Voici un texte de Myriam.A (auteur, poète et membre de Passion des Mots) :

"Tu regrettes? tu ne sais pas.

Tu as été égoïste, égocentrique, exigeante.Tu voulais que tout le monde soit, pense, parle comme toi. Mais tu as été dure, rigide, cruelle envers elle, lui , toi même.

Et tu regrettes, oui, non, peut être.

Ton ego surdimensionné t’a condamné à pourrir seule dans ta solitude. Tu sens déjà la charogne et l’odeur de putréfaction.

Et tu l’as trouvée la vérité, au coin de cette ruelle obscure où marchandent les vagabonds et les vendeurs de merdes hallucinogènes. Et te voilà redescendue sur terre, les pieds bien enfoncés dans cette réalité où désormais tu devras survivre, en évitant de te rappeler les moindres beaux souvenirs qui pourraient vider tes entrailles.

Ta vie ne sera plus même, et tu ne le seras plus non plus. Va donc brûler ces albums vieillots qui encombrent tes placards, et balaye ta mémoire des dernières bribes d’images que tu gardes insciemment au chaud.

Dorénavant, ta cure sera l’oubli. Ce même oubli là qui menace les vieux d’anéantir la seule raison de vivre qui les retient de l’euthanasie.

Tu devras remplir les façades pales de ton existence de rêves Technicolor.

Ta vie sera un spectacle forain, une douce soirée d’été, un voyage au bout du monde. Chaque souvenir oublié sera un espace de plus pour un nouveau chapitre préfabriqué.

Tranche toi la paume des mains, et laisse couler le mauvais sang, et la cicatrice que tu garderas sera le prologue de ton nouveau roman de vie."

... A la lecture de ces 2 textes, j'ai préféré le deuxième... Je dis le deuxième parce que je sais bien que, de toute évidence, il y en a un troisième, puis un quatrième et sans doute d'autres...

Je ne sais que dire... je me sens un bien piètre critique! Je n'ai que du ressenti.

Les 2 premières phrases m'interpellent. Dans cette odeur de charogne et de putréfaction, il en est qui se régalent, comme ces êtres dont on se demande de quel sexe ils sont, et qui, seuls dans leurs rêves tâchés du même foutre depuis tant d'années, râlent et se vautrent sur des matelas, des vêtements ou des draps ou des étoffes ou des photographies... Et, si cela ne suffit pas – car il faut de l'âme et du coeur – alors des pages d'écriture viennent, et de longues interrogations, et tout un déversement, tout une brocante sur toutes les places publiques... Comme si n'existait au monde que cette immensité de soi, putréfiée ou au mieux pétrifiée...

Alors “tu regrettes, oui, non”...

Si c'est “oui”, sincèrement oui, alors viendra cette “vérité au coin de la ruelle obscure où marchandent les vagabonds et les vendeurs de merdes hallucinogènes”... peut-être...

Si c'est “oui, non”... hypocritement “oui, non”, alors s'ancreront les mêmes rêves dans la vase, dans les hauts fonds de la même baie ; et la brocante, les interrogations, l'immensité, sur les places publiques, ne seront que prestidigitation, illusion, tromperie...

Brûler ces albums vieillots qui encombrent tes placards”, c'est un “suicide” nécessaire... Mais le râle dans les draps ou dans les plis des étoffes, ou le râle de l'âme et du coeur, ne se “suicide” pas, le plus souvent... Il fait croire qu'il se “suicide”...

Il faut une volonté de “cap-hornier” pour quitter un océan et entrer dans un autre océan, quitter un monde en soi pour entrer dans un autre monde... Mais de part et d'autre du terrible cap, c'est la même convergence, la même rotation, l'une des courants océaniques et de l'atmosphère, et l'autre du mouvement de la Terre... Tout cela finira un jour...