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Sitôt revenu chez lui, Maurice explique à son épouse les démarches qu'il vient de faire à la banque. Il lui suggère de s'y rendre dès que possible pour signer son contrat d'assurance vie.

- Mon chéri, tu peux pas savoir comme je suis contente pour cet arrangement concernant cet enfant. Et c'est Alain qui sera heureux. !

- J'suis bien content aussi, tu sais, mais une fois d'plus, c'est les autres qui piquent nos idées. Ça peut pas durer ! A quoi on sert, nous, alors ?

- Ecoute, mon chéri, tant mieux pour nous, si les autres font le travail à notre place.

- J'aurais plus qu'à m'tourner les pouces, alors ?

- Non, il faut que tu continues à avoir des idées, mais laisse les autres les réaliser. C'est moins fatiguant, et puis c'est plus drôle.

Maurice ne répond pas immédiatement. Il est dans ses pensées : « Elle l'a d'viné, la puce, sans l'faire exprès. On est dans l'coup du mort inversé, c'est ça qu'on joue. Et elle a raison. En plus, c'est la sécurité. »

- T'as raison ma puce, et en plus, c'est la sécurité.

- Tu vois. Il n'y a qu'à laisser faire. Mais pour les comptes, je n'comprends pas. Tu sais bien que nous avons besoin de garder de l'argent pour acheter une voiture. Pourquoi avoir tout mis sur des plans d'assurance vie ? Il faudra bien qu'on fasse un chèque pour la payer, la bagnole, et donc ouvrir aussi un compte courant !

- Mais j'ai fait comme tu m'avais dit, ma puce. Tu m'avais dit de mettre l'argent en assurance vie.

- Encore une fois, ça va être de ma faute ! Bon, heureusement que tu n'as pas signé pour moi. Je demanderai à la banque de reprendre un peu sur mon plan avant de signer et d'ouvrir un compte courant.

- Oui, c'est une bonne idée, t'as qu'à faire com' ça.

- En plus, t'a oublié neuf mille cinq cent euros, qu'est-ce qu'on va en faire ?

- J'pensais qu'on pourrait en avoir besoin pour les vacances, non ?

- Ah, c'est malin ! Tu critiques tes deux mécanos, mais toi, tu fais pas mieux !

- Ben y aura qu'à les r'mettre aussi à Fernand. Neuf mille, c'est un compte rond. Garde quand même les cinq cents euros pour bouffer !

- Non, j'ai une autre idée. J'vais lui dire à Madame Girardin que notre client nous a demandé de refaire le moteur, à sa voiture, et qu'il nous a payé ce supplément de neuf mille euros. Et je lui demanderai de les mettre sur le compte courant.

- OK, ma puce, mais garde bien les cinq cents euros.

Odile fait sa visite à la Société Générale et revient pour l'heure du déjeuner. Tout s'est bien passé. Elle a ouvert un compte au nom de Monsieur ou Madame Le Menech, avec vingt-cinq mille euros.

14 heures, le téléphone sonne.

- Qui ça peut-bien être ? dit Odile tout en décrochant (comme toujours).

- Tu verras bien. Mets voir l'ampli, que j'écoute aussi !

- Madame Le Menech ?

- Oui, bonjour, c'est pourquoi ?

- Bonjour Madame, ici le Lieutenant Faldoche.

- Excusez-moi, pouvez-vous répéter ?

- Lieutenant Faldoche, Commissariat du 14ème, avenue du Maine, nous étions passés vous voir samedi.

- Ah oui, excusez-moi, j'avais oublié votre nom.

- Madame Le Menech, votre mari est-il là ?

- Oui, il est à côté de moi, vous pouvez parler, je mets le haut-parleur.

- C'est pour vous dire que nous relâchons le sieur Ledoux. Il va donc pouvoir reprendre son travail. Je suppose que cela va soulager votre mari.

- Certainement Monsieur. D'ailleurs je le vois tout souriant. Mais nous nous inquiétions pour Georges. Une plainte a certainement été déposée contre lui.

- C'est vrai, Madame. Et on peut dire que votre protégé a de la chance...

- Excusez-moi de vous interrompre, Monsieur, mais vous appelez ça de la chance, la correctionnelle ?

- Vous ne m'avez pas laissé finir. Le directeur du magasin est venu ce matin pour retirer sa plainte...

- Ah bon, mais comment ce fait-il que...

- Vous avez raison de vous poser la question. Il a simplement dit que votre garçon s'était bien comporté avec lui, qu'il s'était excusé, et qu'en plus il s'agissait d'un matériel de camping en promotion. Il a quand même formulé le souhait que ce jeune Monsieur Ledoux retourne chez Go-Sport pour l'acheter, ce matériel, et qu'il lui ferait une super-promotion comme il a dit.

- Eh bien, il en a de la chance, notre mécanicien ! Il n'empêche que mon mari y tient, à lui passer un savon. Pouvez-vous lui demander de passer nous voir quand il sortira de chez vous ?

- Bien entendu Madame, je le lui dirai.

- Dites, entre nous Monsieur, on peut dire que c'est un bon vendeur, ce directeur, à préférer que ce soit Go-Sport plutôt que la prison qui ait un client de plus.

- Tout le Commissariat pense comme vous Madame Le Menech. Mais c'est pas une raison pour encourager la délinquance.

- On est d'accord, et mon mari me fait signe qu'il est d'accord aussi.

- Bien, il me reste à vous dire au revoir et bonne après midi.

- Au revoir Monsieur, merci de votre appel.