... Un jour j'ai imaginé cette "terrible histoire" (qu'en fait je n'avais pas écrite et qui était demeurée "seulement dans ma tête") ... Et qu'aujourd'hui j'écris...

... Un jeune garçon très polisson mais surtout "assez cruel dans son genre" incendie une fourmilière avec la flamme de son briquet après avoir aspergé toute la fourmilière à coups de bombe d'un aérosol inflammable...

En un instant la fourmilière prend feu, et des millions de fourmis meurent... Mais quelques unes survivent et reconstruisent non loin de là une autre fourmilière... Cette fois, plus éloignée du bord du chemin où était passé le jeune garçon. Et la nouvelle fourmilière érigée derrière des buissons épineux dans un espace dégagé proche de trois ou quatre grands arbres, ne se voyait pas, du chemin...

A dire vrai, chaque fois que je passe tout à côté d'une fourmilière - et surtout si elle est immense - je suis très ému et très grave, de pensée, à ce moment là ... Je vois ces petits êtres vivants et je me dis " quoiqu'il arrive, quoiqu'il survienne, fût-ce le pire, ils auront toujours cette capacité à assurer leur survie, même dans l'environnement le plus défavorable qui soit. Et en fonction de ce qui leur arrive, ils s'adaptent et, en quelque sorte, "se prémunissent" en prévision d'un danger qui les guette...

En l'occurrence, ce qu'il y a d'absolument remarquable dans le cas de cette fourmilière incendiée par un jeune garçon cruel, c'est que les fourmis survivantes, comme d'ailleurs tous les êtres vivants non-humains, n'ont pas comme nous les humains cette notion de "bien ou de mal", de "vengeance" ou d'appréciation "morale" d'un comportement ou d'une action en particulier... Il y a "ce qui leur arrive" et de là, ils réagissent avec une sorte d' "intelligence" qui est la leur (et qui n'a rien à voir avec "notre" intelligence d'êtres humains)...

Personnellement je trouve ça "très beau et très émouvant et d'une réalité qui te prend aux tripes"...

Pour terminer, je dirais qu'en général, j'aime énormément les insectes, en particulier les coléoptères... Et jamais je ne déchire volontairement une toile d'araignée : je baisse la tête dans l'étroit passage, au dessous de la toile...

... J'aurais pu imaginer une suite à cette histoire :

Comme par une sorte de moralité ou de justice se voulant ou s'affirmant "poétique"... Les fourmis survivantes reconstruisent leur fourmilière dans le jardin du garçon cruel...

... En matière de justice ou de moralité (selon ces "bons vieux concepts" si purement humains qui nous sont si chers et que pourtant nous trahissons si souvent)... Non, je n'irai pas jusque là... Jusqu'à imaginer que les fourmis survivantes reconstruiraient leur fourmilière dans le jardin du garçon cruel...

Trop de poésie "lyrique" et donc "trop belle", nuit à la poésie en fait !

Trop de "belle et émouvante morale" nuit à ce que je me risquerais à appeller "la vérité des choses"...

L'idée du "Paradis" selon les religions... "tue le paradis" ! En fait je crois qu'il y a bien mieux, bien mieux encore que le "paradis" (et ça ressemble pas tout à fait à la fourmilière reconstruite dans le jardin du garçon cruel devenu "un ange"... par évolution).

... Il y a, je crois un "thème Kafkaien" (de Frantz Kafka) auquel je semble peu à peu me rallier - sans toutefois ériger ce thème ou cette idée en religion - c'est l'idée que "tout un jour sera retrouvé" et qu'une sorte de vérité (en fait une réalité) originelle, intemporelle et quasi éternelle nous deviendra accessible parce qu'elle nous sera comme rendue... Ayant été perdue dès notre naissance...

Je pourrais encore imaginer dans la maison du garçon cruel, une réserve de sucre...

... La présence d'une provision de sucre - et éventuellement d'autres substances comestibles- dans la maison du garçon cruel, peut en effet être un motif "optionel" pour les fourmis survivantes qui décident - par une sorte d'instinct qui ressemble à de l'intelligence - de reconstituer une fourmilière à proximité de la maison du garçon cruel...

Mais les fourmis et les êtres vivants non humains, n'ont pas je suppose, la notion du risque encouru pas plus qu'ils n'ont la notion de morale, ou de bien ou de mal fondé d'une situation... Ou alors, il s'agit plutôt d'une conscience instinctive et acquise du risque, et d'une "forme de morale" tout aussi instinctive et acquise à leur naissance (un capital génétique)... Ils "font", ils agissent et réagissent... Et s'adaptent... et donc se perpétuent... J'irais même jusqu'à dire qu'ils "s'immortalisent" eux-mêmes le plus naturellement du monde, par générations successives constituant un même "fil d'existence" ininterrompu...

J'imagine que le garçon cruel n' aurait pas pris en compte le fait que les fourmis auraient pu ainsi, "lui faire un enfant dans le dos" en se réinstallant si près de sa maison... A tel point qu'il ne soupçonnerait pas même leur existence désormais d'une "discrétion" acquise par instinct (instinct-intelligence), soit une "discrétion" concrétisée par une construction qui n'aurait plus alors l'apparence de la fourmilière d'origine, mais l'apparence d'un tas de sable, de poussière ou de terre...