Il faut imaginer l'artiste devant un public qu'il ne voit pas...

C'est l'écrivain du Net, assis en face de son ordinateur et qui tape sa pensée, son histoire, ses mots, sur le clavier de l'ordinateur... Qui lit sur l'écran de son ordinateur les réponses, les commentaires de ses interlocuteurs, de ses lecteurs...

Que demeure-t-il avec les jours et les saisons qui passent au rythme des fils de discussion, du “vent solaire” des émotions et des propos échangés, des “changements climatiques” que sont les évènements littéraires des uns et des autres sur la Toile, de tous ces personnages que l'on ne voit jamais ; et de cette écume de signes, d'images et d'écriture, bondissant en crêtes et vaguelettes sur l'immense océan qui jamais ne s'arrête?

Que demeure-t-il de tout cela? De l'artiste et de son oeuvre devant ce public virtuel?

Une écume, aussi... Confondue dans l'immensité de l'écume de tous les lieux de l'océan...

Et au pire – ou au final – des émerveillements décolorés, une sorte de fatigue comme la fatigue des yeux et du regard lorsque le soleil a brillé trop longtemps au travers d'un ciel inventé en rêve...

En salle des fêtes, au café littéraire, dans une salle de cinéma ou de théâtre, dans la rue ou sur la place publique ; en face de vrais spectateurs formant un auditoire – et comme un réceptacle – peut-être ne demeure-t-il aussi, que de l'écume au delà des soirs heureux... Et que viennent aussi comme la vieillesse ou la dilution des jours dans le “glouglou” du trou de la baignoire, les émerveillements décolorés, la fatigue...

Mais il y a eu l'orgasme! L'orgasme à ces regards et ces visages reçus ; l'orgasme venu sur les bancs, les chaises ou les fauteuils de la salle...

Il faut imaginer l'artiste devant un public qu'il ne voit pas... Et son orgasme comme une fusée mouillée de feu d'artifice qui lui pète en plein ciel et lui fait tous les feux qu'il veut ; alors que, des autres feux du ciel au dessus de sa tête, il n'en a que l'écho... S'il y a l'écho...