Toute pensée dans son sens profond et dans son authenticité n' a pas pour destin de devenir parfaite, incontestable, unique en vérité et universelle ; ni ajustable...

Elle est comme un arbre qui, dans sa croissance au fil des ans, se ramifie en nouvelles branches et ramures. Elle a donc un tronc et parfois même deux ou plusieurs troncs , et les racines sont communes à ces troncs.

L'arbre peut atteindre quarante mètres ou plus encore, mais jamais les branches en s'élevant et en s'étendant, ne toucheront le ciel puisque le ciel est un espace et non un plafond situé en hauteur...

Les branches ne changent jamais d'arbre, jamais du tronc dont elles viennent...

Cette autre pensée qui vient et existe, s'érige tout à côté, le plus souvent en opposition et cherchant à s'imposer dans l'espace, à réduire le développement d'une autre pensée ou à tenter de l'étouffer ou de la déchesser ; est aussi un arbre dont les branches ne peuvent indéfiniment s'élever ni changer d'arbre...

Ce que l'on dit être perfectible n'est que l'illusion que procure l'idée d'une ascension infinie vers quelque lieu du ciel au delà duquel il n'y a plus d'autre ciel au dessus...

Ce que l'on croit ou ce que l'on rend ajustable, à propos de la pensée, de l'opinion, de l'idée, et de la manière dont cette pensée est originellement exprimée ; n'est ou ne devient ajustable que parce que l'on cherche, tel un architecte paysager, à rapprocher et à relier des branches de plusieurs arbres, des arbres forcément séparés les uns des autres par leurs racines, même si les racines s'entrecroisent et forment des noeuds...

Le destin de toute pensée est le même que celui d'un arbre, c'est à dire d'exister... D'une existence qui dépasse l'idée du droit à l'existence, qui n'a rien à voir avec quelque concept de droit que ce soit... Frêne, chêne, merisier, hêtre, boileau, accacia, pin, houx, et tout ce qui prend racine dans la terre, est une existence...