Depuis "Le Sang des Atrides", Pierre Magnan développe une oeuvre régionaliste, dans la lignée - mais en beaucoup plus sombre - de Charles Exbrayat. La majeure partie de ses romans, surtout ceux qui ont pour héros le commissaire Laviolette et le juge Chabrand, se déroulent dans la région de Digne et donnent au lecteur l'occasion de découvrir les paysages et la culture des Alpes de Haute-Provence.

Magnan, c'est d'abord un style, riche, plantureux - parfois un peu trop ;o) - résolument littéraire, qui mêle avec adresse la noirceur et l'humour.Romancier-né, il a à coeur de fouiller ses personnages et, tel un Chabrol qui aurait choisi la plume au lieu de la caméra, il aime à sonder les vieilles histoires de famille au coeur de la province profonde.

Une autre caractéristique de cet auteur, c'est le climat étrange, décalé, limite fantastique, qu'il sait créer. Et le plus bizarre, c'est que ce fantastique n'a rien de méditerranéen : enfin, moi, en tous cas, il m'évoque toujours les brumes du Nord.

"Les Courriers de la Mort" se situe dans la région dignoise. Tout commence dans le cimetière d'un petit village où un autochtone qui a obtenu l'autorisation de creuser sa tombe personnelle pourvu qu'il s'occupe en parallèle de veiller sur le bien-être de ses futurs voisins voit un jour une lettre tomber dans la boîte accolée - pour des raisons que Magnan n'explique d'ailleurs pas - à la grille du cimetière. Chez notre fossoyeur, la curiosité prend vite le dessus sur l'espèce de malaise qu'il avait ressenti à entendre du bruit du côté de la fameuse boîte. Il regarde l'adresse - une habitante de Digne - et puis, après un moment d'hésitation, il court à la poste et expédie le courrier, après l'avoir timbré.

Or, la destinataire du courrier finit très vite, assassinée sous l'oeil du lecteur par une silhouette lourdaude au masque étrange ...

Le meurtrier use d'un procédé similaire à celui déjà employé par son homologue dans "Le Sang des Atrides" et on peut le reprocher à l'auteur. Mais, pour peu qu'il accepte de jouer le début dès le premier chapitre, le lecteur retrouve avec plaisir Chabrand et Laviolette (désormais en retraite auprès de ses chats errants), aux prises avec un meurtrier retors et déterminé.

Toutefois, si vous ne connaissez encore ni l'un, ni l'autre, préférez "Le Sang des Atrides" ou encore "Le Tombeau d'Hélios.";o)