Bon, alors, ce sera franc et massif : je suis très déçue. Ce livre, dont la quatrième de couverture est extrêmement alléchante et d'autant plus mensongère, est une catastrophe.

Ce petit passage de la quatrième, notamment :

Un style vif et moderne, des personnages énigmatiques et ambivalents, "La Délégation norvégienne" est un roman fantastique au climat lourd et oppressant. Une mise en abyme vertigineuse !

est l'un des plus grossiers mensonges qu'il m'a été donné de lire.

"Un style vif et moderne" ? ... Tout d'abord, le narrateur n'y emploie que le présent, son vocabulaire est extrêmement plat, ses phrases plus journalistiques qu'autre chose. C'est peut-être "moderne", effectivement mais vif, certes pas.

"Des personnages énigmatiques et ambivalents" ? ... Non, des silhouettes, comme sur les affiches, plates, plates, si plates qu'elles s'évanouissent avant même qu'on ait fini le livre. N'ayant aucun passé expliqué ni aucune profondeur psychologique, elles auraient d'autre part beaucoup de difficultés à manifester la moindre ambivalence ! La seule chose qui les intéresse, c'est abattre du gibier. C'est tout. L'auteur a pris des caricatures extrêmement simplifiées, il les a jetées sur le papier et hop ! en avant, marche ! ... Elles ne marchent pas, les pauvres : elles piétinent. On devrait leur donner le coup de grâce dès le premier repas qu'elles prennent ensemble : ce serait faire oeuvre pie, croyez-moi. ;o)

"Une mise en abîme vertigineuse ?" ... La mise en abîme de quoi ? par qui ? Il n'y a rien ni personne dans ce livre sauf la neige, omniprésente mais sans originalité. Elle est froide, glaciale, blanche, épaisse, traîtresse, elle gèle les tuyaux, les orteils, tout ce qui lui tombe sous le flocon, bref, rien de nouveau sous le rare soleil polaire. Ce que Hugo Boris dit d'elle, vous le trouverez dans tous les dictionnaires et dans tous les petits romans à deux sous. Rien à voir avec Peter Hoeg, par exemple, quand il l'évoque ...

Non, il n'y a rien dans ce livre : aucun style, aucun personnage digne de ce nom, encore moins d'intrigue et surtout ni mystère, ni meurtrier bien que, effectivement, un homme y soit assassiné et que les chiens tremblent tous quand ils regardent la forêt sombre (quelle originalité ! n'en jetez plus, la cour est pleine !)

Si vous voulez mon avis, le seul éclair de génie d'Hugo Boris (enfin, lui, il a imaginé que c'était un coup de génie), c'est d'avoir mélangé une nouvelle très célèbre de Robert Bloch (où le narrateur achète un livre qui écrit sa propre vie jusqu'à ce que ...) aux fameux "Dix Petits Nègres" d'Agatha Christie. Il a secoué le tout et il en a barbouillé ses pages, en s'imaginant que cela suffirait à reproduire l'imagination et l'originalité de ces deux auteurs. Comme touche finale, il a aboli la frontière entre mystère policier et histoire fantastique : sans doute ignore-t-il que d'autres l'ont fait bien avant lui avec grand talent, voire avec génie.

Et puis, il a dû s'auto-congratuler. Quant à savoir comment il s'est fait éditer, ma foi, c'est peut-être un proche de Philippe Sollers ou de Josyane Savigneau ... ;o)

Mais aucune quatrième de couverture dithyrambique ne suffit à faire un bon livre. Celle qu'on lui a fournie ne permet donc en aucun cas à "La Délégation Norvégienne" de se révéler ce que'elle prétend être : une bonne histoire, pas plus qu'elle ne permettra à son auteur de prendre pied dans ma bibliothèque. Si j'ai un conseil à vous donner, c'est de passer au large. Ou alors, si vous y tenez vraiment, retenez-le à la médiathèque du coin.

Nota Bene : et pour le "climat lourd et oppressant", franchement, on s'ennuie, oui ! Dame, on attend, on attend, on attend ... Quelque chose va bien se passer ... Mais non, rien ne se passe, on bâille, on commence à somnoler (forcément, toute cette neige, moi, ça me fait somnoler ;o)), on se force à aller jusqu'au bout et on n'a même pas eu peur !

Par contre, comme vous le voyez, on est très en colère. ;o)