Comme Lovecraft, Edgar Allan Poe est né dans la région des Etats-Unis la plus liée à l’ancien continent et qui se nomme d’ailleurs la Nouvelle-Angleterre. De plus, tous deux sont nés dans des états voisins, le premier dans celui de Rhode Island, à Providence, le second dans le Massassuchetts, à Boston. Tous deux sont également des enfants du XIXème siècle puisque Lovecraft vit le jour en 1890 et Poe en 1809 – oui, les deux derniers chiffres semblent inversés. Là s’arrêtent les ressemblances bien que, la chose est indéniable, le familier de la littérature fantastique puisse distinguer, dès les visions rapportées dans le « Manuscrit trouvé dans une bouteille » de Poe, les ombres qui prendront corps plus tard sous la plume du « Solitaire de Providence. »

La mère de Poe, Elisabeth Arnold, était née en anglaise. Elle avait tout juste dix-huit ans et était déjà veuve d’une première union contactée à quinze ans, lorsqu’elle se remaria avec David Poe Jr. Par son père, le général Poe, David Jr appartenait à une famille aisée de Baltimore. Le général lui-même avait conquis ses galons lors de la guerre d’Indépendance. Mais les armes ne disaient que peu de choses à son fils et celui-ci préféra se faire comédien. Engagé dans la troupe des Charleston Players, il y fit la connaissance de sa future épouse. Leur couple était appelé à avoir trois enfants parmi lesquels l’aîné, William, mourra jeune, aussi tuberculeux et aussi alcoolique que l’était son père tandis que la seule fille, Rosalie, sera atteinte de méningite à l’adolescence et se verra placée sous tutelle le restant de sa vie.

Edgar était encore tout petit lorsque sa mère le prit avec elle, dans une tournée au cœur du pays sudiste. Alors que la troupe avait fait halte à Richmond, la jeune femme ressentit les premières atteintes de la pneumonie qui devait l’emporter quelques mois plus tard, en décembre 1811. David Poe Jr, lui, était mort depuis déjà un an.

                      
                             Elizabeth Arnold Poe.

Le hasard répartit les trois orphelins dans des familles différentes. William fut pris à charge par son grand-père paternel et par sa tante, Maria Clemm. Rosalie alla demeurer chez les McKenzie. Et Edgar fut adopté par les Allan, un couple de négociants aisés de Richmond.

La décision de John Allan d’émigrer en Ecosse, puis à Londres permit au jeune garçon d’étudier dans des écoles et collèges britanniques. Nul ne s’étonnera d’apprendre qu’il y suivit une filière classique et littéraire. Mais le marché anglais se révèlait moins bénéfique que ne l’avait espéré Mr Allan et, après quelques revers de fortune, la famille repartit vers les USA et Richmond. Du coup, ce fut dans les meilleures écoles privées de la capitale de la Virginie qu’Edgar Poe fut amené à terminer ses classes de collège.

Il lisait beaucoup, nourrissait, comme tant d’autres jeunes (et moins jeunes) de son temps une passion pour l’œuvre de lord Byron et s’essayait à la versification. A l’adolescence, cet amour pour la poésie, ce désir de devenir poète et écrivain, alliés à la découverte d’une liaison qu’entretenait John Allan, contribuèrent énormément à l’éloigner de son père adoptif. Celui-ci pourtant l’inscrivit à l’université de Charlottesville.

           
                               John Allan.

Malheureusement, élevé dans l’idéal sudiste d’aristocratique désinvolture que Margaret Mitchell a si bien mis en scène par la suite dans « Autant en emporte le vent », Edgar estimait qu’il devait à sa réputation de mener grande vie et de contracter des dettes de jeu. A charge pour John Allan de régler les frais. Celui-ci tourna la difficulté en ne réinscrivant pas le jeune homme pour l’année suivante. Il comptait le faire travailler avec lui et même, le marier.

Ce fut ainsi que, ses dix-huit ans à peine sonnés, au mois de mars 1827, Edgar Allan Poe s’enfuit de Boston.