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Tag - Corinne Hermann

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samedi, mars 31 2012

Un Tueur Peut En Cacher Un Autre - Corinne Hermann & Philippe Jeanne ( II )

Hermann et Jeanne démontrent donc qu'il est parfaitement irresponsable de vouloir raisonner "à l'américaine" quand on se trouve face à un tueur européen. Au mieux, cela bloquera l'enquête, au pire, cela la détournera de sa véritable voie. Ils plaident également pour une meilleure coordination entre les juges ayant en charge des dossiers de disparitions et d'assassinats, et qui, en unissant leurs efforts, auraient mis beaucoup plus rapidement hors de nuire un Francis Heaulme ou un Michel Fourniret. (L'une des rares ressemblances entre tueurs en série américains et européens - mais elle est de taille - c'est la capacité des uns comme des autres à tirer avantage d'un système judiciaire qui, ici comme à New-York mais pour des raisons différentes, enferme policiers et magistrats dans leur juridiction, les rendant sourds et aveugles à ce qui se passe dans celle d'à-côté, là où pourtant l'assassin qu'ils recherchent s'est prudemment enfui afin de poursuivre en paix son oeuvre de mort.)

Nos deux auteurs insistent aussi sur la nécessité faite à la société dans son ensemble d'étudier les tueurs en série mis sous les verrous et, ainsi, de tenter de prévenir les actes de ceux restés à l'extérieur. Technique déjà pratiquée aux Etats-Unis et qu'il faudrait bien entendu adapter à notre propre système pénitentiaire - même si les inévitables Droitdel'hommistes hurleront une fois de plus au scandale en cherchant à transformer d'immondes bourreaux en malheureuses victimes. Enfin, ils mettent en garde contre le redoutable jeu des remises de peine qui libère sans complexe des violeurs et des pédophiles récidivistes alors que, inexorablement, tôt ou tard, ceux-ci seront amenés à passer au degré supérieur du crime.

La thèse est étayée par l'étude de cas bien connus en France : l'adjudant Chenal et les Disparus de Mourmelon, Francis Heaulme qui poussait systématiquement au viol des complices choisis au hasard pourvu qu'ils eussent un mode de locomotion (le "Routard du Crime" n'avait pas permis de conduire), Thierry Paulin et son amant, Maturin, les "tueurs de Vieilles Dames" de l'Est parisien, etc, etc ... A l'exception du premier chapitre, on ne tombe jamais dans le pathos. Il n'y a pas non plus de complaisance malsaine. Rien que du solide, du grave, du sérieux - et du passionné, par deux passionnés.

A lire. Absolument.;o)

lundi, mars 19 2012

Un Tueur Peut En Cacher Un Autre - Corinne Hermann & Philippe Jeanne ( I )

Extraits

De Corinne Hermann et Philippe Jeanne, j'avais déjà lu le remarquable "Les Disparues d'Auxerre", sans doute l'ouvrage le plus complet et le plus juste sur ce que l'on appelle habituellement "l'Affaire Emile Louis" mais qui s'attarde également sur d'autres cas de jeunes filles et jeunes femmes s'étant évanouies dans la nature au coeur de l'Yonne - région qui, entre parenthèses, semble cumuler les dossiers mis au placard alors qu'ils devraient être encore sur la place publique.

"Un Tueur Peut En Cacher Un Autre" ne traite pas d'une affaire en particulier mais s'attaque à l'inquiétant problème causé par les tueurs en série maintenant que, avec les progrès de la technique et la libération des frontières, ils commencent à faire tache dans notre paysage européen. Il fut en effet une époque, guère si lointaine que cela, où les Européens - et nous autres, Français, en particulier - assurions avec superbe que le phénomène était typique de la société américaine, de sa culture de l'arme à feu et de son goût quasi inné pour la violence. Désormais, le discours a un peu changé et les tueurs en série sont admis - si l'on ose dire - à revendiquer leur place, en France comme dans le reste de l'Europe.

Ce virage à cent-quatre-vingt degrés de nos instance dirigeantes, toutes tendances politiques confondues, les a malheureusement amenées à s'emparer - une fois de plus - du modèle américain afin de le faire concorder avec les tueurs européens. Elles découvrent aussi avec enthousiasme les merveilles d'un profilage dont les méthodes font du surplace depuis maintenant plus de quarante ans mais que continuent à glorifier, pour des raisons d'audimat et de gros sous, les séries venues d'Outre-Atlantique. Ce faisant, on oublie que les bons profileurs sont rares et que, étant humains, ils restent faillibles. Et aussi, et surtout, que les méthodes qui fonctionnent aux USA ont beaucoup de mal à faire leurs preuves en Europe.

Même s'il met en danger la société dans laquelle il est né, le tueur en série, tout monstre qu'il est, n'en reste pas moins tributaire de ladite société. En lui, malgré tout, sont gravées des références (ou des contre-références) qui lui viennent de ses racines, et ce sont à elles qu'il revient, y compris quand il tue.