La tempête du 24 janvier 2009 dans le Sud Ouest de la France

C'était une tempête, pas un cyclone : ces deux évènements sont différents!

Un cyclone ne se produit que dans une zone géographique d'environ 1000 à 1500 km de large autour de chaque tropique, dans chacun des deux hémisphères de la Terre. Il se forme dans l'océan Atlantique et suit une trajectoire qui le porte vers le golfe du Mexique ou vers le Sud des USA par exemple... Ou bien, depuis l'océan Indien vers les côtes d'Afrique orientale, autre exemple...

Au dessus de la zone intertropicale, l'épaisseur de la troposphère est de 15 à 17 km (17 km au dessus de la bande équatoriale, 10/12 km au dessus des latitudes moyennes et 7 km au dessus des régions polaires), de telle sorte que les courants chauds chargés de vapeur d'eau au dessus de l'océan, et poussés par les alizés vers les tropiques “montent” plus haut dans une atmosphère plus “haute”, se refroidissent donc davantage, et l'air chaud de surface est alors remplacé par de l'air plus frais selon un cycle formant une “cellule”... Ce sont ces mouvements circulaires en altitude qui, par la variation de leur intensité, font naître ces très profondes dépressions appellées cyclones. Il est évident qu' après le solstice d'été, alors que l'inclinaison de l'axe de la terre parvient à son maximum (23° 27) les alizés atteignent leur plus grande envergure et leur plus grande force de propulsion des masses d'air. Néanmoins, c'est durant la période s'approchant de l'équinoxe et encore suivant l'équinoxe (celui de septembre dans l'hémisphère nord et celui de mars dans l'hémisphère sud) que se forment et sévissent les cyclones...

Bien que les effets dévastateurs d'un cyclone soient identiques à ceux d'une tempête, et que cyclone et tempête aient la même structure tourbillonnante (système en enroulement autour du centre de la dépression), la tempête est un évènement différent parce que directement reliée à la circulation du grand courant d'altitude appellé Jet Stream...

Une tempête se produit, dans chaque hémisphère de la Terre, entre le 30ème et le 60ème degré de latitude (environ) chaque fois qu'un violent courant d'air “descend” du Jet Stream et vient alimenter une dépression (comme quand on jette de l'essence sur un feu).

Le Jet Stream est un courant d'altitude circulant d'ouest en est à une vitesse de 400/500 kmh, situé à la limite de la troposphère (environ 10 000 m en latitude moyenne). Il y a deux courants dans chaque hémisphère : un au dessus des latitudes 30/40, et un autre au dessus des latitudes 50/60... Du fait des turbulences (très irrégulières en intensité) qui se produisent entre ces courants d'air descendant du jet stream et les dépressions se succédant, il en résulte les tempêtes plus ou moins violentes... En général on demeure dans un système “normal” : simple dépression avec ses deux fronts et évoluant jusqu'à son occlusion puis sa disparition, ou dépression quelque peu alimentée par un courant venu du jet stream...

La rotation de la Terre s'effectuant à une vitesse d'environ 1600 km/h, cela explique la vitesse des courants d'altitude (jet stream)...

Nous ne percevons pas physiquement la rotation de la Terre (on éprouve une immobilité apparente) mais si l'on observe le mouvement apparent du soleil et donc la position du soleil dans le ciel à 1heure d'intervalle, on mesure bien la différence. Et cela est encore plus net la nuit avec la position de certaines étoiles dans la partie médiane du ciel.

Les forêts, le relief, les terres et les mers (et leur répartition à la surface du globe), les courants marins, et même la nature et la composition des sols, ont une influence sur certains évènements météorologiques particuliers (précipitations, orages)...

Ainsi vit la Terre avec son atmosphère depuis des millions d'années...

Dans le département des Landes il y eut de 1910 à 2010, donc en cent ans, trois tempêtes vraiment dévastatrices de même type que celle du 24 janvier 2009 : en 1915 pendant la 1ère guerre mondiale, en 1999 et en 2009... Dans la tempête de 1999, c'est le Sud Gironde et le Nord des Landes qui ont été affectés bien plus que les régions situées plus au sud... Et encore d'une manière inégale puisque nous avions alors des “couloirs” de vents très violents (plus de 170 kmh).

Dans la tempête de 2009 c'est la totalité du département en tous points, qui a été dévasté et les arbres sont tombés en beaucoup plus grand nombre du fait des sols gorgés d'eau (et même de gros poteaux électriques avec leur bloc de ciment au pied)...

Tartas, tout comme la plupart des communes du département des Landes a beaucoup souffert... En général les habitations des gens ont peu de dégâts, sauf si un arbre est tombé contre la maison, mais tous les parcs ayant de gros arbres sont dévastés... Les dégâts sont plus importants sur les bâtiments industriels et commerciaux, les écoles, les édifices publics, les routes principales et secondaires, les voies ferrées, le réseau électrique, les lignes de téléphone et les relais de téléphonie mobile...


Selon de nombreux témoignages de personnes et de journalistes ou d'intervenants sur les lieux affectés par cette tempête, 60 % de la forêt de pins est à terre, du littoral sur 250 km jusqu'à l'intérieur du pays sur 100 km...

J'ai moi-même parcouru les zones avoisinantes de Tartas où je réside, en particulier les secteurs de Rion des Landes, Lesperon, Taller, Laluque, Pontonx, Montfort, Mugron, et j'ai constaté que les dégâts sont inégaux, surtout visibles le long des routes, sur de vastes parcelles, mais que par endroits les pins ont mieux résisté, et d'ailleurs la vue d'ensemble depuis les vitres d'une voiture, de loin vers l'horizon, s'étend sur des lignes de forêt encore relativement nettes... Je crois qu'il faut attendre en vérité un diagnostic plus précis et établi sur la base d' observations et d' évaluations plus affinées...


Là où j'habite, les câbles électriques et téléphoniques sont souterrains et plus ou moins reliés directement à des points centraux de distribution de telle sorte que je n'ai eu ainsi que mes voisins, que 3h d'interruption de courant électrique durant le temps de la tempête, et une douzaine d'heures la journée et soirée de samedi d'interruption de téléphone internet... Mais le réseau de téléphonie mobile est très perturbé du fait de la destruction de 80% des antennes relais. Et il y a d'autres interruptions prévisibles sur les lignes téléphoniques et sur internet orange dans les jours qui viennent, du fait que les centraux et relais sont encore alimentés par des groupes électrogènes qui doivent être réapprovisionnés en carburant après refroidissement du moteur... Les toits des maisons à 4 côtés ont mieux résisté que les toits à 2 côtés, les dégradations sont inégales d'une habitation à l'autre mais sont cependant assez nombreuses.

Le moral est au plus bas du fait des conséquences dramatiques prévisibles à moyen/long terme sur la vie économique, sociale, pratique ; sur le travail, les infrastructures de tourisme (campings mobil homes chalets, centres de loisirs détruits à 70 %)
C'est la filière bois et tous les emplois induits, les industries de transformation, les papeteries, les artisanats, et par suite toute la vie économique du pays, et donc la construction, l'urbanisation, l'immobilier... Qui, déjà très affectés par la crise économique actuelle, vont être durement et durablement perturbés et à terme risquer de disparaître...


Déjà première conséquence immédiate : durant 3 à 6 ans environ, 60% de la forêt n'étant que fûts éclatés, jeunes pins cassés à mi hauteur, gros pins 1m diamètre 60 ans d'âge à terre et déracinés, le tout enchevêtré sur des milliers d'hectares... Il n'y aura d'autre activité que celle consistant en travaux de déblaiement, de bûcheronnage, et de stockage de tout ce bois dont une grande partie est inutilisable pour l'industrie.

A titre d'exemple la route reliant Lesgor à Rion des Landes sur 7 km était obstruée par plus de 300 pins déracinés ou cassés... Et ce constat est le même sur toutes les routes du Marensin et de la Haute Lande...
Ce qui veut dire que, dans les cinq ans à venir, la quasi totalité de l'activité exercée en forêt détruite et à terre, n'aura strictement aucune rentabilité (il faut avant de replanter ; nettoyer, déblayer et cela avec de gros engins qui consomment de l'énergie, et des moyens humains et techniques considérables...)

De plus, dans le contexte économique, financier et mondial que nous connaissons ; gérer et entretenir des stocks aussi impressionnants de bois, ou essayer de vendre du bois (celui qui est en partie récupérable) s'avère extrêmement difficile...

Il y a dans les Landes deux sources principales de revenus, et donc deux “piliers” de l'économie, qui font venir et s'installer les gens au pays dans des zones rurales urbanisées (lotissements dans les villages et autour des villes) : d'une part la filière bois avec tous les emplois induits c'est à dire toutes les industries de transformation, et d'autre part le tourisme d'été (en fait plusieurs mois ou périodes) avec les locations saisonnières, les séjours en centres de loisirs et campings aménagés, et donc les commerces et l'artisanat, les animations et spectacles et vie culturelle et sportive...

Vu le bilan des dégâts et destructions, tant pour l'ensemble du massif forestier que pour les infrastructures (bâtiments publics et centres de loisirs), je ne vois pas comment ni surtout avec quel argent il sera possible de “faire repartir la machine”, c'est à dire la vie des gens, la vie économique...

Imaginons que par solidarité, trois cent millions d'européens donnent chacun 1 euro par mois pendant cinq ans : cela suffirait-il sachant que d'autres catastrophes et calamités et dommages de guerres sont prévisibles dans le monde? (par exemple un raz de marée de grande ampleur sur les côtes méditérranéennnes ou un séisme de forte magnitude sur la région Alpes Côte d'Azur Provence, puisque dans le fond du bassin occidental de la Méditérranée à 3000 m de profondeur, il y a une faille qui gagne en activité)...

Sans doute la création et la gestion (et l'alimentation permanente) d'un fonds de soutien en prévision des conséquences des catastrophes naturelles, pourrait être envisageable... Quand on pense à tout ce qui est dépensé pour l'armement, les équipements et engins militaires, par tous les plus grands pays du monde notamment... Il y aurait de quoi subvenir largement aux dépenses occasionnées par les calamités climatiques!

Pour conclure je dis qu'il demeure une réalité non négligeable : celle de la capacité des gens (du moins des plus ingénieux et des plus déterminés d'entre eux) à concevoir et à mettre en oeuvre des projets novateurs et assurant un avenir... Par exemple, dans la forêt des Landes pour un reboisement en implantant des essences, des végétaux ou des variétés de pins mieux adaptés et plus résistants ; par un plan de cultures et d'exploitation des sols visant à renforcer et à mieux qualifier ces sols ; un aménagement du littoral et des espaces de loisirs en tenant compte de la proximité et de la composition des parcelles boisées, de nouvelles industries et entreprises à implanter, des technologies et des équipements moins fragilisés par les intempéries...

Les Landais, s'ils sont très durement affectés (et le manifestent) par cette situation dramatique, par ce qu'ils ont subi personnellement (toitures abîmées ou arrachées, dégâts à leurs cultures et dans leurs locaux de travail, leurs élevages, destruction partielle ou totale de leur patrimoine ou source de revenus)... Vont très vite réagir, se mobiliser, se relever, car ce sont des gens courageux, opiniâtres, inventifs, durs à la tâche, réalistes et pratiques...

Je pense que d'ici cet été, en ce qui concerne les équipements et centres de vacances et de loisirs, les campings, les plages, tout le long du littoral... Que tout cela, donc, sera remis en état dans les meilleures conditions possibles.

     A Tartas, le mercredi 28 janvier 2009, par Guy Sembic.