... Précision cependant : j'entends "pacifiste" le fait (et seulement le fait) de ne pas se servir d'une arme pour un autre motif que de celui de sauver sa vie ou celle d'un ami ou d'un proche. Ainsi, un "pacifiste" à mon sens, peut se servir des mots qu'il dit -ou de son écriture- pour combattre avant même qu'il ne soit attaqué, et raison de plus s'il est attaqué...

Il peut aussi, ce "pacifiste", se servir de ce qu'il exprime -peut-être encore mieux qu'avec les mots- par son comportement, par son regard, par le choix qu'il fait dans ce qu'il achète ou vend, dans ce qu'il décide d'être ou de ne pas être, de faire ou de ne pas faire...

Le "vrai pacifiste", celui qui ne se sert jamais d'une arme même pour défendre sa vie ou celle d'un proche, celui qui aussi, ne se sert ni de ses mots ni de son écriture ni de rien de ce qu'il pourrait exprimer, s'il demeure seul ou isolé dans la foule, avec son pacifisme en lui, est à coup sûr un vaincu.

Le "vrai pacifisme" n'a de sens – et d'efficacité- que s'il est celui d'un peuple tout entier debout en face de ses bourreaux...

"Ma religion n'est pas une religion de prison. Elle offre une place aux plus deshéritées des créatures de Dieu. Mais elle est à l'épreuve de l'insolence, de l'orgueil de race, de religion ou de couleur. Je ne crois pas qu'il puisse y avoir sur Terre une seule religion. C'est pourquoi je m'efforce de découvrir ce qu'elles ont en commun et de prêcher la tolérance mutuelle."

[ Gandhi ]

L'épreuve est si terrible que l'on en vient à prendre les armes si on le peut, ou à résister de toutes ses forces...

Mais peut-on résister en demeurant pacifiste et ne prenant pas les armes, alors même que les Autres en face, sont en armes et tirent ? Et qu'ils ont avec eux la puissance de leurs milices, leurs positions retranchées, leurs forteresses et leurs territoires ?

Alors quoi ?

Crever ? Se soumettre ?

Crever, c'est le premier rang d'une foule aux mains nues qui tombe sous le feu des milices... Puis un deuxième, un troisième rang et ainsi de suite...

Jusqu'à ce que dans les milices, il y en ait qui cessent de tirer car la mort même, la mort qui recouvre la terre à perte de vue, devient une arme contre les armes...

Se soumettre, ce sont tous ces rangs d'une foule immense, agenouillée et ployant sous les coups de matraque...

Et les coups à force de pleuvoir, et la foule à force de ne pas même murmurer, c'est ce qui finit par démobiliser les milices, car la soumission de tout un peuple qui ne dit mot et ne relève jamais la tête, la soumission consciente, délibérée et unanime d'un peuple ne pouvant autrement résister ; fait de la terre une poussière stérile et devient ainsi une arme contre les armes...

Prenons les, de force et d'assaut, par là même ce qui les enrichit lorsque nous sommes soumis à leur culture du profit et de l'argent... Tarissons les sources qui font leurs torrents puis leurs rivières puis leurs fleuves, faisons en ultime et périlleux et absurde recours même, de nos terres, une poussière stérile même si nous-mêmes n'avons plus rien à manger... Alors ils verront et leur orgueil, leur insolence et leur puissance, et toutes leurs milices rouleront dans la poussière...

Il n'y a pas sur Terre une seule religion, une seule pensée, une seule culture, décidée et organisée par des seuls élus au détriment du plus grand nombre d'humains...

Il n' y a qu'une infinie diversité de croyances, de cultures et de peuples, avec la difficulté extrême de l'épreuve et de la coexistence... Et la découverte de tout ce que les croyances, les cultures et les peuples ont en commun pour envisager ensemble un destin possible, une terre qui ne devienne pas poussière stérile...