Sur les beaux éviers que tu t’es faits en lieu et place de ces sources qui étaient jadis les tiennes et auxquelles tu buvais…
Sur ces beaux éviers qui plaisent tant à tes invités de marque et dans lesquels tu crois ne jamais casser de vaisselle…
Sur ces beaux éviers pour lesquels tu t’es endetté la vie entière après avoir vendu pour le prix d’une éponge les seaux de ton enfance…
Sur ces beaux éviers dont tu es si fier et que tant d’habitants de ce monde n’ont pas…
Sur ces beaux éviers qui, même s’ils ne sont de marbre, d’argent ou de porcelaine, coule plus qu’une fontaine et par les trous desquels s’en vont plus que l’eau d’un puits…
Sur ces beaux éviers je pisse dessus tel un chien fou, un chien errant… Un chien vert!
Mais je t’aime, toi, tout nu devant ton évier ; grelottant de froid ou de peur, rêvant encore parfois à tes seaux de gosse ; délaissé par tes invités ou te préparant pour la fête à venir…
Je t’aime tel un chien fou, un chien errant… Un chien vert! … A coups de museau, à coups de queue, à coups de langue sur tes jambes…