Envoyer un manuscrit par la poste à une maison d'édition, c'est jeter par dessus bord depuis un bateau en plein milieu de l'océan une bouteille bouchée contenant "la lettre de son coeur et de son esprit"...
Le bouchon prendra l'eau, la lettre sera mouillée et deviendra illisible, et peut importe si le bateau était oui ou non dans un "couloir de navigation"...
la "condition" du cosmonaute perdu dans sa coque de survie après un "naufrage spatial" est à mon sens, moins "désespérante" que celle du jeteur de bouteille...
le cosmonaute, alors que personne, aucun être vivant ne saura qu'il existe, rédige tout de même son "journal de bord" : l'écriture est une forme de prière... Et en ce sens, le cosmonaute est "profondément croyant"...

      Mais ce que peut faire le jeteur de bouteille, c'est de cesser d'être un jeteur de bouteille... Et se rendre dans la salle radio du bateau, envoyer des signaux : les signaux sont un langage, et tous les bateaux de tous les océans du monde ont une salle radio... Les messages radio ne prennent pas l'eau.

... Et le "Grand Mythe" du siècle... de tous les siècles et de tous les millénaires de civilisation depuis qu'existe l'écriture et la diffusion de l'écrit... C'est le "sens du monde"... Et le "sens du monde" n'a jamais été aussi "invalidant" pour la culture, pour la relation, pour la communication, la connaissance pure, l'avancée de l'esprit humain ; que depuis qu'il s'est "bardé" de ces certitudes qui sont celles des "prêtres" tout-puissants et de leurs ouailles...
Certes, par le "sens du monde", il nous a été donné quelques "génies" (gens de lettres et artistes dont certains, assez rares tout de même, confirment "l'exception à la règle" parce qu'ils étaient sur de petits bateaux comme des jeteurs de bouteille).

Mais qu'auraient été ces “génies” s'ils n'avaient été dans leur vie, depuis leur enfance, depuis le berceau même, si proches des autels, si bénis des prêtres, si acclamés par les ouailles?

Il y a beaucoup plus dans ce qui a été perdu pour le monde, que dans ce qui a été gagné en franchissant le “passage obligé” défini par les prêtres et salué par les ouailles...

... Dans les temps de Montaigne, puis de Montesquieu, de Voltaire et de Rousseau, et plus tard des romanciers du 19 ème siècle ; il fallait déjà savoir lire et écrire, ce qui n'était pas comme aujourd'hui “universel” (du moins dans la plupart des pays du monde développé)... De plus, il fallait aussi sans doute plus que de nos jours, être d'un milieu social assez aisé, pour envisager de faire publier des livres et de passer sa vie à écrire... Les éditeurs de l'époque étaient tous imprimeurs et ne travaillaient qu'avec l'argent apporté par des auteurs forcément moins nombreux, et les lecteurs étaient aussi des gens qui pouvaient acheter des livres... Ce n'est qu'à partir de la seconde moitié du 19ème siècle, que commence vraiment le “marché” du livre, des auteurs, des collections littéraires ou populaires.