The Good Women Of China Traduction : Marie-Odile Probst

C'est alors qu'elle animait à Pékin une émission radiophonique intitulée "Mots sur la Brise Nocturne" que Xinran - très joli nom qui signifie "Avec plaisir" - a eu l'idée de faire un livre avec quelques uns - car ils sont des milliers - des témoignages de femmes qu'elle recevait au studio. Objectif : prouver que, en dépit des énormes mutations subies par la société chinoise lors du XXème siècle, la condition de la femme n'a guère évolué.

Xinran n'aura aucun mal à en convaincre ses lecteurs, à quelque sexe qu'ils appartiennent et sous réserve, bien sûr, qu'ils soient de bonne foi.

Le document s'ouvre sur une jeune fille qui, à onze ans, peu après ses premières règles, fut violée par son père. Quand sa mère l'apprit, elle fut d'abord choquée mais, presque instantanément, traita sa fille comme un objet de sacrifice et n'évoqua plus l'inceste. Pour échapper à la brute, l'adolescente n'eut bientôt plus qu'un seul moyen : l'auto-mutilation ou les infections sciemment contractées qui avaient au moins le mérite de l'envoyer dans un univers protégé, celui de l'hôpital. Encore son père se débrouilla-t-il un jour s'y introduire et abuser d'elle alors qu'elle était sous perfusion ...

La Chiffonnière, elle, est et restera une mère. Elle vit à Pékin, non loin des studios d'enregistrement de Xinran, dans une espèce de décharge où elle fouille la terre pour revendre au prix fort ce qu'elle y découvre. Elle s'est bâti une petite maison en carton, qui ne protège guère contre l'hiver. Mais, malgré sa misère, elle est toujours nette et sa façon de s'exprimer prouve qu'elle a reçu une excellente éducation. Xinran s'apercevra que cette femme a choisi ce mode de vie pour demeurer au plus près de son fils. Ce fils, elle l'a élevé toute seule et il est devenu un politicien en vue. Il s'est marié aussi et, pour préserver la bonne entente du couple, la mère s'est effacée. Elle regarde son fils aller et venir. De loin.

Dans "Chinoises", vous rencontrerez aussi la Femme dont le mariage a été arrangé par la Révolution. Tout semble lui avoir réussi : elle a un mari haut gradé, deux enfants installés et de l'argent. Dans son enfance et son adolescence, elle a reçu une solide éducation. Elle aurait pu même aller vivre à l'étranger car ses parents étaient très libéraux. Mais, entraînée par l'enthousiasme de la jeunesse, elle a voulu rejoindre les troupes de Mao. Elle a été intégrée et puis un jour, on lui a dit : "Tu es prête à accomplir une mission : tu dois l'accepter." Elle accepte, les yeux fermés. Dans le village où elle atterrit, elle est accueillie en tant que secrétaire du colonel local. Mais le soir-même, le colonel la suit dans son lit et la viole. Plus tard, il l'épouse : mariage décidé par le parti.

Enfin, je ne vous dirai rien de bla petite fille qui perdit la raison sous la Révolution culturelle et des femmes de Colline Hurlante /b- le nom d'un village perdu. Lisez, vous verrez bien.

"Chinoises", c'est tout cela et quelques histoires en plus. C'est écrit simplement et cela raconte des choses simples, tristes et malheureusement vraies. A l'aube du XXIème siècle, c'est même terrifiant. ;o)