Flesh & Blood Traduction : Patrick Duvic

Extraits Personnages

Voici l'un des romans les plus ambitieux de Masterton. Il s'articule sur trois thèmes :

1) les excès (calculateurs) de l'Homme dans son désir d'asservir la Nature ;

2) les excès (calculateurs) de l'Homme dans sa volonté d'asservir sa propre espèce ;

3) les excès (calculateurs) de la Politique et des politiciens.

De leçon de morale, il n'y en a pas : au lecteur de se faire son opinion personnelle. Cynique, la chute finale nous rappelle simplement que, une fois mises en branle certaines mécaniques, il devient très difficile, voire impossible, de les arrêter.

L'ample et ténébreux manteau du genre épouvante recouvre tout cela et nous permet de lire en parallèle une histoire fantastique puisée cette fois aux sources du folklore rural des pays de l'Est et tout particulièrement de ce qui était encore, à l'époque de la parution du livre, la Tchécoslovaquie. Janek-le-Vert, entité maléfique à l'oeuvre dans "Sang Impur", sort-il vraiment du folklore tchèque ou n'est-il qu'une invention de l'auteur, on ne le saura jamais très bien, à moins que Masterton ne vienne nous le dire en personne. Mais ce personnage descend sans équivoque possible de l'Homme vert dont on retrouve la trace, dans l'art et dans les textes, jusqu'en Inde.

Entité masculine qui garantissait les récoltes abondantes, l'Homme vert exigeait qu'on lui sacrifiât un ou plusieurs humains en échange de ses bienfaits. Thomas Tryon en a donné sa vision personnelle dans "La Fête du Maïs", une vision elle aussi assez gore. Masterton pour sa part lui invente un rejeton, Terence Pearson, qui, au lieu d'attendre sa visite - dont il sait qu'elle sera mortelle aussi bien pour lui que pour ses propres enfants - entre en rébellion et cherche ouvertement à priver son étrange géniteur des sacrifices qui le maintiendraient en vie. Le résultat est, ma foi, tout aussi sanglant mais, pour peu qu'on s'intéresse à Freud, on comprend l'enrichissement du thème.''

Face à Janek-le-Vert, ancien humain à part entière, jadis sacrifié à la Nature afin que celle-ci bénisse les récoltes de ses voisins, Captain Black. Captain Black est un porc, propriété d'un laboratoire spécialisé dans des expériences visant - bien entendu - à améliorer notre santé à tous. Leur dernière idée ? Transplanter une infime partie d'un cerveau humain encore vierge - celui d'un jeune enfant - dans le crâne du malheureux porc et greffer cette parcelle sur le cerveau du malheureux porc. On le rendrait ainsi plus "humain" (sic).

Entre les deux, une bande de politicards assoiffés de pouvoir, qui prônent par pur arrivisme l'interdiction de la viande et l'instauration de menus végétariens pour tous. Pour compliquer encore les choses, il faut ajouter à tout cela une petite bande de militants résolus, prêts à tout pour délivrer les animaux enfermés dans les locaux du laboratoire - y compris et surtout Captain Black.

Scènes gore (accrochez-vous, ça démarre très fort), variation remarquable sur un mythe rural aussi vieux que l'Humanité, personnages principaux plus complexes que la moyenne, récit travaillé, rythme enlevé malgré quelques petites longueurs, et enfin des questions qui ne peuvent que nous interpeller, voilà ce que recèle en ses pages "Sang Impur", un roman un peu différent de ce que nous offre d'habitude Masterton mais qui n'en demeure pas moins l'un de ses meilleurs. ;o)