A Great Delivrance Traduction : Dominique Wattwiller

Encore une Américaine qui place l'action de ses romans policiers en Grande-Bretagne. Mais l'humour n'y a pas autant droit de cité que chez Grimes. Au contraire, l'oeuvre d'Elizabeth George est infiniment plus mélancolique.

Tout d'abord, il y a les liens sentimentaux qui unissent ses personnages, qu'il s'agisse de l'improbable inspecteur Thomas Lynley, qui arrive sur les lieux des crimes en Bentley car il possède un authentique et très ancien titre de lord, de sa maîtresse, lady Helen Hunt, elle aussi d'aristocratique naissance ou encore de bSimon St-James/b, membre éminent de la policie scientifique londonienne, qui a trouvé tout naturel d'épouser Deborah, la fille de son maître d'hôtel. (Pour être franche, dans certains épisodes, tout ça est à la limite du gnan-gnan, à mon avis.)

Dieu merci, Elizabeth George leur a adjoint le sergent Barbara Havers, une plébéienne pur-sang qui souffre d'un physique banal et de problèmes de poids et assume la garde de parents séniles. Havers étant un excellent élément malgré son caractère impossible, ses supérieurs, qui pensaient lui faire reprendre l'uniforme et la circulation, décident, dans cette "Enquête ...", de lui accorder une dernière chance en la faisant faire équipe avec Lynley.

Objectif : résoudre un crime plutôt atroce, le meurtre d'un paroissien-modèle, William Teys, retrouvé décapité dans sa grange. Auprès de lui, sa fille obèse, Roberta, et une hache. La jeune fille sanglote en affirmant que c'est elle qui a tué son père et qu'elle ne le regrette pas.

Seulement voilà, le père Hart, prêtre de la paroisse, ne semble pas croire à cette culpabilité affichée de manière pourtant si déterminée. Et il fait des pieds et des mains pour attirer l'attention de Scotland Yard.

C'est ainsi que Havers et Lynley, contraints de coopérer, vont se trouver plongés dans une enquête effectivement peu claire, de laquelle ne tardent pas à monter d'étouffants relents de pourriture : qui avait intérêt à assassiner William Teys ? celui-ci était-il réellement l'homme probe et charitable dont il donnait l'image ? pourquoi sa femme l'a-t-elle quitté un beau jour en lui abandonnant leurs deux filles ? et pourquoi sa fille aînée, Gillian, a-t-elle imité sa mère en s'enfuyant quelques années plus tard ? que dissimule la boulimie monstrueuse de Roberta ? et n'y aurait-il pas par hasard dans le paisible village du Yorkshire où se situe l'intrigue une personne qui, sans avoir encouragé le crime ni y avoir participé, en sait bien plus sur celui-ci qu'elle ne veut (ou ne peut ?) le dire ?

Un roman opaque qui tient le lecteur en haleine et laisse derrière lui une étrange saveur amère. ;o)