Le Blog du Merdier

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mardi, août 5 2014

Le peuple de l'Abîme, Jack London

     Je viens de terminer la lecture de ce livre "Le peuple de l'Abîme", de Jack London, célèbre auteur et écrivain américain (1876-1916), né John Griffith Chaney...

Bien que ce livre ait été écrit en 1902, il est, par ce qu'il décrit, par ce qu'il contient, encore aujourd'hui "d'une actualité brûlante", ou plus exactement d'une actualité qui ne fait guère trop la Une des grands reportages et émissions de Télévision, plutôt axés sur le sensationnel, sur ce "qui se vend bien", sur tout ce qui joue sur l'émotion des gens qu'en majorité nous sommes et qui sont friands de "belles histoires plus ou moins mélodramatiques"...

Rien à voir, donc, ce reportage "vécu au vrai", avec tout ce dont on nous gave à la télé dans le genre de ces  séries américaines ou « novellas » sur certaines chaînes de la TNT... Ou encore avec ces « romans à succès et grand tirage » tout aussi mélodramatiques d'histoires d'amour raté ou d'intrigues compliquées avec des personnages qui sont tous des riches dans de belles demeures, et impliqués dans des affaires de famille, d'héritages et de secrets inavouables...

Si de nos jours, particulièrement en France et dans la plupart des pays « développés », des lois protègent (ou sont censées protéger) les travailleurs, les salariés, d'une part ; et les pauvres, les chômeurs, les indigents, les handicapés d'autre part... Il n'en demeure pas moins que le « tableau » qui est celui que nous dépeint Jack London, de l'East End Londonien du début du 20 ème siècle, demeure toujours d'actualité...

Et ce qui est frappant, c'est la similitude des comportements, de nos jours, de la part de ceux qui possèdent, de ceux qui se trouvent « du bon côté de la barrière » vis à vis de ceux qui n'ont rien, qui se trouvent « du mauvais côté de la barrière »...

L'on retrouve en effet, la même hypocrisie, les mêmes idées reçues et clichés et stéréotypes : en règle générale cela se résume en ce genre de propos « Ils n'avaient qu'à mieux se démerder » (autrement dit « c'est de leur faute »)... Au mieux « ils n'ont pas eu de chance »...

Sans doute, dans les pays « développés » (en gros le monde dans une économie capitaliste à l'occidentale et de consommation), la très grande misère est-elle « moins visible »... Je veux dire par « moins visible », moins répandue qu'elle ne l'était en d'autres temps historiques lorsque 90 % de la population ne mangeait déjà pas à sa faim, et devait travailler vraiment pour « quelques sous » par jour ou par semaine...

L'on retrouve aussi, et sans doute aujourd'hui de plus en plus amplifié, cet écart énorme entre d'une part le revenu moyen (les ressources) de 90% des populations toutes conditions confondues... Et le revenu (la richesse) de 10% des populations les plus et les mieux pourvues, favorisées, d'autre part... Et encore faut-il distinguer parmi ces 10% les plus riches, le 1% « très au delà des 9% d'entre eux »...

Ainsi, de nos jours, sur cette planète qui compte en gros sept milliards d'humains, il y en aurait sept cent millions dont la vie quotidienne est radicalement, fondamentalement différente de la vie quotidienne des six milliards trois cents millions autres personnes...

Et sept cent millions de personnes « vraiment riches » cela représente tout de même déjà « un sacré marché » (en apparence largement suffisant à lui seul pour produire encore plus de biens de consommation genre voitures de luxe, demeures somptueuses, avions privés, équipements de très haute technologie très coûteux, etc.)

L'on y pense, l'on y pense, oui, parfois... d'une manière diffuse et comme « automatique » mais en réalité sans en prendre vraiment conscience, comme si « ça coulait de source », ou même, carrément on l'oublie on l'occulte... Que ce qui fait la vie si différente de 10% des populations du monde, c'est justement la vie, le travail, l'activité, la « trime » -et la misère de 90 % de ces populations... De telle sorte que les « capitaux », les « investissements », les « donneurs de travail -ou d'activité- seront toujours situés du même côté et continueront d'accroître le bien-être des mêmes 10% qui, « avec un peu de chance » -et comme « par voie de conséquence » deviendront 12 % au bout d'un temps indéfini...

A bien observer, et considérer la « marche actuelle du monde » notamment dans son évolution de plus en plus rapide (et disparate) depuis -on va dire- 2008, il paraît certain que peu à peu, puis de plus en plus vite, même dans les pays « développés et d'héritage d'anciennes cultures)... Le « tableau » dressé par Jack London en 1902, de  l'East End Londonien, va redevenir malheureusement une réalité d'ici la fin du 21 ème siècle...

Une autre constatation également s'impose dans le monde d'aujourd'hui en pleine accélération sans précédent, de technologies nouvelles, de développement économique et industriel en particulier dans les pays dits « émergents » (que l'on appelait autrefois le « tiers-monde ») : ce sont précisément dans les pays « à taux de croissance annuel à deux chiffres » que l'on trouve la plus grande différence entre les plus hauts et les plus bas revenus, l'écart le plus considérable entre la richesse de quelques uns et la pauvreté de centaines de millions d'autres... Et ces pays sont le Brésil, la Chine, l'Inde ; puis suivent derrière le Nigéria, le Togo, et quelques autres pays africains ; la Russie, les USA, l'Afrique du Sud.... C'est dans ces pays là que l'on voit le plus présente la misère de tant et tant de gens... Alors que, logiquement, un fort taux de croissance devrait pouvoir profiter à un plus grand nombre de gens, donc, il devrait y avoir dans ces pays, beaucoup moins de pauvreté et de misère... Ce qui démontre bien qu'une croissance forte ne profite en réalité qu'à une minorité de gens, toujours la même...

A Paris, quand un milliardaire du CAC 40 se déplace en avion privé ou en hélicoptère, il se rend dans un aérodrome...

A Sao Paulo ou à Rio de Janeiro ou à Johanesbourg, le milliardaire se rend sur la terrasse du gratte-ciel dont il est propriétaire, et il s'envole direct en hélicoptère depuis la terrasse de son immeuble ou de sa tour de cinquante étages...

Et enfin pour conclure, à noter que les deux systèmes qui ont été en gros ceux qui ont prévalu dans le monde depuis l'antiquité, à savoir l'économie capitaliste basée sur la propriété (biens immobiliers et argent) et l'économie socialiste ou collectiviste ou communiste basée quant à elle non plus sur la propriété mais sur le privilège (ce qui revient à peu près au même)... N'ont en rien amélioré le sort ou le destin, la vie quotidienne de la plupart des Humains sur cette Terre... Puisque l'on retrouve quelque soit le cas de figure, le même écart considérable entre les conditions de vie des uns et des autres...

http://appli6.hec.fr/amo/Public/Files/Docs/141_fr.pdf


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mardi, juillet 29 2014

La case de l'oncle Tom, de Harriet Beecher Stowe


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samedi, juillet 19 2014

La guerre de Cent Ans, de Georges Minois

 … Livre de poche, collection Tempus, éditions Perrin, 2010.

… « Autant qu'un récit vivant et documenté, cet ouvrage sur la guerre de Cent Ans est un essai d'histoire totale... » (4 ème de couverture)... qui nous montre à quel point ce conflit entre les royaumes de France et d'Angleterre, de 1337 à 1453, a marqué profondément le destin de l'Europe et contribué à l'émergence des nations ; car l'économie, la politique et l'idéologie ont pesé aussi lourd que les affrontements militaires et la diplomatie...

Jean II, dit « le bon », un très mauvais roi de France...

C'est à mon sens, l'un des pires de l'Histoire de France : un incapable, sans aucune envergure, un hésitant, un imbécile... Et sans aucune moralité...

Dans les années 1360-1364, Jean II est prêt à tout pour payer une partie de la rançon 600 000 écus, en vue de sa libération. Vu l'état du Royaume de France à cette époque (juste après le traité de Brétigny dont les conséquences sont pires que la guerre, notamment avec les Grandes Compagnies qui mettent toute la France région par région jusqu'au moindre village, en coupe réglée ; vu l'état des finances, la misère endémique et totale de millions de gens, les guerres que se livrent entre eux les Seigneurs, les compagnies, les soit-disant "alliés" du Roi d'Angleterre et du Roi de France ou de quelque duc... Il est impossible de réunir une telle somme de 600 000 écus... D'ailleurs, Edouard III roi d'Angleterre "révisera" ce montant astronomique et le réduira à 400 000 écus, dont, dans un premier temps, cent mille parviendra dans le coffre de l'abbaye de Saint-Bertin à Saint Omer (pas-de-calais)...

Jean II vend sa fille Isabelle âgée de 11 ans, au duc de Milan Galeazzo Visconti qui l'achète pour son fils de 8 ans ! Pour justement 600 000 écus ! (quelle honte!)

Mais comme cent mille écus sont versés au départ, il faut rapidement trouver le complément afin de régler la rançon à tout prix, le plus tôt possible. Les grands seigneurs, les nobles, les grands bourgeois, le peuple, personne ne veut contribuer à réunir la somme complémentaire, du fait de l'impopularité, déjà, de ce roi imbécile, minable et uniquement préoccupé de son confort personnel, des fêtes et banquets qu'il donne encore en dépensant de l'argent qu'il n' a pas... Alors Jean II lance un emprunt forcé sur les villes, sur le clergé, sur tous les hommes ayant quelque avoir, et cet argent est collecté avec des méthodes brutales dans une population exsangue...

Et le comble, dans l'histoire, c'est que le clergé Anglais (qui alors dépend encore du pape d'Avignon) et donc le peuple Anglais par conséquent, contribue pour 10% de ses ressources à la rançon de Jean II ! (puisque le pape a autorisé le prélèvement sur le clergé Anglais comme sur le clergé Français)...

Finalement, ce roi imbécile et incompétent, Jean II "Le Bon" (on aurait dû l'appeler "Le Crétin") s'éteint le 8 avril 1364 au Palais Savoy de Londres après un hiver très froid, humide, où rôde la peste, la typhoïde, la grippe et la variole...

La France de 1360 à 1370 connaît alors des années bien plus noires encore, que celles de 1940 à 1944 !... Ou même, que celles, actuelles, de la France de Hollande en pleine crise économique, chômage massif et « affaires pourries » (quoique la comparaison avec les années noires de 1940-1944 soit disproportionnée)... Pas un bourg, pas un village, pas une campagne, toutes régions confondues de fond en comble, qui n'est été pillé, brûlé, détruit, ses habitants massacrés au mieux rançonnés, les femmes et filles de 7 à 77 ans violées, les récoltes saisies ou brûlées, sans compter les tortures, les pendaisons arbitraires, les écartèlements, dépeçages à la hache, les gens par centaines entassés dans les églises et brûlés vifs... Tout cela par les armées en déroute ou se combattant, par ces "Grandes Compagnies" de brigands, de seigneurs félons, organisées en sociétés avec leurs lois brutales, leurs codes, leur hiérarchie, tout cela dans l'anarchie la plus complète et sans que le pouvoir Royal (ou "légal" si l'on veut) puisse intervenir, quand il n'était pas lui-même complice, autant d'ailleurs que les Anglais occupant la moitié de la France!


... Sources :


La Guerre de Cent Ans, de Georges Minois, livre de poche...

Georges Minois est agrégé et docteur spécialiste de l'histoire culturelle. Je recommande également, comme auteur d'ouvrages d'histoire, Jean Christian Petitjean, auteur notamment de livres très détaillés avec nombreuses sources sur le règne et l'époque de Louis XIV...


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mercredi, juin 11 2014

Céline l'homme en colère, de Frédéric Vitoux

     Frédéric Vitoux, de l'académie française, fut en 1968 l'un des premiers étudiants français à entreprendre une thèse consacrée à l'auteur du Voyage, parue en 1973 sous le titre Louis Ferdinand Céline, misère et parole (Gallimard)...

En janvier 2009, Frédéric Vitoux publie Céline l'homme en colère...

Voici ce qu'écrit Frédéric Vitoux dans son introduction à « Céline, l'homme en colère » :

«  Un écrivain happé par l'université...

Il a été disséqué, laminé, écartelé, embaumé – de thèse en conférence et de colloque en diplôme. Là aussi, le phénomène s'est révélé mondial. Des universitaires australiens lui ont consacré dans leurs revues des numéros spéciaux, des universitaires italiens se sont penchés sur ses hallucinations romanesques. Des études savantes ont été publiées par-ci, par-là, sur les structures stylistiques de sa langue, la répétition chez lui de quelques tournures syntaxiques, les fonctions de ses néologismes... D'autres universitaires s'épuisent encore à dresser des lexiques, des catalogues, des index, des tableaux analytiques de sa vie et de son œuvre. Bref, Céline est mis en fiches, son texte saisi par les ordinateurs et la proie des moteurs de recherche... »

… Il en est de même pour quelques autres écrivains ou poètes entre autres Arthur Rimbaud, Marcel Proust... Sur l'oeuvre desquels « planchent toujours » les universitaires, les critiques, les chercheurs...

Mais il est à mon sens, comme  une vérité éternelle  ou plus exactement une réalité éternelle : « l'on est tout seul dans sa peau jusqu'à la fin de ses jours » et cela quoiqu'il soit dit, écrit, disséqué, commenté, interprété, de l'homme ou de la femme écrivain, poète, artiste... par les universitaires, les chercheurs, les biographes, et en règle générale tout un chacun... De même que « l'on est tout seul dans sa peau jusqu'à la fin de ses jours » en tant qu' être ordinaire de ce monde au beau milieu de ses proches, de ses connaissances, de tout un chacun aux alentours et cela quoique ces proches, que ces connaissances et tout un chacun puissent dire de ce que l'on est, de ce que l'on fait...

Et Céline écrit dans une lettre à Milton Hindus du 22 juin 1947 :

« Je m'intéresse peu aux hommes et à leur opinion, et même pas du tout... C'est leur trognon qui m'intéresse... pas ce qu'ils disent, mais ce qu'ils font... La chose en soi... presque toujours le contraire de ce qu'ils racontent, c'est là que je trouve ma musique dans les êtres... Mais malgré eux... »

Cette lettre fait écho à une simple et exemplaire profession de foi du médecin des pauvres qu'a été Louis Ferdinand Céline (de son vrai nom Destouches) :

« La fuite vers l'abstrait est la lâcheté même de l'artiste – Sa désertion. » (lettre à Elie Faure du 2 mars 1935)...

Le « trognon » n'est-il donc pas la « peau » autrement dit la réalité intérieure, profonde, authentique, en dehors de tout regard porté par les autres, de l'être ?

Et, fuir cette réalité intérieure, profonde, authentique de l'être, s' absoudre de cette réalité par les artifices de l'abstraction, c'est à dire par une représentation qui n'a plus rien à voir avec la réalité première ou qui est une contrefaçon, une contrefaçon même « habile » si l'en est, de cette réalité... C'est, cela s'assimile à de la désertion, de la lâcheté de la part de l'artiste... Car la réalité s'impose et exige que l'on se confronte à elle dans toute sa dimension, de sa surface jusqu'en sa profondeur ; et que l'on ne baisse pas les yeux vers le sol, là où s'étend ce qui n'est que le reflet ou la représentation « cultuo-culturelle de confort relatif », de cette réalité...

Écrivain maudit, controversé, ordurier, consacré... (et tout ce que l'on peut en dire) Avec cependant son style ajouré, éclaté comme de la dentelle... ? L'oeuvre de Céline, à l'exception de Voyage au bout de la nuit et de Mort à crédit, reste encore aujourd'hui, largement ignorée du « grand public » mais aussi d'un certain nombre d'intellectuels de formation universitaire...

Et que dire de tous ces écrivains qui, d'une manière ou d'une autre pour telle ou telle raison se réclament de Céline, tout comme d'ailleurs ils peuvent aussi se réclamer de tel ou tel auteur ?... Que dire, oui, de ces critiques littéraires s'exclamant à propos de tel écrivain « c'est du pur Céline »... Alors qu'en vérité, oui, « on est tout seul dans sa peau jusqu'à la fin de ses jours » ?

Ce n'est -peut-être- que par le « trognon », ce « petit bout de trognon  pris en pleine poire »... Que tu parviens, à peine le temps d' une étincelle de lumière traversant le ciel de nuit, à ne plus être « tout seul dans ta peau »...


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vendredi, mai 2 2014

Extension du domaine de la lutte, de Houellebecq

      “La difficulté, c'est qu'il ne suffit pas exactement de vivre selon la règle. En effet vous parvenez (parfois de justesse, d'extrême justesse, mais dans l'ensemble vous y parvenez) à vivre selon la règle. Vos feuilles d'imposition sont à jour. Vos factures, payées à la bonne date. Vous ne vous déplacez jamais sans carte d'identité (et la petite pochette spéciale pour la carte bleue !...).

Pourtant, vous n'avez pas d'amis. “ [page 12, édition J'AI LU]

... “Pas d'amis”, dirais-je, autres que ceux qui sont inscrits sur votre page de Facebook... Quoiqu'à mon avis il n'y a guère beaucoup de différence entre les “amis” de Facebook et les “amis” dans la “vraie vie” (rire)...

En fait, je crois que dans la règle, il y a beaucoup d'amis... Mais je crois aussi que la règle c'est une sorte de paysage large comme un grand tapis de salon salle à manger, sur lequel un train électrique a été installé. Et plus le train a de wagons, plus il peut changer de locomotive, plus il y a de rails, d'aiguillages, de petits arbres en plastique, et même de petits personnages, avec des vaches, un petit toutou, des barrières, des signaux... Et plus il y a de monde, autour du tapis, dans le salon, pour voir le train, le joli train...

Je n'aime pas ce monde, décidément je ne l'aime pas. La société dans laquelle je vis me dégoûte ; la publicité m'écoeure ; l'informatique me fait vomir. Tout mon travail d'informaticien consiste à multiplier les références, les recoupements, les critères de décision rationnelle. Ça n'a aucun sens. Pour parler franchement, c'est même plutôt négatif ; un encombrement inutile pour les neurones. Ce monde a besoin de tout, sauf d'informations supplémentaires.


La plupart des “boulots” dans les pays tels que la France où l'on ne “produit” plus, où l'on ne “fabrique” plus, où il n'y a plus d'industries ; sont des boulots d'économie de consommation et de services dans lesquels on “galère” pour “fourguer” à une clientèle sans cesse ciblée et harponnée, des produits la plupart du temps superflus, voire inutiles... Le pire étant certainement dans le domaine des technologies dites “nouvelles” (téléphonie mobile, informatique et applications liées)...

Dans la soirée (c'est le 31 décembre) je téléphone à SOS Amitié mais c'est occupé comme toujours en période de fêtes. Vers une heure du matin, je prends une boîte de petits pois et je la balance dans la glace de la salle de bains. Ça fait de jolis éclats. Je me coupe en les ramassant, et je commence à saigner. Ça me fait bien plaisir. C'est exactement ce que je voulais.[page 128]

Bravo ! ... Dis-je, à la lecture de ce passage... Pour ma part, au lieu d'une boîte de petits pois (ou de cassoulet William Saurin) lancée sur la glace de la salle de bains (ou depuis le balcon d'un appartement situé au quatorzième étage d'un immeuble HLM à Cergy Pontoise)... J'aurais donné un grand coup de hache sur l'écran d'une télé...

Extension du domaine de la lutte, roman

Voici l'odyssée désenchantée d'un informaticien entre deux âges, jouant son rôle en observant les mouvements humains et les banalités qui s'échangent autour des machines à café. L'installation d'un progiciel en province lui permettra d'étendre le champ de ses observations, d'anéantir les dernières illusions d'un collègue -obsédé malchanceux- et d'élaborer une théorie complète du libéralisme, qu'il soit économique ou sexuel. [quatrième de couverture]

Ce roman, dont le premier dépôt légal est en août 1997, a donc été écrit lors de cette époque “transitoire” des années 90 du siècle dernier... Et, curieusement l'histoire me semble “tout à fait actuelle”...


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lundi, octobre 21 2013

Les particules élémentaires, de Michel Houellebecq

     ... Y'avait Coluche, y'a plus Coluche... (et c'est dur qu'il n'y soit plus!)

Le monde était ce qu'il était mais y'avait Coluche... Le monde est toujours ce qu'il était -et même pire-  Mais y' a plus Coluche...

Y'a Houellebecq... Mais Houellebecq c'est pas Coluche... Mais y'a quand même Houellebecq... Le monde est encore pire que ce qu'il était, mais avec Houellebecq à défaut de Coluche, j'arrive à "m'y faire" (tant bien que mal c'est vrai, mais quand je lis du Houellebecq je me marre et je vois le fil se dérouler et je comprends mieux les choses rien que la façon dont il les dit ces choses, Michel Houellebecq ! … Dis-je...

... Le moins que l'on puisse dire c'est que "Les particules élémentaires", de Michel Houellebecq, déposé en juin 1998 ; s'adresse à un public "plutôt averti", c'est à dire à un public qui n'est pas tout à fait le même que celui qui achète des romans "grand public", des livres distrayants ou mélodramatiques que l'on lit sur la plage, dans le train ou dans le métro...

L'on entre avec ce livre dans la réflexion solitaire d'un des personnages principaux, une réflexion qui s'avère être le point de départ d'une révolution scientifique comparable à l'oeuvre d'Einstein.

Dans un centre de recherche génétique, Michel Djerzinski, le demi frère de Bruno, qui avait mené des expériences de pointe sur le clonage d'animaux dans son laboratoire parisien du CNRS, travaille à un projet qui va produire une nouvelle espèce humaine non dénuée cependant, de personnalité et de plaisir sexuel.

Le travail de Michel, poursuivi après sa mort en 2009, conduit à la création en 2029, d'une espèce humaine génétiquement modifiée et contrôlée, mais finalement condamnée à l'extinction...

Une fellation notamment ( c'est fou soit dit en passant dans ce livre, ce qu'il y est question de fellation) y est décrite cliniquement et scientifiquement dans le moindre détail, avec les terminaisons nerveuses et tout ce qui se passe jusqu'au cerveau...

... Je cite ce passage, page 153/154 :

"L'histoire de la vie sur Mars se manifestait comme une histoire modeste. Cependant (et Bruno Masure ne semblait pas en avoir nettement conscience), ce mini-récit d'un ratage un peu flasque contredisait avec violence toutes les constructions mythiques ou religieuses dont l'humanité fait classiquement ses délices. Il n'y avait pas d'acte unique, grandiose et créateur ; il n'y avait pas de peuple élu, ni même d'espèce ou de planète élue. Il n'y avait, un peu partout dans l'univers, que des tentatives incertaines et en général peu convaincantes. Tout cela était en outre d'une éprouvante monotonie. L'ADN des bactéries martiennes semblait exactement identique à l'ADN des bactéries terrestres... / ... / ... Si l'ADN était partout identique il devait y avoir des raisons, des raisons profondes liées à la structure moléculaire des peptides, ou peut-être aux conditions topologiques de l'autoreproduction. Ces raisons profondes, il devait être possible de les découvrir ; plus jeune, il s'en souvenait, une telle perspective l'aurait plongé dans l'enthousiasme."

... Et, page 346 :

"Les herbes de la berge étaient calcinées, presque blanches ; sous le couvert des hêtres la rivière déroulait indéfiniment ses ondulations liquides, d'un vert sombre. Le monde extérieur avait ses propres lois, et ces lois n'étaient pas humaines."

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jeudi, août 8 2013

La pierre la feuille et les ciseaux, d'Henri Troyat

Le Cercle du nouveau livre, Librairie Jules Tallandier. Dépôt légal : 1 er trimestre 1972

Résumé :

Peindre, rêver, choyer ses amis, recueillir chats perdus et garçons errants, telles sont les joies paisibles d'André jusqu'au jour où surgit dans sa vie, pareil à une tornade, Aurélio -avec sa jeunesse provocante, son féroce appétit de vivre et son ambition démesurée.

Bientôt maître des lieux, Aurélio subjugue André et fait de Sabine la meilleure amie de celui-ci, sa maîtresse.

Sabine, jeune femme fantasque, avide de plaisirs et de liberté, aussi prompte à déchirer Aurélio qu'à l'adorer.

Entre ces trois êtres que lient des sentiments ambigus et sans cesse menacés, s'instaure un jeu tantôt cocasse et tantôt tragique, apparenté à ce très ancien jeu qu'on appelle la pierre, la feuille, les ciseaux.

Mon avis :

Nous sommes là, dans ce récit, en plein dans ces années qui suivirent Mai 68, où nous retrouvons bien l'état d'esprit, l'atmosphère, la culture, les modes de vie, les aspirations, les rêves – mais aussi les dérives- de cette époque...

Et nous sentons, dans ce récit, ou plutôt nous perçevons l'évolution de la société, avec notamment la prise de pouvoir des "Intellectuels branchés et artistes déjantés de style Rive Gauche", l'engouement du "grand public" pour les modes vestimentaires, pour toutes sortes de gadgets et de nouveautés de la société de consommation...Et aussi l'adhésion des jeunes (et moins jeunes) à de "nouvelles expériences", à des mouvements culturels et artistiques "marginaux"...

Le personnage d'André, dans ce livre, est celui d'un homosexuel qui cependant "n'est pas du tout insensible au charme féminin", la preuve c'est qu'il a "une amie très chère", Sabine, pour laquelle il éprouve une tendresse immense, qu'il vénère et protège, et dont il s'occupe de l'enfant qu'elle a eu avec Aurélio.

Quelques passages que j'ai notés...

... Et qui m'ont interpelés et que j'ai trouvés "très littéraires" :

... "Un long fume-cigarette en ivoire, au bout cassé, était tombé de la boîte. Il le ramassa et revit sa mère. Elle fumait en feuilletant un journal illustré, et lui, assis à ses pieds, jouait avec des rubans de couleur. Contre son dos, la chaleur d'une jambe. Il levait la tête et recevait, comme une douce pluie, un regard, un reflet de cheveux, la courbe d'une bouche peinte. Pas d'heure pour les repas ni pour le coucher ; un jour, des gâteaux, le lendemain des macaroni ; une vie d'attrapes et de pirouettes. Un soir, elle s'était déguisée en bohémienne avec de vieux rideaux. Comme ils avaient ri ! Et la fois où on avait décidé de ne s'adresser la parole qu'en chantant, comme à l'Opéra. Elle ne leur disait jamais rien de leur père, qui l'avait quittée après cinq ans de mariage et était mort dans un accident de voiture, en Australie. Tout ce qu'on savait de lui, c'était qu'il avait un grand nez. Elle avait horreur des grands nez. Mille choses lui faisaient peur : les couteaux à manche de bois, les tessons de bouteille, certaines pommes de terre aux grimaces maléfiques, un trop long silence, une trop profonde nuit. Toujours il y avait une lampe allumée dans sa chambre. De quelle couleur étaient ses yeux? Cent fois, André avait tenté de la peindre de mémoire. Impossible, son pinceau mentait. Mais il savait qu'il essaierait encore, de temps à autre, jusqu'à la fin de sa vie. Il reposa le fume-cigarette dans la boîte. "

... "A l'aveuglette, André lui entoura les épaules de son bras. Aurélio se laissa faire. Joue à joue et les pieds réunis. De ces points de contact, une tendre brûlure se répandait dans tout le corps d'André. Il avait envie de pleurer et de mordre. Sa bouche frôla l'oreille du garçon.

Inexplicablement il pensa à sa mère. Elle le prenait dans son lit lorsqu'il était enfant. Sa voix douce. Il ferma les yeux. Aurélio se souleva sur un coude et tourna le buste vers lui."

... "Par l'interstice des rideaux mal joints, un jour pluvieux se déversait dans la chambre.../... Assis sur une chaise, il contemplait ce grand corps nu étalé en travers du divan, une jambe repliée, l'autre droite, les bras ouverts, comme un sauteur passant la barre, à l'horizontale, dans un effort de haut vol. La main gauche du dormeur pendait mollement, doigts écartés. Sa figure, à demi enfouie dans l'oreiller, parmi le désordre des cheveux,était, paupières et bouche closes, tout entière vouée au rêve. Les muscles de son ventre plat se soulevaient et s'abaissaient au rythme d'une respriration profonde. Trois touffes de poils bruns marquaient sa peau mate aux points essentiels. Et le sexe désarmé reposait sur sa cuisse, avec une naïveté énorme. Les minutes passaient lentement et André continuait à équarquiller les yeux sur ce paysage de chair, avec étonnement, avec gratitude, comme s'il l'eût créé lui-même en une nuit."...

NOTE : André est un artiste peintre qui n'a pas d'autre ambition que celle de réaliser "ce qu'il sent, ce qu'il perçoit" (et qui n'est pas forcément "du courant", "de la mode", et qui "aura donc du succès et se vendra")...

... Ce passage "qui en dit long" (mais "très classe") sur la relation d'André et d'Aurélio... Soit dit en passant "me fait oublier ce qui me fait horreur en particulier, dans la relation homosexuelle entre hommes, et que je n'évoquerai point ici"...

Nous sommes loin, d'ailleurs, dans ce livre d'Henri Troyat, de tout "préjugé", de tout "cliché", de toute "morale conventionnelle"... Nous sommes dans "une vérité authentique et profonde des êtres"... qui ne cherche pas à s'imposer à nos vues, qui nous surprend certes, mais sur la quelle nous sentons bien qu'il n'y a "rien à dire de pour ou de contre, de bien ou de mal"...

Dans une "certaine mesure" dis-je, sans cependant adhérer à la "culture soixante-huitarde" (dont je déplore les effets "pervers" et à mon sens "un peu trop déjantée-branchée-intello-bobo") ... Je reconnais ce que cette époque pouvait avoir d'émouvant, d'humoristique, de sensible, de "libertaire"... Et parfois "d'intellectuel au sens vrai si l'on veut, du terme"...

...Et, plus personnellement dirais-je :

... La "prise de pouvoir" des intellectuels "branchés-bobos-rive Gauche" est en fait une prise de pouvoir dans les domaines de la littérature, de l'art et de tout ce qui d'une manière ou d'une autre participe à la vie culturelle d'une époque...

Nous sommes actuellement, plus que jamais, plus encore qu'à l'époque d'après mai 68, dans la "mouvance" (qui évolue d'ailleurs un peu n'importe comment) de cette "prise de pouvoir" par les intellectuels et les artistes en général, des intellectuels et des artistes "portés sur la scène médiatique" mais avant tout préoccupés et soucieux de leur "image de marque", de leur audience... Et qui, en aucune façon, "ne changent le monde ni les gens", et dont les productions sont essentiellement des "produits commerciaux" de "consommation de masse", voire des "gadgets", des "phénomènes de mode et de saison"...

J'y vois là, personnellement, une "immense médiocrité voire une nullité culturelle" qui "en fout plein la vue" avec des formules, des argumentations, des effets spéciaux de langage et de termes plus ou moins techniques ou universitaires, des complaisances parfois révoltantes ou au contraire des fanatismes et des sectarismes, le tout "architecturé et mis au goût du jour" ; et, avec tout cela, le "look", les cocktails, les dîners, les salons, les coucheries, les trahisons, les tweets incendiaires ou qui partent comme des "belles bleues" dans un ciel qui même clair n'a plus d'étoiles...

Je me sens "en complète inadéquation" avec ce monde là, de contrefaçon, d'esbroufe, de paraître, et de médiocrités érigées en cathédrales de culture !

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samedi, juillet 27 2013

Michel Houellebecq

      Je ne pense pas, ayant achevé la lecture de La carte et le territoire, que je procèderai comme je l'ai déjà fait pour d'autres livres (présentation-résumé-extraits-mon avis)...

Ce qui me semble à peu près "sûr" après la lecture de La carte et le territoire, et après les quelques informations que j'ai pu recueillir au sujet de Michel Houellebecq, tant sur Wikipédia que sur le site de l'écrivain... C'est que je tends à penser que Michel Houellebecq serait "l'un des plus grands écrivains contemporains actuels"... Et que "notre époque, pour cette raison de l'existence de cet auteur -et sans doute de 2 ou 3 autres- ne serait pas le vide culturel ou intellectuel que l'on pourrait déplorer"... (cela en effet nous "change" de tous ces auteurs "à succès populaire" mélimélo dramatiques à sensation gros succès de librairie littérature de gare et de plage)... Et cela nous "change" également, de toutes ces productions "essayistes journalistiques connotation autobiographique gallimatia de formulations de style universitaire intellectuel bobo branché" d'hommes et de femmes politiques et de grands animateurs télé, qui se "vendent comme des petits pains" au grand public mais soit dit en passant le grand public il y comprend rien dans ces bouquins là... (ou alors il fait semblant de comprendre et se lance "pour faire bien" dans quelque "diatribe" argumentée de "on dit que...")

... Je pense aussi que la seule lecture d'un livre en particulier d'un auteur, ne suffit pas loin s'en faut, pour appréhender l'ensemble de l'œuvre d'un auteur. Mais pour cela, peu de gens, peu de lecteurs, et même peu de "grands lecteurs" (de ceux qui passent des journées ou des nuits entières à lire) sont disposés, ou plus exactement se rendent disponibles pour se consacrer à l'étude d'un auteur, de l'œuvre d'un auteur dans son ensemble... (Pour cela, il faut "sentir que ça vaille le coup"!)

"L'œuvre de Michel Houellebecq donne lieu à des jugements radicalement opposés. Pour certains critiques, il serait le plus grand écrivain contemporain, pour d'autres son écriture relèverait de la nullité littéraire" [Reynald Lahanque]

Son écriture est assimilée par ses détracteurs à une "absence de style"...

Effectivement, dans la réalité du monde d'aujourd'hui, tout comme d'ailleurs "depuis toujours"... Lorsque l'on ne comprend pas un auteur, on dit qu'il est "nul" ou "hermétique"... (il faut du sensationnel, de l'intrigue amoureuse ou policière, de l'émotion, une histoire "bien charpentée qui tient debout du début jusqu'à la fin avec une bonne dose de suspense... Sinon "ça marcha pas", le lecteur "tope pas")...

Ou alors, à la limite il faut être "un imposteur de génie" et savoir faire "se marrer" et interpeler le lecteur avec toutes sortes de formulations bourrées de métaphores hasardeuses "qui font pas trop dans la dentelle" et qui séduisent quelques "anti ceci/anti cela"... en fait, se livrer à un réquisitoire contre le "sens du monde", la "société de consommation" etc. ... (ce "truc" là, ça "prend toujours")...

... On note dans le style de Michel Houellebecq, un usage limité de la métaphore, quelques changements de registre dans le langage dans la même page, le même texte ; l'emploi de "litotes", des descriptions et des détails anodins, des fins de paragraphe avec des phrases simples et banales sur un ton de résignation ; l'emploi fréquent et inhabituel et surprenant d'adjectifs souvent négatifs, pour exprimer des jugements péremptoires...

... Un extrait, cependant, dans La carte et le territoire, page 17, collection de poche J'ai lu :

...C'est alors qu'il prit conscience du problème du taxi. Comme il s'y attendait, Atoute refusa nettement de le conduire au Raincy, et Speedtax accepta tout au plus de l'emmener jusqu'à la gare, à la rigueur jusqu'à la mairie, mais certainement pas à proximité de la cité des Cigales. "raisons de sécurité, monsieur..." susurra l'employé avec un léger reproche. "Nous ne desservons que les zones parfaitement sécurisées, monsieur" indiqua pour sa part le réceptionniste de Voitures Fernand Garcin sur un ton de componction lisse...

... Et, page 47/48 ceci :

Il avait lu Platon, Eschyle et Sophocle ; il avait lu Racine, Molière et Hugo ; il connaissait Balzac, Dickens, Flaubert, les romantiques Allemands, les romantiques Russes. Plus surprenant encore, il était familier des principaux dogmes de la foi catholique, dont l'empreinte sur la culture occidentale avait été si profonde -alors que ses contemporains en savaient en général un peu moins sur la vie de Jésus que sur celle de Spiderman.

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mardi, juillet 23 2013

Le petit saint, de Georges Simenon

Presses de la Cité, édition de 2005 en livre de poche.

Roman achevé à Épalinges, le 13 octobre 1964. Première édition janvier 1965.

Bien qu'ayant lu la quasi totalité de l'oeuvre de Georges Simenon, dont bien sûr les Maigret... Je viens récemment de découvrir ce roman "Le petit saint", qui est à mon avis, et de loin dirais-je, l'un des meilleurs de Georges Simenon...

Il faut dire que Georges Simenon n'a pas écrit QUE des romans policiers, mais aussi des romans "sociologiques", comportant des études réalistes et détaillées de personnages évoluant dans des situations difficiles ou dramatiques...

Le petit saint, résumé :

Louis Cuchas est l'avant dernier d'une famille de six enfants. Nés de pères différents, rien ne les rapproche ces enfants, sinon le logement exigü dans lequel ils dorment et vivent, dans une promiscuité où le vice lui-même n'a plus de nom. Leur mère, Gabrielle, partagée entre ses amants successifs et sa charrette de marchande des quatre saisons, n'a guère le temps de s'occuper de ses enfants.

C'est parmi les petites gens du quartier populeux de la rue Mouffetard, que Louis laisse le monde venir à lui, enregistrant sons, couleurs, images, sensations, sous la protection de sa mère dont il est le préféré.

À l'école il s'isole et son regard pétillant excelle à saisir les choses comme les gens. Le surnom de "petit saint" que lui donnent ses camarades d'école, a rapidement gagné les Halles où, à sa demande, il accompagne sa mère chaque matin avant l'aube.

Ses frères et soeurs vont déserter l'un après l'autre le logement familial, Gabrielle ne reçoit plus d'hommes, Louis grandit...

Il a quitté l'école et travaille la nuit aux Halles, mais il reste toujours le petit garçon aimable et pudique avec son visage de fillette encadré de boucles délicates.

Un jour il se découvre une grande passion, la peinture. Désormais il ne vivra que pour la peinture, s'efforçant de traduire à sa manière dans la juxtaposition de couleurs pures, ce qu'il a accumulé depuis vingt ans.

C'est l'éclosion à une vie nouvelle qui le fascine, malgré les jours difficiles, et, en même temps, la première expérience amoureuse.

Il déménage, quittant la rue de son enfance et sa mère qu'il aimera toujours tendrement.

Ses toiles se vendent, sa popularité naît et croît, grâce à son ami, Suard, qui a encouragé ses débuts. Mais, peu soucieux d'argent et de gloire, il restera Louis, le mystérieux petit garçon à la fois si proche et si lointain, dont la renommée, auréolée de légende, fera plus tard un artiste célèbre.

Extraits :

... Avait-il dormi? Son corps était chaud sous la couverture. Aucun bruit particulier ne l'avait éveillé en sursaut. Il avait seulement entendu, derrière le rideau, qui n'était qu'un vieux drap de lit suspendu à une tringle, un halètement familier, entrecoupé de gémissements, avec parfois le grincement des ressorts du lit. C'était sa mère qui couchait dans ce lit, presque toujours avec quelqu'un. Puis, du même côté que lui du drap tenant lieu de cloison, il y avait Vladimir, ensuite Alice, ensuite les jumeaux, lui-même, chacun sur sa paillasse, et, contre le mur, le bébé dans son lit-cage.

... Il avait vaguement écouté le halètement, puis, petit à petit, il avait distingué la silhouette de Vladimir, en chemise, les genoux sur la paillasse, qui regardait par le trou du drap de lit.

Louis n'était pas surpris ni curieux. Tout cela lui était familier, comme s'il l'eût vécu souvent à son insu. Pour la première fois, seulement, les images, les sons, se rassemblaient, formaient un tout qui avait un sens.

Mon avis :

Si l'oeuvre de Georges Simenon me paraît remarquable et surtout intéressante dans son ensemble, je crois bien que "Le petit saint" en particulier, demeurera de tous les livres de Georges Simenon, celui qui m'aura le plus marqué... Peut-être parce que, dans une certaine mesure, je me suis senti par certains côtés, assez proche du personnage de Louis...

J'ai toujours pensé, en tant qu' "homme d'écriture et de poésie" (si je puis dire)... Que la peinture, que le dessin, ou encore que le modelage, cela pouvait être "un peu comme l'écriture" et, qu'en quelque sorte, l'on pouvait aussi "peindre des tableaux" avec des mots, des tableaux de personnages, de situations, avec une "atmosphère", une sorte de paysage animé... Le tout, avec "un sens évident" ou un sens "suggéré" ou encore, "un sens caché"parfois...

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vendredi, mai 17 2013

Fin de siècle, d'Eugen Weber

La France à la fin du XIX ème siècle

... Livre paru le 20 novembre 1986, éditeur Harvard University Press, et Fayard, pour la traduction et l'édition en langue française, en 1986.

Traduit de l'anglais par Philippe Delamare

Edition en 1998 Club France Loisirs avec l'autorisation de la librairie Arthème Fayard.

L'auteur

Né en Roumanie en 1925, Eugen Weber a enseigné à l'université d'Alberta au Canada, puis à l'université de Iowa aux Etats Unis. Il est devenu professeur à l'université de Californie. Il a effectué de nombreux séjours en France et il s'est spécialisé dans l'étude de l'histoire de France.

Résumé 4 ème de couverture

La vie des Français dans les années 1880-1890 est dominée par des préoccupations et des craintes qui font écho aux propres troubles de l'époque actuelle. Si le progrès technique se développe (nouveaux moyens d'éclairage, de transports, téléphone, ascenseur, etc.) autant que le sport, les loisirs, les voyages lointains ; la société "fin de siècle" redoute la criminalité en progression, l'usage des drogues, la surpopulation, les nuisances sonores, le déclin des valeurs personnelles et sociales. Un ouvrage captivant et riche d'enseignement.

Mon avis

Il y a effectivement une "ressemblance" entre ces deux époques situées à cent ans de distance l'une de l'autre : les années 1880-1914, et les années 1980-2015...

Mais en dépit de ces "ressemblances" que sont les préoccupations et les craintes, les deux époques à mon avis ne sont pas comparables du fait du manque d'hygiène (utilisation et traitement de l'eau courante) et surtout de la précarité de l'existence, avant et même après la première guerre mondiale...

D'autre part la brutalité et la violence dans les rapports humains, notamment familiaux, était une dure réalité dans la vie quotidienne...

Nous sommes loin, en réalité, en lisant ce livre, de ce qui est raconté de la vie des gens de cette époque là, de 1880 à 1914, dans ces romans de terroir si "moraux", si "gentillets", si "émouvants", si mélodramatiques se terminant "pas trop mal" produits par des auteurs populaires !

Extraits

... Entre les dents gâtées et les digestions difficiles, il est probable que la plupart des héros et des héroïnes des romans du XIX ème siècle avaient aussi mauvaise haleine que leurs modèles dans la réalité.

Ils devaient aussi sentir généralement fort dans la mesure où leurs lourds costumes et leurs amples robes ignoraient le nettoyage à sec ; quant aux sous-vêtements-quand ils en portaient- ils n'en changeaient pas souvent...

... Vers 1850 déjà, Flaubert voyageant dans une voiture publique, pestait contre ses voisins qui puaient ignomineusement...

... La violence des adultes traduit la même futilité et le même désespoir : des querelles à propos d'un chemin ou d'une casserole, de poules ou de bétail égaré... dégénéraient en bagarres sanglantes et parfois meurtrières. Faute de couteaux, de gourdins ou de haches, on empoignait un sabot ou tout ce qui tombait sous la main...

... L'évacuation des eaux usées posait des problèmes encore plus persistants. Pratiquement jusqu'à la fin du siècle, dans des grandes villes comme Rouen, Bordeaux ou Rennes ainsi qu'en de moindres bourgades, les ordures ménagères et les pots de chambre étaient vidés dans la rue, les fosses septiques vidangées dans des tombereaux ouverts. Egoûts et caniveaux, lorsqu'ils existaient, se déversaient dans la rivière.

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