« Qu’est-ce qu’elle a ma gueule » chante Johnny Halliday…

« Optiiik Deuheumiiil » miaule la pub avec la voix de Johnny…

« Visages – livres » ose avancer Yugcib en petit texte de présentation sur deux ou trois nouveaux forums… Au lieu de déclarer comme Tout Le Monde « Bonjour à vous tous, je suis ceci, je suis cela, je fais ceci, je fais cela… »

La gueule de Johnny, en grands panneaux publicitaires OPTIC 2000, suscite en fait une certaine indifférence : l’on en voit tellement, de ces panneaux, de la côte de bœuf en promo au dernier modèle d’automobile !

Si l’on trouve normal que Johnny prête sa gueule à Optic 2000, pourquoi s’offusquerait-on d’un Yugcib balançant « Visages – livres » en « copier/coller » sur les deux nouveaux forums où il vient de s’inscrire comme membre ?

J’ai constaté en plus de deux ans de fréquentation de divers forums du Web, que la plupart des gens qui s’inscrivent et s’expriment sous un pseudo, à dire vrai 99% d’entre eux, annoncent tous d’entrée « Bonjour, je suis ceci, je suis cela, je fais ceci, je fais cela… »

D’autant plus que tous les systèmes, toutes les structures existantes, incluent dans leur logique de fonctionnement, un même principe, un même modèle « prêt à l’emploi ».

Tu ne peux donc rien faire d’autre que de suivre un modèle. Et le modèle, c’est le petit descriptif identificateur habituel, accompagné en marge d’un « avatar » par lequel on se présente en indiquant éventuellement l’URL du site dont on est l’auteur…

C’est fou ce que le système prend en compte le côté « ma pomme » des êtres que nous sommes, et se conforme en une logique incontournable à cette réalité omni présente.

Ce n’est point que cela me désespère… Mais je n’y vois pas là, par cette logique immuable, la possibilité de cet « Ailleurs » ou de cet « Autrement » dont nous rêvons tous cependant…

Il me semble donc qu’une présentation sous la forme d’une réflexion personnelle, d’une petite anecdote, d’un poème, d’un brin d’humour… Enfin, de quelque chose qui interpelle, interroge, sans toutefois essayer de séduire, et qui n’aurait pas forcément plus d’impact immédiat, serait une possibilité envisageable, un peu moins « ma pomme »…

Et j’en viens à cet éternel dilemme : celui d’être ou de ne pas être…

Etre, c’est faire, se montrer, dire qui l’on est… S’exister, dirai-je. Etre, c’est prendre le risque de déplaire, de gêner, de se faire taper dessus…

Ne pas être, c’est se ranger, voire se cacher, ne rien dire, ne rien révéler, ne pas ouvrir son cœur et son esprit, éviter de se découvrir, d’exprimer ses émotions… Ne pas être c’est ne prendre aucun risque, c’est cette double certitude : celle d’une forme de sécurité et celle d’une forme de solitude.

Si tu ES, tu auras quelques amis… Et sans doute un certain nombre d’ennemis.

Si tu n’ES PAS, personne ne viendra te chercher, personne ne s’arrêtera pour te regarder, personne ne t’existera…

Alors ?

Etre ou ne pas être ?

Toute personne, de quelque sensibilité ou culture qu’elle soit, à partir du moment où elle s’inscrit dans un forum, fait indubitablement le choix d’être. Sinon, à quoi sert-il de s’exprimer ? Peut-on vivre, toute sa vie durant, avec ses rêves, ses aspirations, ses émotions en soi… Que l’on ne communique pas ? Qui ira les chercher si elles demeurent invisibles, comme enfermées dans les tiroirs d’une commode ?

Si Optic 2000 est une logique commerciale, si l’on catapulte à gogo des « Bonjour à tous je fais ceci cela je suis ceci cela », et si certaines de nos présentations mine de rien font « retape », et si les systèmes de communication « encensent » cette logique « Mapomminaire », c’est bien parce que sans l’être, il n’y a point d’existence.

Le temps n’est pas… Et n’a jamais été, du « ne pas être » que l’on te fait devenir être en t’existant…

« Existe moi », dit le petit renard des sables du désert, à la fillette qui se promenait entre deux oasis avec son tapis de danse sous le bras…