Relié ou rallié?

     Plus encore, à mon sens, que le fait de se rallier ou de ne pas se rallier à une pensée, à un regard, à une vision, à un engagement, à une croyance de l'autre... Le fait de se sentir à un certain moment particulier, relié à cet autre ; alors même que l'on ne partage pas du tout ses convictions, me semble plus important, plus essentiel, que d'adhérer à ce qu'il exprime, que de partager avec lui...

“Aimer son prochain”, et d'une manière générale, manifester sa capacité d'amour ; c'est se sentir avant tout relié à son prochain sans pour autant se rallier à ses convictions, à son regard, à sa vision du monde ou à sa pensée... Je me demande même si “aimer son prochain”, dans ce sens, ne va pas juqu'à se sentir relié à lui, alors même que ce qu'il ressent et exprime nous horrifie, nous glace, nous dérange et nous pousse à lever le poing...

Adhérer et partager, lorsque l'on y incline par sa sensibilité et sa culture... Et donc aimer ; cela, tout le monde peut le faire et il n' y a là aucune étrangeté, aucune porte qui s'ouvre sur un “ailleurs”, aucune immensité à traverser, mais seulement des repères confortabes et la certitude d'un bien être pour soi-même, d'un bien être sans avenir pour l'humanité.

Etre relié sans forcément se rallier, être relié alors que l'on se sent poussé à combattre ou que l'on ne peut que combattre ; cela, tout monde ne peut le faire... Mais je crois que la voie est là : c'est une porte étroite, très étroite...