"Le plus beau triomphe de l'écrivain est de faire penser ceux qui peuvent penser"

                                                            [ Delacroix, Écrits ]

Mais QUI... peut penser ?

Très certainement beaucoup plus de gens que l'on pourrait le croire...

C'est ce mépris des gens de la rue, du peuple et des cités, que certains "intellectuels" affichent, un mépris feutré et cauteleux ; c 'est ce mépris que l'on a des gens qui consomment des produits culturels formatés et diffusés à grande échelle... Qui laisse à penser que rares sont les gens qui peuvent penser...

Mais c'est surtout (et essentiellement) la responsabilité de ceux qui diffusent et vendent ces produits formatés... Qui fait des gens qui ne pensent pas... Ou qui ne pensent plus.

Pourquoi les gens consomment-ils autant de produits culturels formatés? Parce qu'il n 'y a, à vrai dire, que cela ou presque sur le marché ! (sur les marchés les plus en vue et donc les plus fréquentés)...

Ce que l'on ne fait pas exister, comment les gens peuvent-ils le découvrir si personne ne leur dit que "ça existe" ? Si personne ne le fait exister sans cependant chercher à l'imposer ou à le déclarer "d'une essence supérieure" à ce qui se consomme habituellement ?

Dans un immense champ de fleurs familières au regard, tous les regards semblent converger dans un même sens....

Mais des faucheurs partent à l'assaut du champ, ne laissant là où ils coupent, qu'une bande de terre blessée... Ces "faucheurs" sont tous ceux et celles dont le discours prétend se fonder sur une critique agressive, permanente et répétitive de ce qu'ils appellent la "culture de masse" organisée par les lobbies et les médias... Mais ils s'attaquent en fait, davantage aux gens qui consomment, qu'aux responsables qui produisent, diffusent et vendent les produits culturels standardisés...

Toute l'ambiguïté qu'il y a dans la critique de la médiocrité ambiante réside dans le fait avéré – mais non généralisé- qu'il existe des consommateurs choisissant délibérément de consommer du "facile"...

Dans ce champ de fleurs si uniforme soit-il dans une apparente diversité, poussent aussi d'étranges et singulières autres fleurs , aux couleurs et aux formes difficiles pour le regard... Ces fleurs là, ce sont celles qui font penser... Et elles ne sont jamais là où elles sont, pour seulement "quelques regards avisés"... Elles ne sont jamais là où elles sont, non plus, pour être piétinées...