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Sébastien est retourné jouer avec Alain au kill or miss, avec le jeu de Sébastien, le super kill or miss qui permet de jouer à plusieurs, un contre un ou par équipes. Maurice et Odile, de leur côté, s'interrogent sur la conduite à tenir concernant les bijoux.

- Moi, je suis d'avis de les rapporter, dit Odile. Le commissaire nous avait prévenu, c'est une forte tête. Donc personne ne sera étonné.

- J'te comprends ma puce, mais rappelle toi s'qu'il avait dit en plus, que moi, comme marin, j'devais savoir les mater, les fortes têtes. Alors si j'ai pas su su's'coup là, j'crois bien qu'y va nous l'reprendre, son gamin. Et en plus j'suis pas du genre balance.

- Ça veut dire que tu vas le faire rentrer dans l'équipe ?

- Moi j'ai rien à faire. Y est rentré tout seul.

- Ecoute mon chéri. Je te rappelle notre contrat. Quand j'ai quitté mon lieutenant de vaisseau pour t'épouser, c'était pour choisir un homme, un vrai, et pas une lavette. Les rares moments que je passais avec lui, c'est quand il était pas en mer. Et là, on n'en finissait pas d'aller de réunion mondaine en réunion mondaine. Et que je te baise la main de Madame. Et que je te montre mes décorations. Et que je t'invite la fille de l'amiral au tennis-club des officiers. Marre, tu comprends, marre ! Et le comble, ce qui a tout déclenché, je sais pas si tu t'en souviens, c'est quand il avait fait une nouba sur le bateau, l'escorteur d'escadre où tu étais affecté, en invitant tous ses potes, les aspirants aussi bien que les officiers avec deux ou trois barrettes, et leurs copines évidemment. Et pendant que les matelots servaient les petits fours et le champagne, à un moment, ils s'étaient tous mis à chanter un truc de Pierre Perret, je sais plus quoi.

- Estelle.

- C'est ça, Estelle, alors là je lui avais dit « Jean-Bernard, t'as pas le droit de te moquer des gens comme ça. C'est fini entre nous. » Après, tu te rappelles, on était partis tous les deux. On avait passé la coupée en douce et au revoir la Royale.

- Je m'souviens très bien.

- Toi, t'étais pas comme ça. T'as toujours été franc. Et nous avons tout fait ensemble. Bon, t'avais l'idée d'une activité à laquelle j'étais pas franchement favorable, mais tu m'as confié un rôle avec responsabilité, et ça, ça me plaisait bien. Mais il y a quand même des limites, tu ne crois pas ?

- Ma puce, tu sais bien k'c'est grâce à toi que j'peux vivre. Tu sais bien k'je t'aime.

- Et moi aussi je t'aime.

- Bon alors, tu m'laisses pas tomber just'au moment qu'on a un un nouveau plan, et qu'en plus on fait s'qui fait plaisir à Alain qu'y voulait un grand frère.

- Finalement t'as toujours raison, mon chéri.

- Toujours, p'tet pas, mais t'imagines s'qu'on f'rait si qu'on s'quittait ?

- Non, je te quitterai pas, je t'aime trop.

- Alors qu'est-ce qu'on fait avec ces bricoles que c'est p'tet un aut' trésor ?

- Moi, je ne vois que Fernand qui serait capable de s'en débrouiller.

- Moi aussi. Alors t'a qu'à les planquer avec les dollars, dans la valoche. Faudrait qu'on s'prépare pour d'main matin.

Odile se lève et se dirige vers la chambre des enfants pour les inviter à venir à table, mais avant d'ouvrir la porte, elle écoute un instant la conversation entre les deux nouveaux compères.

- Tu vois Sèb, j'fais que des miss, c'est pas gogolo !

- Question d'entraînement, mon vieux, t'as qu'à faire comme moi. Faut jouer beaucoup pour faire des kill. Et même des fois y faut jouer pour de vrai. Même que la dernière fois, j'ai fait trois kill avec trois bastos. Papa et Maman y disaient k'c'était une banque. Tu verras, j'tentraînerai et tu f'ras tout plein d'kill.

- Ah chouette !

Odile entre.

- Les enfants, venez, on se met à table.