Pavilion of Women Traduction : Germaine Delamain

Si Pearl Buck s'est toujours battue pour les droits de la femme, c'est peut-être parce que, dès l'enfance, elle avait pu observer le sort de soumission réservé aux femmes en Chine. Epouse ou concubine, il n'y avait pas trente-six solutions, la femme non-mariée qui ne se sentait pas de vocation ecclésiastique étant considérée comme une charge inutile.

La condition féminine est donc, avec la Chine le plus souvent, le maître thème de son oeuvre et, dans ce "Pavillon de Femmes", c'est en Mme Wu et dans son entourage féminin qu'elle s'incarne.

Mme Wu est l'épouse unique d'un riche propriétaire foncier. Elle a donné à son époux quatre fils et a donc, selon l'usage, rempli plus que largement son devoir envers les Ancêtres de la maison où elle entra jeune mariée. Cette maison, elle la dirige avec douceur et fermeté mais, le jour de ses quarante ans, elle prend la décision de cesser tout rapport sexuel avec son époux. En compensation, elle entend lui choisir une concubine.

Mme Wu a une nature si bien trempée que, après avoir un peu regimbé, son mari se soumet. Sa belle-mère aussi. Ses fils et leurs femmes sont plus réservés car nous sommes alors dans les années trente, époque de grand trouble pour les traditions de l'Ancienne Chine. Rulan, l'épouse du second fils, qui a étudié dans les écoles étrangères, est cependant la seule à reprocher à sa belle-mère, qu'elle tient pourtant pour une femme naturellement compatissante et à l'esprit plutôt ouvert, de se plier à une coutume désormais dépassée.

Mme Wu n'en maintient pas moins sa volonté. En parallèle, elle souhaite marier son troisième fils, Fengmo, à la fille cadette de l'une de ses amies. Mais Linyi - c'est le nom de la jeune fille pressentie - se refuse à épouser un homme qui ne connaît pas l'anglais. Pour parvenir à ses fins, consciente également que cet apprentissage apportera sans doute un plus à son fils, Mme Wu demande alors à un prêtre d'origine italienne mais parfaitement polyglotte, Frère André, de venir enseigner son fils.

La relation qui se noue entre Mme Wu et le franciscain que l'Eglise de Rome elle-même tient pour un rebelle (il respecte à la lettre le voeu de pauvreté et, en Europe, n'a jamais cessé de ruer dans les brancards d'une Eglise trop tentée par les ors et les pompes du temporel) est au coeur du roman. Certes, elle est appelée à rester platonique mais elle va permettre à Mme Wu, autre rebelle mais qui s'ignore comme telle, de comprendre bien des choses ...

J'ai toujours eu un faible pour ce roman intelligent, parfaitement construit, aux personnages solides, possédant chacun une personnalité bien déterminée, et où éclatent à chaque ligne la tendresse et le respect que Pearl Buck portait à la terre où elle avait grandi. Plus que "La Terre chinoise", au style volontairement plus épuré, il constitue un excellent premier pas dans la connaissance de l'oeuvre de la romancière sino-américaine. ;o)