Revenge of the Manitou Traduction : François Truchaud

Extraits Personnages

Autant j'avais aimé le premier tome de la série "Manitou", qui apporta d'ailleurs le succès à son auteur, autant j'ai beaucoup moins apprécié ce second opus. On y sent trop l'écrivain pressé par son éditeur et qui, pour boucler à temps, mélange quelques bonnes idées à des clichés indignes de lui.

Le Manitou (de son vrai nom Misquamacus) qui avait déjà tenté de s'incarner pour se venger - et venger toute la nation indienne, qui ne lui demandait pourtant rien - de l'oppression des Blancs, revient ici dans une armoire achetée pour trois fois rien par Neil Fenner. L'armoire meuble la chambre du petit garçon de Neil, Toby, une dizaine d'années à peu près. Et, au bout de quelque temps, il commence à se passer des choses, dans cette armoire : une voix désincarnée supplie un certain "Allen" d'aller chercher du renfort ... Pour parachever le tout, bientôt, le jeune Neil semble possédé par l'esprit de Misquamacus, qui s'exprime par sa bouche.

Mais le pire, c'est que, dans la classe de Toby, placée sous la férule de Mme Novato (la malheureuse connaîtra une fin atroce), tous les enfants font des cauchemars similaires mettant en scène des Indiens et des Blancs dans une embuscade particulièrement sanglante. Neil, qui n'en peut plus de voir son fils dans cet état et que tout le monde, y compris sa propre épouse, prend pour un père qui a des hallucinations, décide de mener sa propre enquête.

De fil en aiguille, il apprend qu'il serait le descendant direct du fameux Allen que suppliait la voix spectrale, dans l'armoire. Masterton suggère - très légèrement - que Allen aurait eu une part de sang indien. Par contre, ce qui est sûr, c'est que cet homme a toujours joué double jeu, changeant de camp en fonction de son profit personnel. Le responsable de l'embuscade vue en rêve par les enfants, c'est lui : il avait trahi une trentaine de colons, leurs femmes et leurs enfants, pour les mener droit dans un traquenard où ils furent massacrés par les Indiens ...

L'ensemble est non pas incohérent mais très brouillon. Cà et là, des passages étranges et même choquants dans lesquels Masterton, Celte bon teint - cet Ecossais vit depuis de longues années en Irlande - par la voix de Neil et du vieil ennemi de Misquamacus, Harry Erskine, trompette à tous vents la supériorité des Blancs sur les Indiens : si ceux-ci ont été vaincus par l'envahisseur blanc, c'est parce qu'ils étaient moins volontaires, moins braves (!!!), moins intelligents, etc ... Dans une petite phrase, toute perdue au milieu de ce pathos pseudo-américanouillard, il s'arrange tout de même pour préciser que l'avidité des Blancs dépassait, et de très loin, celle des Indiens. Mais enfin, cela, je le répète, ne concerne qu'une seule phrase et risque de passer inaperçu pour le lecteur moyen, surtout désireux de parvenir à la fin de l'intrigue fantastique.__

Masterton reprend le thème lovecraftien des Anciens dieux, que Misquamacus souhaite appeler des étoiles afin qu'ils massacrent tout ce qui n'est pas indien. Mais il le fait plus gauchement qu'à l'habitude : ce n'est pas un hommage, tout juste une tentative d'adaptation. Je le répète, "Revenge of the Manitou" laisse une impression décevante : l'auteur n'est visiblement pas inspiré et l'on peut voir ici un ouvrage de commande - une oeuvre mineure qu'on gagnera à oublier.