Sans ce que j'appelle “le coeur du réacteur”, c'est à dire ce qu'il y a de plus intime, de plus profond et de plus grave en nous... Il n'y aurait peut-être pas de littérature mais seulement de la “dialectique” (c'est ainsi par ce terme là que je définis la littérature ou l'écrit, sans le “moteur” de ce “profondément intime et grave en soi)...

Une “dialectique” (dans le sens que je définis) peut être très belle de forme et de fond. Elle peut même être une oeuvre d'art, et porter en elle un message, une émotion, une singularité... Mais elle n'est pas “littérature” à mon sens...

Certains d'entre nous parce qu'ils expriment ce qui vit dans le “coeur de leur réacteur”, ou tout au moins tentent de le traduire... Font donc de la littérature.

Et la littérature est un acte difficile, aléatoire... Et je ne sais pas si la littérature alors, est essentielle, si essentielle que cela...

Parce que de tous les êtres dont on déclare certains d'entre eux “si proches” de nous, il en est en face desquels on se méprend quant à la manière de communiquer ; il en est d'autres encore avec lesquels il existe une sorte de malentendu, un malentendu qui nous “retient” à “faire lire” ou à révéler...

Ces êtres là, ceux en face desquels on se méprend et ceux avec lesquels subsiste le “malentendu”, nous ne les avons sans doute “pas compris” et “pas aimés” comme ils auraient attendu que nous les aimions...

Et il y a encore cette ambiguité entre d'une part l'authenticité, la spontanéïté et l'émotion de ce que l'on exprime ; et ce que l'on veut faire de ce que l'on exprime ainsi, d'autre part...

Est-ce le sens même de la littérature que de lui faire prendre le “chemin des étoiles” c'est à dire une sorte d'immortalité sous la forme d'une trace ou d'une empreinte ; alors que nous “ratons” un autre chemin : celui de notre vie, du sens de notre vie et de la relation qui nous lie à ces êtres proches de nous?

... Il faudrait, afin que soit levé le “malentendu”, afin qu'il n'y ait point méprise ou méconnaissance... Que la littérature puisse s'apparenter à la “dialectique” tout en demeurant de la littérature...

Si le “coeur du réacteur” est un “bon moteur” pour produire de la littérature, et même si la littérature est aussi “dialectique”; le “coeur du réacteur” est toujours un “moteur” difficile à manier.

Disons que la littérature dans le sens où je la définis, est surtout essentielle pour l'auteur, pour l'homme ou la femme d'écriture, qui ainsi, peut exprimer ce dont il ne parle pas, ce dont il ne révèle rien directement puisque ce sont les personnages qu'il met en scène qui “sont”... Et non pas lui ou elle...

Le chemin de notre vie et de la relation qui nous lie aux êtres proches de nous, est peut-être plus essentiel que le “chemin des étoiles”... Il se pourrait même que sans ce chemin là, il n'y ait pas de “chemin des étoiles”...

Comme l'écrivait Antoine de Saint Exupéry “l'essentiel est invisible aux yeux”, j'irais même plus loin en disant “l'essentiel est non seulement invisible aux yeux, mais aussi invisible au coeur et à l'esprit” (lorsque le “coeur du réacteur” emplit tout l'espace de l'être et l'enferme)...