Clanpins et clanpines sis en leurs nids ou se dorant au soleil sur les plages, ou canoëkayaquant dans les gorges du Verdon, ou discothéquant à Biarritz ou Lacanau, ou campingcaring ou mobilhommant en Provence ou en Bretagne... Attendaient tous que vienne en leur bec une manne tombée du ciel par la grâce du un pour cent de croissance, des heures sup' défiscalisées, des héritages sans frais, et de l'embellie générale dopée par les feux d'artifice du 14 juillet et du 15 Août pétant cette année plus fort et plus longtemps encore, par les défilés et pèlerinages présidentiaux à Epinal et en d'autres villes de France, par les budgets gonflés de crédits et expédients bancaires, par un Euro fort minimisant le prix du carburant, par les dividendes de portefeuilles financiers et par toutes sortes de dépenses loisiresques, restaurantesques, vestimentaires, voituresques et équipementaires...

Maître Sarconard, en sa limousine, perché debout et les deux bras ouverts comme pour embrasser d'un seul, auguste et grand regard, une foule compacte et vénérante accourue de tout le pays environnant... Discourut en ces termes : « Il n'est pas de raison que la manne ne soit pas au rendez vous, notre pays n'est pas une exception, et là où les autres ont réussi, pourquoi ne réussirions nous pas aussi? La tâche est là, ne bronchons pas, avec ardeur pour le pays, pour la croissance, travaillons »...

Alors clanpins et clanpines orchestrèrent dans le sens de l'Instrumentation Générale, s'endettèrent plus encore... Cependant que les plus pauvres et les plus démunis d'entre eux, n'ayant ni campingcarisé, ni restauranté, ni bâti, ni loisiré, ni « mis cent balles dans le dada », avaient vu filer la manne quelque part dans le ciel fou, tel un trait blanc de pisse phosphorescent fusé du croupion des Anges Annonciateurs d'embellie formelle... Ou tel encore traversant les soirs d'été, que ces « lézards lumineux » que l'on voit fleurir et s'agiter avant les feux d'artifice entre les mains des enfants...