The Book of Evidence Traduction : Michèle Albaret

Voici un livre singulier, présenté sous la forme d'un monologue de plus de trois cents pages, celui d'un aristocrate assassin, Frederick St Jonh Vandeveld Montgomery, parfois appelé "Freddie" par ses proches ou ses amis.

Le style en est tout à fait remarquable : net, travaillé, ciselé même, littéraire (songez donc que, dans la majeure partie des cas, la traductrice s'est vue obligée de respecter l'emploi de l'imparfait du subjonctif ! :wink:), très, très dense. L'action y est accessoire : y prime l'analyse des sentiments du héros ainsi que sa façon, très personnelle, de voir le monde.

Bref, en bonne logique, un livre qui risque fort, dès ses dix premières pages, de faire tomber de sommeil le lecteur lambda.

D'où vient alors le miracle qui contraint à lire toujours plus loin, à accompagner jusqu'au mot "Fin" un héros qui tient plus de l'anti-héros, et à refermer "Le Livre des Aveux" avec la conviction d'avoir lu un roman rare et excellent ?

Je l'ignore mais, pour moi, tel fut bien le cas.

Pour tenter de résumer ce livre étrange, premier volet de la trilogie consacrée par son auteur à l'Art, plaçons au milieu le meurtre d'un personnage tout à fait secondaire - on serait même tenté d'écrire une silhouette si la malheureuse ne passait de vie à trépas dans des conditions aussi sordides. Meurtre stupide, meurtre sans mobile réel, meurtre qui fait basculer le personnage central dans ce qu'il nommera les "dix jours les plus passionnants" de sa vie.

Ajoutons à cela un ego invraisemblable, mélange de faiblesse, de lâcheté, de tendresse aussi et d'irresponsabilité absolue, que le monologue rend omniprésent, d'un homme dont on peut douter qu'il ait toute sa raison mais dont on est sûr et certain qu'il n'est jamais parvenu à épurer les relations qu'il entretenait avec ses parents, et notammnent sa mère.

Situons tout cela - sauf le tout début - dans une Irlande toujours aussi brumeuse et mélancolique, où gin et whisky scandent les rencontres et les retrouvailles.

... Et nous n'aurons que les bases très schématiques du "Livre des Aveux."Mais enfin, nous aurons une petite idée du sujet.

Une lecture que je recommanderai aux lecteurs chevronnés et que les méandres psychologiques et les questions existentielles ne rebutent pas. Les adeptes de l'action à tous prix devraient par contre s'abstenir. Encore que la bizarre fascination de l'ensemble soit capable, à mon sens, de tous les miracles.