Il est une île vers laquelle je reviens toujours, et c’est la seule entre toutes où je me jette sur le sable de son rivage, un cri rauque, un râle, un souffle brûlant dans le fond de ma gorge, respirant jusqu’au plus profond de mes entrailles l'haleine embruinée d’une salive océane soufflée de ce rivage ; si douce, si enivrante, si proche de cette fragrance exhalée de la chevelure de notre très lointaine mère originelle...

Car nous étions déjà, il y a des milliers d'années, tous deux dans le rêve de cette mère originelle avant qu'elle ne vienne épandre sa chevelure sur les premiers visages d'enfants venus au monde...

Pourquoi cette île et pas une autre, je ne saurais le dire… Peut-être comme l’aurait écrit Montaigne si La Boétie avait été une femme : « Parce que c’était elle, parce que c’était moi ».

Mais sur toutes les îles du monde, j’ai envie de planter des rosiers, de faire chanter des oiseaux, de gratter la terre comme un jeune chat…

Même si c’est toujours sur le sable de mon île que je viens me jeter, même si je ne cesse de me laisser étreindre le regard lorsqu’un rivage enchanteur se fait visage sur la ligne d'un horizon qui danse dans un lever de soleil...