An Adventure ''Traduction : Robert Amadou''

Sous quel règne, précisément, se sont trouvées catapultées les héroïnes de ce livre ? Telle est bien la question qui demeure. Les intéressées n'ont cessé d'évoquer la fin du règne de Louis XVI et de parler, au sujet de leur aventure, d'un phénomène qui leur aurait permis d'entrer dans la mémoire de Marie-Antoinette se remémorant les beaux jours de Trianon. La majeure partie des chercheurs qui, après elles, ont tenté d'analyser les faits sont plutôt partisans du règne de Louis XV, très précisément de l'année 1774. (Cf. l'hypothèse de Guy Lambert dans l'Introduction de Robert Amadou.)

Ces faits, quels sont-ils ?

Le 10 août 1901, dans l'après-midi, deux enseignantes anglaises, Miss Ann Moberly et Miss Eleanor Jourdain, alors en vacances, décident de visiter Versailles et, plus précisément, Trianon. Leur visite commence normalement, elles voient salles et jardins et c'est dans la Galerie des Glaces que Miss Moberly propose à son amie de rejoindre le Petit Trianon. Les deux femmes se mettent en route et c'est lorsqu'elles empruntent un sentier un peu écarté que les événements insolites commencent à s'enchaîner :

1) Elles avisent tout d'abord deux hommes, l'un plus âgé que l'autre et portant tous deux des tenues vert-de-gris et de petits tricornes (M. 1). Elles les prennent pour des jardiniers car l'un d'entre eux a une bêche et leur demande leur chemin. Ils leur répondent de continuer tout droit. (M. 1).

Peu après, Miss Jourdain aperçoit une femme et une fillette sur les marches d'une maisonnette isolée, sur la droite. La femme passait une cruche à la fillette qui portait un bonnet blanc (J. 2). Mais Miss Moberly, en revanche, ne voit pas ces deux personnes.

2) Elles arrivent alors devant une espèce de kiosque qu'elles prennent pour le Temple de l'Amour - elles comprendront plus tard qu'elles ont fait erreur. Sur les marches du monument, un homme est assis, vêtu d'une cape et d'un chapeau à larges bords (M. 2) Son visage était extrêment repoussant et il semblait menaçant (M. 1).

3) Fort heureusement pour les demoiselles anglaises, peu enclines à demander confirmation de leur chemin à cet inquiétant personnage, surgit brusquement à leurs côtés un homme grand et beau, avec des yeux noirs et des cheveux frisés et bouclés sous un vaste sombrero. (...) Il souriait et il avait l'air intérieurement amusé. Il avait une cape noire qu'il portait comme une écharpe, l'un des pans flottait derrière lui tant il se hâtait (M.1). Elles ont du mal à comprendre son français mais réalisent cependant sans problème que l'inconnu leur recommande de tourner à droite. Ce qu'elles font avec empressement car cela leur évite de passer ainsi trop près de l'homme du Temple.

4) Après avoir franchi un petit pont, Miss Moberly voit une femme blonde, en toilette vert pâle, occupée à dessiner sur l'herbe. Elle a tout le temps de la dévisager, de lui trouver un visage peu sympathique. Mais grande sera sa stupeur, quelques jours plus tard, lorsqu'elle réalisera que sa compagne, Miss Jourdain, n'a pas vu cette femme.

           

Marie-Antoinette donnant la main à Mme Royale, future duchesse d'Angoulême et au petit Dauphin - Toile de Wertmüller.

Miss Moberly déclara plus tard que ce portrait peu connu de la Reine lui rappelait beaucoup la femme blonde occupée à dessiner près du Petit Trianon.

5) Dernière apparition : celle d'un jeune homme qui sortit d'une porte du jardin et nous dit que nous ne pouvions entrer dans la maison que par la cour de la façade, et nous conduisit par un autre chemin, parallèle à celui où nous avions rencontré les jardiniers. Il semblait amusé en nous accompagnant. (M. 1)

A partir de là, le retour à la normale se fait par l'irruption d'une noce en train de visiter le château et à laquelle se mêlent les deux Anglaises.