"... ... Revenant donc de Fontainebleau, je ne couchai qu'une nuit à Paris, où, en arrivant, j'avais pris mes mesures avec Rigaud, qui partit le lendemain de moi. J'avertis en arrivant mes complices, et je dis à M. de La Trappe qu'un officier de ma connaissance avait une telle passion de le voir, que je le suppliais d'y vouloir bien consentir (car il ne voyait plus presque personne) ; j'ajoutai que, sur l'espérance que je lui en avais donnée, il allait arriver, qu'il était fort bègue et ne l'importunerait pas de discours, mais qu'il comptait s'en dédommager par ses regards. M. de La Trappe sourit avec bonté, trouva cet officier curieux de bien peu de choses et me promit de le voir.

Rigaud arrivé, le nouvel abbé, M. Maisne et moi le menâmes dès le matin dans un (1) espèce de cabinet qui servait de jour à l'abbé pour travailler et où j'avais accoutumé de voir M. de La Trappe, qui y venait de son infirmerie. Ce cabinet était éclairé des deux côtés et n'avaient que des murailles blanches, avec quelques estampes de dévotion et des sièges de paille, avec le bureau sur lequel M. de La Trappe avait écrit tous ses ouvrages, et qui n'était encore changé en rien. Rigaud trouva le lieu à souhait pour la lumière ; le Père Abbé se mit au lieu où M. de La Trappe avait accoutumé de s'asseoir avec moi à un coin du cabinet, et heureusement Rigaud le trouva tout propre à le bien regarder à son point. De là, nous le conduisîmes à un autre endroit où nous étions bien sûrs qu'il ne serait vu ni interrompu de personne. Rigaud le trouva fort à propos pour le jour et la lumière, et il y apporta aussitôt tout ce qu'il lui fallait pour l'exécution. ... ..."

(1) : à l'époque, la tournure au masculin était admissible.