtisan, jamais on n'avait vu autant de princesses royales à Versailles. Etant filles de France, leur avenir semblait assuré : elles trouveraient facilement à se marier. Pourtant, seules Louise-Elisabeth :

     

et Louise-Marie :

     

allaient bel et bien se dénicher un époux : le duc de Parme pour la première - ce qui était, tout compte fait, un bien faible établissement - et le Christ au Carmel pour la seconde, ce qui, en dépit des chuchotements moqueurs de la cour, était somme toute plus à la hauteur de son rang.

samedi, août 11 2007

Les Reines de France au temps des Bourbon : Marie-Antoinette l'Insoumise ( 4 ) - Simone Bertière.

Ce pavé de plus de 900 pages, qui termine, avec une majestueuse beauté, la série consacrée par Simone Bertière aux reines de France et au rôle qu'elles tinrent dans la vie politique de notre pays, est un authentique chef-d'oeuvre.

Bien des livres ont été consacrés au destin tragique de Marie-Antoinette de Lorraine-Habsbourg, archiduchesse d'Autriche, devenue à 15 ans reine de France et de Navarre. Mais dans celui-ci, Simone Bertière confirme qu'elle est l'égale de celui qui - pour moi en tous cas - demeure la référence en matière de biographies historiques modernes : Alain Decaux.

Bertière nous présente ici un double-portrait, celui de Louis XVI et celui de Marie-Antoinette, tous deux débarrassés des idées reçues et si souvent répandues par les livres d'Histoire - comme par les historiens. On y apprend par exemple que, contrairement à une légende tenace qui excusait il est vrai Louis XVI d'avoir mis si longtemps à consommer son mariage (fait crucial pour toute succession monarchique), le jeune roi n'a jjamais souffert d'un phimosis ou de toute autre malformation qui lui aurait rendu insupportable l'acte sexuel. En fait, ces sept années d'espoir et d'attente toujours remis au lendemain sont dûs à l'ignorance pure et simple qui venait bloquer une pudeur celle-là légitime.

Sept années pendant lesquelles Marie-Antoinette va se distraire en courant de plaisir en plaisir et en se forgeant en toute inconscience l'image qui montera avec elle sur l'échafaud : celle de la reine incapable, seulement préoccupée de ses plaisirs et insoucieuse des dépenses qu'elles occasionnent.

Bertière adopte le plus souvent le présent de l'indicatif, ce qui a le mérite de plonger son lecteur au coeur même de l'action. Ainsi, les fameuses journées des 9 et 10 août 1792, qui devaient voir la prise des Tuileries et la réclusion de la famille royalle au Temple, nous sont-elles restituées de telle sorte que nous nous tenons au côté des assiégés comme des assiégeurs. On voit l'émeute, on l'entend, on flaire le sang et le meurtre ... On admire la fermeté de Louis XVI tout en blâmant son absurde désir de ne faire couler aucune goutte de sang, désir qui, justement, va en amener un bain, d'ailleurs téléguidé par les Montagnards. Et bien sûr, si cela ne s'était déjà fait auparavant, on bascule du côté de Marie-Antoinette.

A l'issue de ce livre qu'il ne faut surtout pas manquer, on est navré de constater que, alors que la France avait tant besoin d'un monarque "fort", dans le style Louis XIV, elle a dû faire avec un Louis XVI sans doute beaucoup plus fin et beaucoup plus habile (en politique extérieure notamment) qu'on a voulu le dire, mais hélas ! dépourvu de toute lucidité politique intérieure et si imprégné de l'aspect spirituel de sa charge qu'il ne voulut jamais faire tirer sur les insurgés. Auprès de lui, sa femme n'avait, quant à elle, aucune formation politique et, quand elle se vit forcer de s'y lancer vraiment, en 1789, il était trop tard.

Simone Bertière a le mérite de remettre à leur place tous les responsables qui concoururent à la liquidation de la monarchie absolue en France, depuis Louis XV qui ne parvint pas à imposer les réformes fiscales nécessaires jusqu'à ces apprentis-sorciers que furent les Girondins en passant par le refus de traiter Marie-Antoinette en adulte valable qui fut le tort aussi bien de sa mère, l'impératrice Marie-Thérèse, que de ses frères, Joseph et Léopold, de son mari et des ministres de celui-ci.

Un grand livre, une somme historique, un drame extraordinairement bien mené, des personnages uniques : quand vous les quittez, il vous prend le désir de courir à Versailles et d'y retrouver, presque pieusement, leurs traces à tous. ;o)

vendredi, août 10 2007

Poisons & Empoisonneurs célèbres - Roland Villeneuve.

Avant d'attaquer un livre de Roland Villeneuve, auteur qui a beaucoup écrit sur la démonologie, les poisons, les créatures fantastiques, etc ..., il faut garder à l'esprit qu'il fait souvent dans le "cliché historique." Ainsi, dans ces "Poisons ...", il aura pris garde à représenter Catherine de Médicis un peu comme l'a fait Dumas, c'est-à-dire comme un personnage excessif qui se délectait des "recettes" très spéciales de Ruggieri, son parfumeur. Même remarque pour les Borgia - et sans doute pour quelques autres que vous croiserez dans cet ouvrage.

Faut-il, pour autant, ne pas lire Villeneuve, bien sûr que non. Dans son genre, il possède le souffle et la minutie du passionné et il sait emporter son lecteur avec lui comme beaucoup de romanciers actuels sont bien incapables de le faire.

Dans "Poisons et Empoisonneurs Célèbres", il nous dresse un petit précis de l'empoisonnement et des empoisonneurs à travers les âges, de la ciguë socratienne à la scandaleuse affaire Marie Besnard qui défraya la chronique en France dans les années 50. (Si Villeneuve s'arrête là, c'est parce que son livre date de 1960.)

Bien entendu, à maintes reprises, il établit le parallèle entre la sorcellerie et l'empoisonnement, que l'on appelait d'ailleurs jadis "vénéfice." Il semble que la coupable pratique de se défaire de ses ennemis par le poison soit née avec l'homme même si - le fait est avéré - ce sont surtout les femmes qui recourent à cette façon très spéciale de donner la mort.

D'Agrippine la Jeune, mère de Néron, empoisonnant l'empereur Claude afin que Néron puisse ceindre la couronne des César, jusqu'à la marquise de Brinvilliers se défaisant de son père, de son frère, de son mari ... après avoir testé ses "poudres" sur les malades des hospices de Louis XIV, des rumeurs qui voulurent voir l'oeuvre du poison dans la mort, aussi brutale que cruelle, de Gabrielle d'Estrées, ou encore dans celle d'Henriette d'Angleterre, belle-soeur de Louis XIV, la fresque de Villeneuve n'omet aucun recoin. Il évoque même la sombre silhouette d'Hélène Jégado, sinistre servante bretonne si dévouée à ses maîtres successifs qu'elle en envoya un nombre conséquent d'entre eux vérifier si l'Au-delà est vraiment meilleur que notre monde mortel. Le tout ponctué de caractéristiques sur les poisons les plus utilisés - notamment l'arsenic, communément appelé le "Roi des poisons."

Ca se lit comme un excellent polar à fond historique et ça compte 300 pages chez "J'ai lu." Donc, pourquoi bouder votre plaisir ? ... ;o)

jeudi, août 9 2007

L'Ile de Sakhaline - Notes de Voyage - Anton Tchékhov.

Titre original : ? Traduction : Lily Denis

L'île de Sakhaline baigne dans la mer d'Okhotsk, une mer de l'Océan Pacifique, et voisine étroitement, comme l'indique la carte ci-dessous, avec la Sibérie orientale :

     

C'est dans cette île que, en avril 1890, aborda un Anton Tchékhov bien décidé à rédiger l'histoire la plus complète qui se pût voir de la colonie pénitentiaire qui y vivait.

Entre les notes de bas de page et le texte, le tout en format poche Folio, le tout fait plus de 550 pages, certes passionnantes mais qui pourront paraître ardues à ceux que n'intéressent guère les moeurs policières et légales de l'ancienne Russie - que la Russie bolchevique ne fit, en somme, que récupérer et peaufiner.

Par leur style concis et sans apprêt, ces "Notes de Voyage", étonneront peut-être les habitués du dramaturge. Mais ils retrouveront sa patte dans ce foisonnement de portraits de forçats, d'"hommes libres", de "relégués" et de fonctionnaires, tour à tour incroyables, émouvants, pitoyables, cyniques ..., extraordinaire galerie où Goya et Doré auraient pu puiser. A l'arrière-plan, les survivants des peuplades paléo-arctiques comme les Aïnos, qui vivent en bon terme avec les colons.

Ce que tous partagent et subissent, c'est le climat, un climat que, en dépit de ses baisses de températures phénoménales, on peut qualifier d'infernal : neige, glace, hiver quasi perpétuel avec un été très bref où les températures dépassent rarement les 15 degrés.

Pour la majorité, une misère lamentable. Pour quelques privilégiés, une certaine aisance, alimentée par des trafics en tous genres effectués sur le dos des moins chanceux.

Bien sûr, parmi ceux-là, beaucoup sont des assassins ou des incendiaires. Mais, comme le souligne Tchékhov, la condition du bagne à Sakhaline ne leur permet pas de s'amender de manière efficace. Quant à la colonisation de l'île, tant souhaitée par les autorités, elle n'est guère réussie puisque, dès qu'ils ont fait leur temps, les condamnés s'empressent - on les comprend - de rejoindre le continent.

Un récit minutieux, scrupuleux, d'une intégrité indubitable, qui, autant que la philosophie de ses pièces, confirmera au lecteur attentif la profonde humanité d'Anton Pavlovitch Tchékhov. ;o)

mercredi, août 8 2007

Le Presbytère Hanté de Borley - E. Dingwall, K. Goldney et T. Hall. ( II ).

Jaquette non répertoriée Le presbytère hanté de Borley The Haunted Borley Rectory Traduction : Hugues de La Chesneray

Après lecture de ce livre, deux questions se posent au lecteur :

1) Harry Price s'est-il rendu coupable de fraude ? Oui, c'est indubitable. Price a tout fait, surtout après 1937, pour que Borley soit déclaré hanté. Mais - et cela non plus, on ne peut le nier - il était plutôt sceptique lors de la première visite qu'il fit à Borley en 1929, en compagnie d'ailleurs de l'une des signataires de "Le Presbytère hanté de Borley", Kathleen Goldney, laquelle semble avoir cependant toujours estimé que, dans certains cas (qui ne concernent pas tous Borley, donc), Price avait fait figure de medium tout à fait inconscient de ses propres possibilités.

Quand les Foysters le rappelleront, Price ne mettra pas non plus très longtemps à deviner qui écrit les fameux "messages" laissés, soi-disant, par les esprits, sur un ou deux murs du presbytère. Dans les années 60, Mrs Veuve Foyster admettra elle-même de bonne grâce les avoir rédigés - "parce qu'elle s'ennuyait."

Mais Price avait besoin d'argent et de notoriété. Du coup, il a succombé aux charmes de la supercherie - et probablement pas seulement en ce qui concerne le cas de Borley.

Tout au long de ses 300 pages, le livre de Dingwall, Goldney et Hall tend à le démontrer par A plus B. Entreprise louable, sans nul doute mais qui a - ce n'est que mon avis - entraîné ses auteurs à pécher eux aussi comme l'avait fait Price en son temps : ils en font trop.

Ce qui amène le lecteur à se poser la deuxième question :

2) En dépit de la supercherie de Price, se peut-il que certains phénomènes se soient réellement produits au presbytère de Borley ?

Dans leur volonté de se montrer objectifs à tous prix, le trio d'écrivains-chercheurs imputent les phénomènes à Price et, quand il n'est pas encore entré en scène, à des farces que les jeunes demoiselles Bull auraient décidé de faire à leurs proches, au désir de gloire des Smith, à la petite Adelaïde Foyster et même aux gens du village de Borley. En outre, ils font le flou sur les incohérences et les reniements dans les propos que l'on peut rencontrer, par exemple, chez les Smith, pour ne citer qu'eux.

Et c'est là que le bât blesse car, s'ils réclament - avec raison - des preuves tangibles de tout ce qu'a pu avancer Harry Price, ils se contentent , pour expliciter leurs propres allégations, d'évoquer par exemple la sieste qu'aurait fait le révérend Bull avant de voir la fameuse religieuse, le tempérament rieur des demoiselles Bull, etc, etc ... Bref, toutes choses évidemment invérifiables.

Voilà pourquoi l'on sort de ce livre assez perplexe. On y apprend tout au plus la chronologie exacte des faits. Pour le reste - en-dehors des preuves qui accablent la mémoire de Price - rien n'est dit. Le presbytère de Borley n'a donc pas fini de faire parler de lui. ;o)

Le Presbytère Hanté de Borley - E. Dingwall, K. Goldney et T. Hall. ( I ).

Jaquette non répertoriée Le presbytère hanté de Borley The Haunted Borley Rectory Traduction : Hugues de La Chesneray

En 1958, paraissait chez Denoël, avec une préface de Robert Amadou, l'excellente étude consacrée par Eric Dingwall, Kathleen Goldney et Trevor Hall au presbytère de Borley. Formé de membres d'associations de recherche paranormale très sérieuses, le trio prétendait à dénoncer la supercherie dont Harry Price, qui enquêta dès 1929 sur les phénomènes censés se dérouler dans cette maison, se serait rendu coupable à seules fins, vous l'aurez deviné sans peine, de vendre un maximum d'exemplaires du livre que lui-même avait rédigé sur Borley - et aussi d'assurer sa réputation de "fantastique chasseur de fantômes."

Rappelons brièvement l'histoire du presbytère :

1) la période Bull: le révérend Bull, pasteur du village de Borley, fait construire le presbytère en 1863. Des bruits courront par la suite comme quoi le bâtiment s'éléverait sur les ruines d'un monastère du XIIIème siècle mais il semble aujourd'hui établi que, tout comme la rumeur qui voulait qu'un couvent de soeurs eût existé non loin de là, à Bures, ce bruit était sans fondements.

Après la mort du révérend, son fils lui succède dans les mêmes fonctions et dans la même propriété, où il vit avec ses soeurs. C'est en 1900 que commence à se répandre l'idée que les demoiselles Bull ont vu plusieurs fantômes, dont celui d'une religieuse.

2) la période Smith : elle commence en octobre 1928 avec l'arrivée du révérend Smith et de son épouse dans le presbytère où le révérend Bull était décédé un an plus tôt.

Troublés par les rumeurs de hantise, M. et Mme Smith contactent le Daily Mirror qui les met en contact avec Harry Price, journaliste spécialisé en enquêtes para-psychiques.

Price arrive au presbytère en juin 1929 et, tout de suite, se produisent tout un lot de phénomènes. La bonne des Smith affirme de son côté avoir vu une apparition et le confie à Price.

Le mois suivant, les Smith, ennuyés par le manque de confort de la maison, quittent le presbytère. Ils n'y reviendront pas.

3) la période Foyster : entrent alors en scène le révérend et madame Foyster. Signalons que le premier est largement l'aîné de la seconde : plus de vingt ans de différence. Ils ont une petite fille : Adelaïde. Nous sommes en 1930 et, dès l'arrivée du couple, le presbytère s'agite.

Les Foyster rappellent Harry Price - qui se dira persuadé, plus tard, dans quelques lettres à un ami, que la responsable de tout cela n'était autre que Marian Foyster, l'épouse du révérend.

Après maintes péripéties et le recours à un exorciste, les Foyster quittent Borley en 1935. Le presbytère reste inoccupé pendant près de deux ans.

4) la période Price : Price loue le presbytère pour un an à compter de mai 1937. Son séjour ne sera guère paisible : les phénomènes s'accumulent. Lorsqu'il rend les clefs en 1938, il a constitué un énorme dossier qui lui inspirera "La Maison la plus hantée d'Angleterre", qui sortira en 1940.

A partir de là, les théories ne vont pas arrêter de s'échafauder, certaines loufoques, d'autres bien plus sérieuses. Le nouveau propriétaire des lieux, le capitaine Gregson, confirme lui aussi des phénomènes étranges, phénomènes qui survivront (si on ose l'écrire ) à la destruction du presbytère par le feu, le 27 février 1939.

Après la guerre, Price fouillera les ruines et y découvrira des ossements qu'on l'accusera par la suite d'avoir mis lui-même en place afin de donner corps à la légende de la religieuse enfermée vivante dans les murs de Borley. En parallèle, tandis que les Smith, en parfaite contradiction avec ce qu'ils avaient déclaré à Price en 1930, affirment n'avoir jamais rien constaté d'anormal dans leur ancienne demeure, d'autres personnes, visiteurs des ruines venus en amateurs ou en professionnels, prétendent avoir été témoins de nouveaux phénomènes.

Harry Price décède le 29 mars 1948.

Les Reines de France au temps des Bourbon : La Reine & la Favorite ( 3 ) - Simone Bertière.

Avec ce troisième tome des "Reines de France au temps des Bourbon", Simone Bertière poursuit son analyse du système qui, en écartant insensiblement les épouses royales françaises du rôle qui leur était traditionnellement imparti aux côtés de leur mari depuis le Moyen-Age, allait amener Marie-Antoinette à assumer peu à peu les grandeurs comme les excès de deux personnages contradictoires : celui de la Reine légitime et celui de la Favorite honnie par le peuple.

Sous Louis XV, nous n'en sommes pas encore là. Mais son accession au trône à un âge trop tendre (cinq ans et demi) et dans des circonstances partiiculièrement sombres (il était orphelin et n'avait plus ni frère, ni soeur) allait très vite pousser ce monarque pourtant très attaché à son illustre bisaïeul à fuir tout ce qui, pour ce dernier, avait représenté la grandeur et la servitude du "métier" de roi. Partant et sans en avoir probablement conscience, il va sonner le glas du régime dont il est le représentant.

Enfant solitaire qui n'eut pas le temps de grandir dans de bonnes conditions, tiraillé entre les factions rivales (celle du Régent puis, après la mort de Philippe d'Orléans, celle du duc de Bourbon et de sa maîtresse, Mme de Prie), Louis XV déteste l'apparat et les obligations qu'il impose. Retenons bien ce trait de caractère : il est primordial pour comprendre non seulement la personnalité du nouveau souverain mais plus encore l'inflexion décisive, du royal vers le privé, que va prendre sous son règne le principe monarchique.

Fiancé à onze ans à la petite infante d'Espagne, Marie-Anne-Victoire de Bourbon, qui n'en a pas encore quatre tout sonnés, le garçonnet est déçu et lui fait vite grise mine. Quatre ans plus tard, la mort du Régent - qui avait mis à profit les fiançailles espagnoles de son jeune cousin pour faire de sa fille, Melle de Montpensier, la future reine d'Espagne - retourne la situation : fait unique dans les annales franco-espagnoles, la petite infante est renvoyée chez elle (elle finira par épouser le prince-héritier de Portugal) et une autre candidate est poussée sur les rangs par l'ambitieuse Mme de Prie. Cette candidate, c'est Marie Leszczynka, la fille unique de l'ex-roi de Pologne Stanilas Leszczynki et de Catherine Opalinska.

De sept ans plus âgée que son mari, Marie, qui n'est pas aussi simple qu'on a bien voulu le dire, aurait pu exercer sur lui un certain ascendant, d'autant que ce tempérament passionné lui resta tout de même fidèle huit ans - bien plus que ce que Louis XIV avait pu accorder à Marie-Thérèse qu'il trompait effrontément au bout de six mois. A cela s'opposent deux facteurs : tout d'abord, elle est éperdument amoureuse de Louis XV (dont les portraits conservés prouvent encore que sa réputation de "plus bel homme de son temps" ne fut pas usurpée) et ne se risquera jamais à encourir sa colère, ensuite cet homme secret et renfermé estime, comme son arrière-grand-père, que lui seul doit mener les affaires du Royaume.

Ce dernier point vaut peut-être mieux pour la France car, vite convertie au parti dévot, la pauvre Marie aurait risqué de ne pas faire les choix politiques les mieux appropriés.

Il est cependant un domaine où les deux époux s'entendent parfaitement, un domaine par où s'introduiront habilement à la cour de Versailles bourgeoisie, banalité et désacralisation d'une fonction séculaire : Marie, comme Louis, préfèrent les assemblées en petits comités, loin des regards des courtisans. Leurs obligations de parade respectées, tous deux s'enferment dans leurs petits cabinets, avec un petit cercle d'intimes, et tout est dit. La monarchie louisquatorzienne est bel et bien morte et, ce qui est pire, le lien sacré qui unissait le Roi de France à son peuple va se désagréger.

Louis XIV, on l'a vu, n'avait jamais renoncé à faire ses Pâques et, partant, à procéder au rituel toucher des écrouelles. Jusqu'aux jours noirs de sa fin de règne, il aimait à se montrer "à ses peuples" avec un maximum de majesté. Comme il le disait lui-même : "Nous nous devons au public."

Avec Louis XV, tout change. Paradoxalement, son sentiment religieux est si fort que, ne pouvant se retenir de commettre le double adultère (Mme de Pompadour, qui restera sa maîtresse-amie pendant vingt ans, et lui-même sont mariés), il décide, pour ne pas encourir plus avant les foudres divines, non de se confesser une fois l'an afin de se laver de ses péchés et de mieux y resombrer mais bel et bien de ne plus communier du tout. Seules les maladies occasionnelles et l'attentat de Damiens le feront renoncer à cette résolution qui fait de lui, l'"Oint du Seigneur", un mécréant.

En ce siècle des Lumières, bourgeois et pauvres gens sont certes touchés par l'air de liberté de conscience que font souffler les Philosophes. Mais le Roi reste le Roi et c'est son caractère religieux qui assure la légitimité de son pouvoir. Supprimons ce caractère, que reste-t-il ? ...

Tout est prêt pour 1789.

De lecture légèrement plus ardue que les volumes précédents, "La Reine et la Favorite" n'en constitue pas moins un ouvrage essentiel pour une meilleure compréhension du naufrage final de l'Ancien régime. Historiomaniaques, n'hésitez pas à le lire et, surtout, à vous procurer la série intégrale dont nous aborderons bientôt le dernier volet : "Marie-Antoinette l'Insoumise." ;o)

mardi, août 7 2007

Les Reines de France au temps des Bourbon : Les Femmes du Roi-Soleil ( 2 ) - Simone Bertière.

Simone Bertière a un don exceptionnel pour restituer tout ce que l'Histoire de notre pays recèle de passionnant. Je le répète, les néophytes ont tout intérêt à se procurer sans tarder sa série sur "Les Reines de France" (disponible aujourd'hui en édition de poche) qui, d'Anne de Bretagne à Marie-Antoinette, s'applique à dépeindre les liens profonds qui unirent la monarchie française aux épouses de ses rois.

Pour l'historienne, la Reine - ou la Régente - était une composante essentielle du système. A partir du moment où, soit parce qu'on lui impose une mise en retrait, soit parce qu'elle choisit elle-même de prendre du recul avec la fonction qui est la sienne, la Reine consent à voir ces liens se relâcher et se distendre, la monarchie n'a plus beaucoup d'années devant elle.

Paradoxalement, c'est sous Louis XIV, celui de nos rois qui porta le principe royal à son apogée en instaurant l'absolutisme, que s'amorce le lent mais irrémédiable déclin de la Reine en tant que symbole intouchable et quasi sacré. Le Roi-Soleil en eut-il conscience ? Bertière ne se prononce pas.

Pourtant, on ne pourra reprocher à Louis XIV de n'avoir pas aimé les femmes. Avantage rarissime chez un prince, il avait eu la chance d'avoir une mère aimante et proche de ses enfants. Du jour de la naissance de son fils aîné jusqu'à celui de sa propre mort, Anne d'Autriche veilla sur lui avec un dévouement absolu.

On aurait donc pu croire qu'il chercherait à avoir auprès de lui une reine aussi rayonnante que le fut sa mère. Son épouse, Marie-Thérèse, passait d'ailleurs pour ressembler beaucoup à sa tante, Anne d'Autriche. Hélas ! cette ressemblance n'était que physique : l'intellect n'était pas à la hauteur. Le roi, qui était jeune et plein de vie, plein d'exigences aussi, se lassa très vite.

C'est avec Marie-Thérèse que s'ancre l'usage aussi déplorable que machiste de ne plus sacrer les reines de France. On en avait perdu l'habitude un peu par superstition car le sacre de Marie de Médicis avait précédé de quelques jours l'assassinat de son époux par Ravaillac. Puis, pour des raisons politiques - Louis XIII ne tenait absolument pas à ce que le sacre donnât trop de prestige à une épouse qui complotait contre lui - on avait continué à l'"oublier." Louis XIV, lui, n'en veut absolument plus.

S'il ne fait pas sacrer son épouse en grandes pompes, le Roi-Soleil exige toutefois que tous la respectent. Et ceci même si lui-même la trompe de manière si ostentatoire que, dès sa première liaison avec Louise de La Vallière, les courtisans et le peuple doivent s'accoutumer à un bien étrange spectacle: dans le même carosse, aux côtés de la Reine, sont assises la maîtresse en titre et celle qui lui sert de "paravent." Longtemps, très longtemps, se déplaceront ainsi côte à côte un Marie-Thérèse résignée, une Melle de La Vallière délaissée et une Mme de Montespan triomphante. Louis XIV aimait à afficher des goûts de potentat oriental.

Louise de La Vallière alla demander au couvent de mettre une fin à son martyre. Cette décision, si elle ne lui apporta peut-être pas toute la paix de l'âme souhaitée, lui permit en tout cas de ne pas assister en direct à l'irrésistible ascension de Françoise d'Aubigné, veuve Scarron, jusqu'au marquisat de Maintenon et même, après le décès de Marie-Thérèse, jusqu'à la chapelle de Versailles où fut bénie son union morganatique avec un Louis XIV vieilli et assagi.

Pareil cauchemar, on le sait, ne fut pas évité à la fière Montespan, définitivement mise sur la touche lors de l'affaire des Poisons.

C'est sur ces trois caractères de femmes que Simone Bertière axe ce deuxième tome des "Reines de France au temps des Bourbon." Mais des femmes, dans l'entourage du Roi-Soleil, il y en eut toujours beaucoup. Notamment dans sa famille.

Sa cousine germaine par exemple, la duchesse de Montpensier - la Grande Mademoiselle -qui avait un temps espéré l'épouser mais qui vit la canonnade qu'elle ordonna à la Bastille au temps de la Fronde lui emporter tous ses espoirs. Son autre cousine, Henriette, princesse d'Angleterre, devenue Madame par son mariage avec le frère de Louis et dont on ne sait exactement si elle devint aussi sa maîtresse avant de mourir dans des conditions jugées assez douteuses par les contemporains.

Il y eut encore Elisabeth-Charlotte, la seconde Madame, laide mais spirituelle, dont on pense qu'elle conçut pour son beau-frère un amour platonique mais violent. Puis ses filles illégitimes nées de ses liaisons avec Melle de La Vallière puis avec Mme de Montespan. Et enfin sa petite-belle-fille, Marie-Adélaïde de Savoie, cette duchesse de Bourgogne qui sera un jour la mère de Louis XV.

Or, pour le Roi-Soleil le bien nommé, quiconque pouvait se targuer d'un lien de parenté direct avec son auguste personne se devait de lui obéir en toutes choses. A fortiori si le quiconque en question appartenait au sexe dit faible. Voilà pourquoi Mademoiselle dut renoncer à Lauzun et les filles illégitimes se marier certes brillamment mais selon les voeux exclusifs de leur père. Quant à Marie-Adélaïde, avant même d'avoir posé un pied à la cour, elle savait que, avant de chercher à plaire à son époux, elle devait avant tout plaire au vieux Roi et à son épouse officieuse.

Une remarquable leçon d'Histoire.

lundi, août 6 2007

Le Livre noir du Communisme - Collectif ( IV ).

Un seul extrait de ce livre qui vous donnera, je l'espère, l'envie de le lire :

... ... L'occultation de la dimension criminelle du communisme renvoie, cependant, à trois raisons spécifiques. La première tient à l'attachement à l'idée même de révolution. Aujourd'hui encore, le travail de deuil de l'idée de révolution, telle qu'elle fut envisagée au XIXème et au XXème siècles, est loin d'être achevé. Ses symboles - drapeau rouge, Internationale, poing levé - resurgissent lors de chaque mouvement social d'envergure. Che Guevara redevient à la mode. Des groupes ouvertement révolutionnaires sont actifs et s'expriment en toute légalité, traitant par le mépris la moindre réflexion critique sur les crimes de leurs prédécesseurs et n'hésitant pas à réitérer les vieux discours justificateurs de Lénine, de Trotski ou de Mao. Cette passion révolutionnaire n'a pas été seulement celle des autres. Plusieurs des auteurs de ce livre ont eux-mêmes cru, un temps, à la propagande communiste.

La deuxième raison tient à la participation des Soviétiques à la victoire sur le nazisme, qui a permis aux communistes de masquer sous un patriotisme ardent leurs fins dernières qui visaient à la prise du pouvoir. A partir de juin 1941, les communistes de l'ensemble des pays occupés sont entrés dans une résistance active - et souvent armée - à l'occupant nazi ou italien. Comme les résistants des autres obédiences, ils ont payé le prix de la répression, ont eu des milliers de fusillés, de massacrés, de déportés. (...)

L'antifascisme est devenu, pour le communisme, un label définitif et il lui a été facile, au nom de l'antifascisme, de faire taire les récalcitrants. (...) Furent ainsi prestement escamotés les épisodes gênants au regard des valeurs démocratiques, comme les pactes germano-soviétiques de 1939 ou le massacre de Katyn. (...)

La dernière raison de l'occultation est plus subtile, et aussi plus délicate à exprimer. Après 1945, le génocide des Juifs est apparu comme le paradigme de la barbarie moderne, jusqu'à occuper tout l'espace réservé à la perception de la terreur de masse au XXème siècle. Après avoir, dans un premier temps, nié la spécificité de la persécution des Juifs par les nazis, les communistes ont compris tout l'avantage qu'ils pouvaient tirer d'une telle reconnaissance pour réactiver régulièrement l'antifascisme. Le spectre de la bête immonde dont le ventre est encore fécond - selon la fameuse formule de Brecht - fut agité en permanence, à tout propos et hors de propos. Plus récemment, la mise en exergue d'une singularité du génocide des juifs, en focalisant l'attention sur une atrocité exceptionnelle, a aussi empêché de percevoir d'autres réalités du même ordre dans le monde communiste. Et puis, comment imaginer que ceux qui avaient, par leur victoire, contribué à détruire un système génocidaire aient pu, eux aussi, pratiquer ces méthodes? Le réflexe le plus répandu fut le refus d'envisager un tel paradoxe. ... ...

Le Livre noir du Communisme - Collectif ( III ).

Autre cause manifeste de l'exceptionnelle longévité de l'idéologie communiste : la victoire des Alliés - auxquels Staline s'était rallié en désespoir de cause - à la fin de la Seconde guerre mondiale. Et là, bien entendu, certains vont grincer des dents. Mais comment ignorer le fait ?

Comment nier que l'incroyable indulgence dont ont bénéficié - et dont bénéficient encore pour certains - les régimes communistes de notre planète provient en grande partie de l'éternelle mise en parallèle avec les horreurs totalitaires nazies ?

Mais comment ne pas ruer dans les brancards lorsque l'on s'aperçoit - et c'est le cas à la fin du "Livre Noir du Communisme" - que, en additionnant tel nombre avec tel autre et encore ceci avec cela, le nombre des victimes du système communiste, tous pays confondus, est bien plus élevé ? (Normal, le communisme a perduré, le nazisme, non.)

Comment peut-on d'un côté se déclarer horrifié (avec raison) par les camps de concentration et les théories eugénistes et raciales des nazis alors qu'on ferme les yeux sur des camps et des théories similaires lorsque ceux-ci ont pour cadre la Corée du Nord, pour ne citer qu'elle ? (Castro n'est pas mal non plus en la matière et j'espère que nul n'a oublié la vision très particulière qu'avait des handicapés Nicola Ceauscescu ...)

Comment peut-on refuser d'admettre que, pour survivre dans un monde en perpétuelle mutation, le mot d'ordre communiste : "Déstabilisation et guerre civile", s'est tourné, après guerre, vers les revendications anti-coloniales ?

Comment peut-on se refuser, aujourd'hui, à l'entendre cet éternel mot d'ordre, dans la récupération par les partis communistes et les extrêmistes de gauche des revendications des minorités intégristes, religieuses ou non ?

Comment ... ? ...

Ce livre, lisez-le et diffusez-le autour de vous : croyez-moi, vous ferez oeuvre pie. ;o)

Le Livre noir du Communisme - Collectif ( II ).

Oui, pourquoi le communisme, tel que nous le connaissons, tel que le XXème siècle l'a fixé dans l'Histoire, a-t-il existé et existe-t-il encore, drapé dans ce lourd manteau de violence et de terreur qu'il fait peser sur les populations qui lui sont soumises ? Et, plus insidieux : Karl Marx se reconnaîtrait-il dans l'ajustement que fit de ses théories un certain Vladimir Illitch Oulianov ? ...

Les rédacteurs de ce livre établissent évidemment le rapport entre le passé de violence de la Russie et les grands chefs révolutionnaires communistes. Il faut en effet savoir qu'un tsar au moins était célébré tant par Lénine que Staline et que ce tsar n'est autre que le fameux Ivan IV, dit le Terrible (ou plutôt le Redoutable, si l'on s'en tient à une traduction plus exacte du terme russe qui le caractérise). (C'est d'ailleurs sous Staline que Serguei Eisenstein entreprit son gigantesque "Ivan le Terrible" qui demeure un sommet de l'art cinématographique soviétique.)

C'est dans ces liens sanglants avec un passé archaïque que s'est abîmé le communisme appliqué en Russie et, partant, qu'il a perdu tout rapport avec la Révolution française de 1789 (même si ses dirigeants continuèrent à la citer comme exemple). Car la Révolution française, si l'on excepte la terreur génocidaire imposée à la Vendée et, bien entendu, les excès d'un Robespierre et d'un Saint-Just, n'a guère usé de violence paroxystique. C'est que ses fondateurs étaient dans l'impossibilité nationale de se référer à des figures historiques réellement diaboliques. En dépit des pages terribles de son histoire (guerres de Religion, famines, etc ...), la France n'a jamais produit de tyrans semblables à Ivan IV ou même Pierre le Grand et jamais on ne vit roi de France battre à mort son Dauphin (au contraire d'Ivan).

Malheureusement pour leur mémoire et encore plus pour le peuple russe - et celui des "pays-frères" - Lénine et Staline, qu'ils en eussent conscience ou non et si modernes qu'ils se voulussent, étaient par contre tributaires d'un passé historique chaotique où le crime devenait chose naturelle.

Evidemment, le but des auteurs n'est pas d'excuser les maîtres du communisme soviétique. Ils cherchent simplement à démonter les bases d'un régime qui, même s'il a en partie disparu en au début des années 90, continue à influer sur notre monde.

Ainsi, ils établiront un autre parallèle entre le passé millénaire de la Chine, ses fondements confucéens et ses recours rituels au cannibalisme d'une part et certaines pratiques pendant la guerre civile, puis sous Mao. ]On notera par exemple que, s'il est arrivé à de malheureux paysans russes, affamés volontairement par Lénine, puis par Staline, de tuer et de dévorer leurs propres enfants, les paysans chinois, eux, échangeaient leurs enfants afin de ne pas être tenus responsables, devant les tablettes de leurs Ancêtres, d'un crime qui va si fort contre la Nature.

Le Livre noir du Communisme - Collectif ( I ).

"Comment peut-on encore oser se réclamer du communisme ?" Telle est la question que vous ne pourrez éviter de vous poser après avoir lu ces 826 pages détaillées sur les crimes, la terreur et la répression conçus comme outils de gouvernement. Elles sont dûes aux plumes conjointes de Stéphane Courtois, Nicolas Werth, Jean-Louis Panné, Andrzej Paczkowski, Karel Bartosek et Jean-Louis Margolin.

On sort de là assommé, non pas tant peut-être par l'horreur des crimes qui y sont rapportés de manière froide et presque clinique, dans un souci évident d'objectivité (que l'on rencontre beaucoup plus rarement, il convient de le souligner, dans les ouvrages traitant du totalitarisme de droite) que par le cheminement de pensée qui conduisit des hommes relativement intelligents - ou supposés tels - comme par exemple Lénine, à les provoquer, à les commettre et surtout à les présenter comme le seul et unique moyen de façonner une société libérée de toutes les inégalités et, par conséquent, épanouie et heureuse.

Après une préface qui rappelle que certains des auteurs se laissèrent prendre un temps au chant des sirènes rouges, l'ouvrage distingue cinq parties : le communisme originel, celui de l'Empire soviétique ; le communisme dans l'Europe de l'Est et du Sud ; le communisme asiatique et ses cinq variantes : Chine, Corée du Nord, Laos, Viêt-nam et Cambodge ; le communisme en Amérique du Sud et bien entendu l'afro-communisme. Un chapitre tout entier est enfin consacré au communisme en Afghanistan et fait l'éclatante démonstration que le coup d'état de Mohammed Daoud, en 1973, en donnant aux soviétiques l'occasion d'intervenir dans le pays, mit fin à la modernisation d'une monarchie qui, vaille que vaille, s'était bel et bien engagée sur les rails de la modernisation. L'épilogue pose bien évidemment la question : "Pourquoi ?"

samedi, août 4 2007

Les Reines de France au temps des Bourbon (T. 1) : les Deux Régentes- Simone Bertière.

Marie de Médicis a toujours eu mauvaise presse dans notre Histoire - pire encore peut-être que sa lointaine parente, Catherine car, si celle-ci parvint, vaille que vaille, à maintenir la France hors du bourbier des guerres de religion, Marie, elle, privilégia beaucoup trop ses intérêts personnels par rapport à ceux de l'Etat dont elle était pourtant régente.

Et puis, Catherine de Médicis reste le prototype naturel de la reine qui se sait mère et en tire gloire. Elle qui a tant souffert de sa supposée stérilité a voué à ses enfants si longtemps espérés un amour certainement oppressant et excessif mais sincère et prêt à tout. L'essentiel de leur réussite, l'image même qu'a conservée d'eux l'Histoire, c'est à leur mère qu'ils les doivent. Face à elle, Marie est la mère castratrice et froide, plus préoccupée de ce que ses enfants peuvent lui rapporter que de ce qu'elle peut, elle, leur apporter : elle ne fait pas le poids.

La minorité de Louis XIII va justement donner à cette femme autoritaire un pouvoir dont elle rêvait depuis longtemps. Elle s'y cramponne avec une telle fureur que, alors que le jeune roi s'apprête à fêter ses 15 ans (âge de la majorité pour les monarques en France), elle se refuse à envisager un seul instant qu'il puisse enfin arriver aux affaires. Au désappointement, succède alors chez l'adolescent influençable une colère qui ne demande qu'à flamber : sur les conseils de son premier favori, Luynes, Louis XIII - qu'il ne fallut pas d'ailleurs beaucoup pousser pour donner un tel ordre car il haïssait Concini - commandita l'assassinat du maréchal d'Ancre.

Dans la foulée, il se débarrasse de cette mère qui l'exaspère et qu'il redoute et l'exile à Blois. Elle y restera quelque temps et puis, il la fera revenir auprès de lui, mais plus pour satisfaire la galerie que par amour filial. (Aux yeux d'un psychothérapeute, les rapports amour-haine - et surtout haine- de cette mère et de ce fils sont un ravissement.)

Liés à la disparition brutale d'Henri IV, assassiné en 1610, cet amour que Marie se refusa toujours à dispenser à son fils aîné aussi libéralement qu'elle le dispensait à son cadet, Gaston d'Orléans, et le vide abyssal que cela engendra a lourdement pesé dans la vie affective et sexuelle de Louis XIII. Ce monarque austère, qu'affligeaient un bégaiement indiscret et des humeurs mélancoliques, n'aimait guère la compagnie féminine. Ce qui n'en fait pas pour autant, ainsi que le prétend cette concierge de Tallemant des Réaux, un homosexuel actif, amoureux fou du trop beau et trop versatile Cinq-Mars.

Louis a-t-il aimé sa jeune épouse, Anne d'Autriche ? Peut-être dans les tout débuts de leur mariage. Hélas ! une imprudence de la reine lui fit perdre l'enfant qu'elle attendait et c'est ainsi que débutèrent dans le couple des dissenssions qui allaient durer, avec des hauts et des bas, jusqu'à la mort du roi.

Toutes deux apparentées aux Habsbourg - Anne était la fille de Philippe III d'Espagne - les deux reines éprouvaient, cela se conçoit, de fortes sympathies pour la cause de la Contre-Réforme. Mais alors que Marie, d'exil en exil et dans son désir exacerbé de reconquérir le pouvoir qui lui avait filé entre les doigts lors du coup d'Etat, se faisait de plus en plus hispanophile avec l'âge, Anne au contraire devient de plus en plus française avant de se hisser au rang de Catherine de Médicis lors de la régence qu'elle assumera pendant près de dix ans après la disparition de Louis XIII et de Richelieu.

Si Louis XIII a détesté sa mère et s'est défié des femmes toute sa vie, Louis XIV a adoré la sienne et collectionné maîtresses et simples aventures. Le premier se réfugiait dans le petit pavillon de chasse de Versailles, dans la seule compagnie de ses chiens et de quelques courtisans de sexe masculin ; le second, dans le même lieu qu'il aggrandit et ne cesse d'embellir, ne saura vivre sans les femmes.

Voilà, grosso modo, ce que nous conte Simone Bertière dans ce premier tome de "Les Reines de France au temps des Bourbon." Elle le fait avec sa vivacité habituelle et cette passion qui rend ses ouvrages si intéressants à lire et à relire.;o)

jeudi, août 2 2007

Raspoutine, l'Ultime Vérité - Edvard Radzinsky.

Titre original : ? Traduction (du russe) : Macha Zonina & Macha Chevalot

Rarement personnage historique aura été aussi adulé et aussi haï, de son vivant comme dans sa mort, que Grigori Efimovitch Raspoutine. Il faut dire que, fût-ce dans l'Histoire de la Russie elle-même, on ne lui trouve aucun équivalent.

Il naquit dans le petit village de Prokovskoïé, dans la province de Tobolsk. On a longtemps été incapable de fixer la date exacte de cette naissance jusqu'à ce que, dans les archives de Tioumen, des feuillets de recensement aient été retrouvés avec la mention du 10 janvier 1869, jour d'ailleurs de la St Grigori.

Un flou identique entoure la signification de son patronyme qui veut dire aussi bien "libertin, débauché" que "carrefour, croisée des chemins." On ne sait toujours pas s'il appartint ou non à une secte de klystys, ces croyants orthodoxes qui estimaient que seule l'action du péché pouvait apporter le repentir. Lui-même aimait à s'affirmer starets (équivalent d'un ermite vivant quasiment en saint et capable d'accomplir des miracles, voyez "Les Frères Karamazov") et s'il est une chose par contre dont on est certain, c'est que cet homme au regard incroyable possédait d'indéniables dons de guérisseur.

Loin des médecins et des charlatans de toutes sortes, Raspoutine fut le seul qui se révéla capable d'apaiser les souffrances qu'infligeaient à l'héritier du trône de Russie, le tsarévitch Alexis Nicolaïevitch, la maladie héréditaire que lui avait léguée sa mère, la princesse Alix de Hesse, petite-fille de la reine Victoria et qui, en épousant Nicolas II, avait pris le nom russe d'Alexandra Fédorovna.

Et ce fut ainsi que Raspoutine devint un habitué de Tsarkoïé Selo, la résidence moscovite des tsars.

Le volume de plus de 600 pages que consacre aux protagonistes de cette tragédie l'historien russe Edvard Radzinsky s'appuie essentiellement sur le fameux "Dossier" établi par les autorités bolcheviques sur les activités de Raspoutine. Longtemps disparu, ce document de 426 pages écrites recto-verso et dont le titre original est : Commission d'enquête extraordinaire en vue de l'établissement des actes illégaux accomplis par les ministres et autres responsables du régime tsariste - Département des investigations refit surface en 1995 chez Sotheby où Rostropovitch, familier de Radzinsky, l'acheta pour celui-ci.

Les bolcheviques cherchaient évidemment à noircir la famille impériale au maximum. En dépit de ce parti pris, le "Dossier" ne parvient pas à dissimuler l'étonnante complexité d'une histoire qui pesa d'un poids décisif sur le destin de la Russie.__

Ce qui m'a personnellement très choquée, ce sur quoi je ne cesse de m'interroger, c'est sur l'état mental de la tsarine. Elle devait déjà posséder un tempérament exalté que son coup de foudre pour "Nikky", puis toutes les années pendant lesquelles elle attendit de donner enfin un héritier au trône des Romanov ne firent qu'aggraver. La maladie de son fils, longtemps tenue secrète et contre laquelle la médecine de l'époque demeurait impuissante, fut le coup de grâce qui fit basculer cet esprit fragile dans la folie. (Chose curieuse, le délire religieux qui accable alors cette ex-protestante rappelle de façon frappante celui dans lequel sombra Elisabeth d'Autriche après le suicide de l'archiduc Rodolphe.)

La religion judéo-chrétienne étant ce qu'elle est, la tsarine ne pouvait que se sentir coupable d'avoir "contaminé" son fils. Mais on peut quand même s'étonner de voir cette femme se montrer si faible dans ce domaine alors que, en parallèle, elle fait preuve d'une volonté d'acier pour maintenir son ascendant sur le tsar et pour éliminer les ennemis politiques de Raspoutine.

Autre source de stupeur dans l'affaire : l'attitude ambiguë de Nicolas II envers "Notre Ami" - tel est le nom qu'Alexandra donnait à Raspoutine. L'appréciait-il ou pas ? Le père, certainement, devait se montrer reconnaissant de l'apaisement que le starets dispensait à son fils mais le monarque était-il aussi heureux que cela de voir Raspoutine s'immiscer de plus en plus dans la politique de l'Empire ?

Et encore peut-on vraiment dire que les suggestions politiques de Raspoutine étaient de son seul fait à lui ? Au fur et à mesure qu'on lit ce pavé, on se rend compte que Raspoutine ne faisait après tout que reprendre les idées de la tsarine, qu'il appelait non sans raison "la patronne."

Ajoutons à cela la coterie qui, sous Nicolas II, était hostile à la tsarine (non seulement en raison de ses origines allemandes mais aussi parce que, la chose était incontestable, elle "gouvernait" son mari) et qui regroupait, il faut bien l'admettre, l'intégralité de la famille Romanov. Mélangeons le tout et nous obtenons le meurtre de Raspoutine par un trio dominé, semble-t-il, par le prince Youssoupov et le grand-duc Dimitri, son ex-amant. Un meurtre qui se déroula dans la nuit du 17 au 18 décembre 1916 et dans des circonstances extraordinaires que je vous laisse découvrir.

Trop proches de la famille régnante, les meurtriers ne furent qu'exilés ...

L'intérêt premier de ce livre - qui souffre néanmoins de quelques longueurs - est qu'il éclaire en effet pas mal la personnalité de Raspoutine et que, ce faisant, il renforce les ombres qui entourent celles du couple impérial. Alors, Raspoutine, victime lui aussi des Romanov et de la malédiction qu'ils traînaient depuis le premier de leurs ancêtres qui confisqua le pouvoir ? Qui sait ... En tous cas, il fascine toujours autant les Russes ... et les autres. ;o)

mercredi, août 1 2007

Le Terrorisme Intellectuel de 1945 à nos jours - Jacques Sévillia.

Si vous avez votre carte dans un groupuscule trotskyste ou même au Parti socialiste de M. Hollande et si, par malheur, vous souffrez de problèmes tensionnels, surtout, surtout ...

... ne lisez pas "Le Terrorisme intellectuel de 1945 à nos jours" !

Etude brillante, acérée et merveilleusement teigneuse de l'univers "Rive gauche" qui, par l'entremise de médias admiratifs et sous influence, a su propager ses contre-vérités jusque dans les plus petites villes de notre beau pays, ce livre ne laisse une seconde de répit ni aux gauchistes ni à ceux qui, à Droite, si longtemps et par peur de se voir traiter de "fascistes", tremblèrent à l'idée de récupérer une bonne partie des voix de l'électorat FN.

Tout y passe : les compromissions du Parti communiste français avec l'occupant nazi au temps où, pour ses militants, le mot d'ordre donné par Staline était : "Sabotez l'armement français et sympathisez avec les Allemands, alliés de l'URSS !" puis, du jour de l'agression hitlérienne contre la Russie soviétique, le retournement à 180° des mêmes militants qui leur permit, dans les jours sombres de l'Epuration, de se tailler la part du lion à la table des vainqueurs ; le rôle honteux des intellectuels de gauche dans la culpabilisation des colons et l'aide qu'ils apportèrent, en tant que "compagnons de route" et "poseurs de valises" (l'expression est de Sartre) tant en Indochine qu'au Maghreb - ce qui, d'un point de vue strictement légal et historique, fait d'eux des traîtres ; l]'entreprise de démolition de l'éducation qui sévit depuis bientôt quarante ans à l'Education nationale et dont nous voyons, aujourd'hui, fleurir les sinistres résultats ; l'inacceptable application du "un poids deux mesures" qui veut que les troupes qui se battent pour un idéal gauchiste (comme celles de Pol Pot par exemple) soient présentées le plus longtemps possible comme des "soldats de la liberté universelle" alors qu'on nous assomme de livres et d'études sur les "crimes impardonnables" des dictatures de droite" ...

C'est tout cela et pas mal d'autres sujets que vous découvrirez dans ce petit régal dont je vous donne le ton général :

... Ils auront épousé toutes les idéologies. En 1945, ils professaient que l'URSS était un paradis, et rédigeaient des poèmes à la gloire de Staline. En 1960, ils prétendaient que la décolonisation résoudrait miraculeusement les problèmes des peuples d'outre-mer. En 1965, ils saluaient la juste lutte de Fidel Castro, Hô Chi Minh et Mao. En 1968, ils proclamaient que le bonheur naîtrait de la suppression de toute contrainte. En 1975, ils se réjouissaient de la prise du pouvoir par Pol Pot au Cambodge. En 1981, ils croyaient quitter la nuit pour entrer dans la lumière. En 1985, ils soutenaient que la France se devait d'abaisser ses frontières afin d'accueillir les malheureux de la terre entière. En 1992, ils assuraient que l'Etat-nation était fini, et que l'Europe du traité de Maastricht ouvrait une ère nouvelle dans l'histoire de l'Humanité. En 1999, ils affirmaient que la famille et la morale étaient des concepts dépassés. ...

Je ne vous cache pas que certaines tirades - notamment sur le droit à l'avortement et le Pape - sont d'un catholique un peu trop pratiquant pour moi. Mais j'avoue le pardonner à M. Sévillia tant j'ai pris plaisir à noter que la présence de Tariq Ramadan aux côtés d'un certain José Bové, dans les rassemblements des mouvements altermondialistes style ATTAC, n'avait pas échappé à son oeil féroce et à sa dent de pamphlétaire passionné.

Jean Sévillia, un auteur à lire absolument. ;o)

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