Mon cher Bruno,

Il me semble que vos citations quasi exhaustives de toutes les occurrences du mot conscience dans mon ouvrage ne présentent aucun caractère de démonstration de ce que vous prétendez quant à une dérive du sens de ce mot. Je vous trouve particulièrement désagréable quand vous dites que je trompe le lecteur sans même m'en rendre compte : Serai-je assez stupide pour ne rien comprendre à ce que je raconte ? Laissez-moi endosser la responsabilité de mes idées !

J'utilise le mot conscience dans son sens premier de perception de sa propre existence. Lorsqu'il s'agit pour une conscience ainsi définie de pouvoir percevoir autre chose qu'elle-même, je dis "prise de conscience". D'autre part il est clair que la possibilité pour une telle conscience d'avoir une action sur le monde extérieur peut avoir un rapport lointain avec la notion de sens moral. Sans libre-arbitre intrinsèque dans l'action, cette notion de sens moral perdrait toute signification. Mais la notion de morale implique un jugement de valeur extérieur dont la notion de choix n'a nullement besoin pour exister. Il n'y a guère que dans l'expression "avoir bonne conscience" que l'on peut retrouver ce sens moral du mot. Cette expression ne prête pas alors à confusion : elle ne peut concerner que la conscience humaine. Je ne crois pas qu'une particule fondamentale puisse avoir bonne ou mauvaise conscience. Pas plus que Dieu, d'ailleurs.

Je ne puis que continuer, comme je le fais dans mon livre, de conseiller au lecteur de se forger lui-même son opinion. En ce sens j'adhère tout à fait à votre citation de Voltaire.



J'ajouterais que je n'avais pas osé citer Rabelais : "Science sans conscience n'est que ruine de l'âme" en entête d'un chapitre, car cela me paraissait pouvoir être pris pour un détournement de sens, mais vous m'avez presque convaincu de le faire.

Bien cordialement,
Jk