Absolution by murder Traduction : Cécile Leclère

Ce roman ouvre en fait la série des aventures de soeur Fidelma l'Irlandaise. Et c'est là que nous la voyons rencontrer et s'associer pour la première fois à frère Eadulf, ce moine saxon partisan de l'église romaine qui finit pourtant par tomber amoureux d'elle.

Tout commence de façon sinistre par une pendaison, celle d'un moine partisan de la doctrine de Columba qui avait eu le tort de déplaire à un soudard saxon, Wulfric de Frihop. Car, hélas pour le malheureux, nous sommes bel et bien en terre saxonne, très précisément au royaume de Northumbrie, où la loi rappelle celle du Talion et dont l'église romaine tente de prendre le contrôle.

Soeur Fidelma, en route avec quelques compagnons pour l'abbaye de Streoneshalh afin d'y participer à un synode qui devra justement se prononcer sur l'adoption ou le rejet de la doctrine romaine pour l'ensemble de la Northumbrie, n'hésite pas à clamer bien haut son indignation devant des moeurs aussi barbares.

En terre saxonne, à cette époque, l'idée qu'une lointaine descendante de ce peuple guerrier et méfiant puisse s'appeler un jour Maggie Thatcher et diriger d'une poigne de fer ce qui sera alors le Royaume-Uni, aurait fait hausser les épaules à n'importe quel représentant du sexe mâle, du plus arrogant des nobles au dernier des valets. Je vous laisse donc à imaginer dans quels abîmes de stupéfaction et de colère ces messieurs vont se retrouver plongés lorsque Fidelma sera chargée par le roi Oswy - un Saxon ayant étudié en Irlande - d'enquêter sur le meurtre de son amie, l'abbesse Etain de Kildare, dont le corps a été découvert avec la gorge tranchée.

Pour ne pas froisser les susceptibilité saxonnes, Oswy exige simplement que le jeune frère Eadulf fasse équipe avec Fidelma. L'accord se conclut d'autant plus vite que, dans ce monastère où se trouvent rassemblées les deux factions rivales que représentent à cette époque les partisans de l'église de Rome et ceux de Columba, chacun est persuadé que c'est son adversaire qui a tramé la mort d'Etain.

Ajoutez à cela les ambitions politiques d'Ailfrith, le fils d'Oswy, qui ne rêve que de renverser son père et vous aurez une idée exacte de la situation.

Dans de telles conditions, soeur Fidelma et frère Eadulf n'auront guère la tâche aisée. Ils parviendront cependant à résoudre le mystère de la mort d'Etain mais aussi celle de deux autres moines qui surviennent peu après. Ils apprendront surtout à mieux se connaître et ce sera le départ d'une amitié solide que "Le Suaire de l'Archevêque" viendra concrétiser un peu plus tard.

Une fois de plus, Peter Tremayne fournit à son lecteur une foule de renseignements sur les moeurs celtiques et saxonnes ainsi que sur la grande querelle religieuse qui a toujours régné entre ces deux peuples. L'église romaine y est représentée telle qu'elle fut - et telle qu'on évite soigneusement d'habitude de la représenter : une secte parmi les sectes, mais une secte qui a réussi. Le profane restera sans doute surpris devant le byzantinisme de nombre des désaccords qui sévissaient alors entre Rome et l'Irlande (au sujet de la désignation de Pâques et du jour de repos hebdomadaire). Quant aux Bretons présents sur ce site ou simplement de passage, je ne crois pas qu'ils seront surpris de rencontrer sous la plume de Tremayne une apologie de l'antique foi celte, celle qui a donné à ce peuple son surnom de "Peuple du Crépuscule", celle pour qui, bien avant le christianisme, la Mort n'était qu'une étape dans la réalisation de l'esprit humain.