Fénelon décide de se mettre un peu au vert, le temps pour lui de laisser passer l'orage. Il se retire donc dans son diocèse mais, ce faisant, il laisse ses alliés, les jésuites, dans une situation bien embarrassante que Saint-Simon nous expose avec sa minutie habituelle :

"... ... Outre leur liaison intime et de tous temps avec le cardinal de Bouillon, et la leur bien affermie avec M. de Cambray, (les jésuites) haïssaient aussi ses adversaires : M. de Meaux parce qu'il ne favorisait ni leur doctrine, ni leur morale, que son crédit les contenaient et que son savoir et sa réputation les accablaient ; M. de Paris par les mêmes raisons de doctrine et de morale, mais ils frémissaient de plus de ce qu'il était devenu archevêque de Paris sans eux et comme malgré eux ; M. de Chartres parce qu'ils haïssaient et enviaient la faveur de Saint-Sulpice, quoique, sur Rome et d'autres points, dans les mêmes sentiments, mais la jalousie détruisait toute union et de plus, ils sentaient déjà le crédit que ce prélat prenait dans la distribution des bénéfices, et c'était leur partie la plus sensible que d'en disposer seuls ; M. de Reims, qui se ralliait à ces prélats parce qu'il ne les ménageait en rien, et qu'ils n'avaient jamais pu ni l'adoucir ni être soutenus contre lui en aucune occasion. ... ..."

De Bossuet jusqu'à Charles-Maurice Le Tellier, en passant par Godet-Desmarais et Louis-Antoine de Noailles, tous proches du pouvoir, les jésuites s'étaient vraiment mis tout ce qui comptait à dos !

            
                       Louis-Antoine de Noailles, archevêque de Paris.

Ancien élève du collège du Plessis, à Paris, il y avait connu Fénelon dont il se montra si bien l'ami que ce fut lui qui permit de faire entendre la défense de Mme Guyon lorsque celle-ci se trouva attaquée au moment même où elle recherchait la faveur de Mme de Maintenon. Mais l'archevêque de Paris, si partisan de la modération qu'il fût, était aussi - chose rare - un homme honnête et les "Maximes des Saints" ne convainquirent pas sa conscience. Il faut rappeler que, en 1713, il se verra interdire de paraître à la cour parce qu'il refusait d'approuver la bulle Unigenitus, que le Pape avait concoctée à la demande de Louis XIV.