Il est certes plus heureux pour un artiste ou pour un écrivain, d'être sinon assez bien compris du public le connaissant et ayant lu ou vu l'une de ses oeuvres, et très bien compris de ses "fidèles" ; que d'être incompris et hermétique aux yeux de la plupart des gens qui ont pu découvrir l'une ou l'autre de ses oeuvres, et même aux yeux de quelques "fidèles"qui parfois s'interrogent sur le sens de l'une ou l'autre de ses oeuvres...

L'on ne s'interroge jamais, par exemple, sur un livre de Christian Signol, de Jeanne Bourin ou de Barbara Cartland...

Mais l'on s'interroge par contre sur l'oeuvre d'un Céline, d'un Kafka ou même d'un Kundera... qui ont un peu moins de lecteurs qu'un Signol, qu'une Bourin, qu'une Cartland...

Est-ce qu'en leur temps, du temps de leur vivant, Rimbaud, Mallarmé, Eluard, ont expliqué, décortiqué dans le détail leur texte, en face de l'une ou l'autre de ces personnes qui, lisant le texte, "ne comprenaient pas" ?

Est-ce que Dali ou Magritte, ont traduit en un langage simple devant un public ou un visiteur perplexes, le tableau qu'ils venaient de peindre ?

J'imagine que les "pires" – des artistes et des écrivains- sont ceux qui, tant aux yeux du plus grand nombre que des intellectuels "consensuels", sont souvent incompris et, lorsqu'ils sont compris, dérangent...

Il faut assurément en ce monde, des règles, des repères, de la logique narrative, de la construction, du concret, du "palpitant", des modes et des tendances comme dans l'habillement, du "perméable", du représentatif, de la "fable", du rêve, de l'émotion, du suspense... ou même parfois du "marginal reconnu" (même si l'on n'y comprend rien mais dans ce cas on fait comme si l'on comprenait)... !

Un écrivain ou un artiste incompris ou perçu "hermétique" n'explique pas son oeuvre, ni l'un ou l'autre de ses textes ou de ses tableaux... Et lorsqu'il le fait occasionnellement, parce qu'il est sollicité ou attaqué, autant qu'il présente non pas ce qu'il écrit ou ce qu'il peint tel qu'il l'écrit ou le peint, mais tel que cela serait compris par le plus grand nombre... Avec bien sûr, la forme la plus épurée, la plus concrète et donc la plus perméable...

C'est là, je crois, un renoncement... Un renoncement qui mure la porte d'un grenier aux souvenirs et aux inventions d'enfance, que d' accepter de concevoir une oeuvre certes "propre" et sublime si l'on peut, mais dans la grande lignée des oeuvres qui marquent une époque et font le "courant"...