Le vieux poète

il a mouru, mouru mouru, le vieux, vieux poète...

dans sa maison de retraite médicalisée...

il était pourtant le plus valide de tous les p'tits vieux!

le plus vieux par l'âge mais le plus jeune par l'esprit...

et il faisait son vélo, le vieux, vieux poète...

cahin caha c'est vrai, trois lieues pas plus, il n'eût pu guère!

il a mouru, mouru mouru, tout mouillé assis sur un banc blanc en plein soleil d'après midi d'automne...

à la vue de la plus jolie jolie de toutes les personnelles de la maison de retraite médicalisée...

il avait fait dans son pantalon, le vieux, vieux poète...

au regard bleu électrique de la jolie jolie personnelle en chic tablier cintré...

arrêtée longuement devant lui en une pose qui lui plut, plut plut...

ça lui avait coulé, coulé coulé, tout de go en longs jets saccadés comme de la purée de lait caillé...

que le pantalon en avait été tout traversé...

il eut un hoquet le vieux, vieux poète, vidé vidé...

et puis toc! la pompe cassa net!

“ça m' a plu, très plu, très plu...

et j'ai bandé, bandé, bandé...”

… furent là tout de go, les derniers mots avec lesquels il partit, partit partit pour toujours...

ces tout derniers mots qu'il ne put écrire et que personne-et-jolies jolies-personnelles ne saura jamais...

il n'avait jamais perdu, perdu...

ces orgasmiques et fulgurantes fragrances de sa petite enfance...

qui n'auraient du être en ses vieux vieux jours, que des effluves de souvenirs...

lui venant de ces visages chers dont les regards l'avaient de régal, tortillé tortillé...

de ces haleines agréablement salivées...

de ces silhouettes grêles de petites filles à ses côtés en des jeux où l'on apprend à se connaître...

de ces coiffures, de ces effleurements de doigts, de ces lèvres toutes proches, de ces nuques blanches piquées d'un grain noir ou de quelque tache...

de si jolies filles ou de toute femme lui plaisant...

ah, ces amitiés littéraires féminines! et ces soirées où il aurait volontiers couché avec son public! tout habillé serré entre filles et femmes sur leur 31!

il avait de l'âme, de l'âme de l'âme, le vieux, vieux poète!

à défaut du cap horn et de la barrière de ross, il s'était fait la place du tertre en clodo et le p'tit café du coin en littératoque braguetté à la fermeture éclair plutôt qu'à boutons...