Outre le mardi 11 septembre 2001, ce 11 septembre des « Twins Towers »... Le 11 septembre évoque aussi pour moi le lundi 11 septembre 1961 à Blida en Algérie...

Vers trois heures de l'après midi par cette journée magnifique au ciel d'un bleu absolu, je contemplais le paysage depuis la coursive du 9ème étage de l'HLM où nous demeurions mes parents et moi, cité Montpensier : toute la plaine de la Mitidja se déroulant jusqu'aux collines du Sahel formant une sorte de talus ondulé, coupé juste en face par une petite échancrure laissant apparaître le bleu profond de la Méditerranée...

Les chiens du quartier, de toute la cité et même de la ville entière se mirent à aboyer... Je n'avais encore jamais entendu autant de chiens hurler à la mort comme on dit, en plein jour et dans une ville entière...

À quatre heures de l'après midi, un roulement de tonnerre comme dans ces orages qui roulent en longues et profondes vagues d'un bout à l'autre du ciel, survint, non pas du ciel mais de l'intérieur de la terre...

Et le carrelage de la coursive fut parcouru de vibrations, puis toute la coursive se mit à avancer et reculer par à coups, comme le pont supérieur d'un navire pris dans la tempête. Et les murs, les cloisons des appartements, se fissurèrent en longues lézardes, des morceaux de plâtre tombèrent des plafonds, de la vaisselle se brisa dans les buffets... La chatte Pomponnette de mes voisins et amis, se mua en hérisson figé ; et les tortues que j'élevais clandestinement dans un petit enclos de briques, se murèrent brusquement à l'intérieur de leur carapace...

Je crus bien que vers la fin de la demi minute que dura cet orage des profondeurs de la terre, toute la coursive allait se décrocher...

… Et vint le soir, la grande nuit étoilée, puis le lendemain matin... Et toutes ces journées d'Algérie jusqu'au bateau de Marseille le 22 mai 1962, toutes ces journées que j'ai tant aimées en dépit de la guerre, toutes ces journées de « là- bas » où les gens avaient coutume de dire à propos des gens de « l'autre rive » de la Méditerranée : « qu'est-ce qu'ils sont constipés, de l'autre côté! »