The Crime of Century : Richard Speck and the murder of eight student nurses Traduction : Edith Magyar

Voici un ouvrage sur lequel devraient se pencher tous les partisans de l'abolition de la peine de mort. Son style, pourtant, ne laissera pas de souvenir impérissable mais l'histoire qu'il raconte, en revanche ...

Le 13 juillet 1966, Richard Franklin Speck, petit délinquant sans envergure qui a déjà été arrêté pour vols et pour violences, s'introduit par effraction dans une résidence abritant des élèves-infirmières d'un hôpital de Chicago.

Après les avoir maîtrisées et alternant pour ce faire la douceur et la menace, il viole et assassine de sang-froid huit jeunes filles. La neuvième, Corazon Amurao, d'origine philippine, ne devra sa survie qu'à sa petite taille et à un sang-froid exceptionnel qui l'incite, alors qu'elle attend, ligotée et bâillonée, que l'assassin ne revienne pour en finir avec elle, à se propulser sous un lit pour s'y dissimuler. C'est elle qui, au matin du 14 juillet, terrorisée et hors d'elle, se glissera sur la corniche de sa chambre pour y hurler au secours. A cette heure-là, l'assassin, qui avait commis l'erreur de ne pas dénombrer ses victimes potentielles, a tourné les talons, persuadé qu'il ne laisse aucune survivante ...

Dès qu'il apprend, par les journaux, que tel n'est pas le cas, Speck cherche à fuir la police. Cet homme au Q. I. plutôt bas agira alors avec une rare efficacité. Mais le portrait-robot est bientôt diffusé dans la presse et il sent bien que, sans argent et sans relations, il n'ira pas loin. Il fait une tentative de suicide, est recueilli par les pompiers et les hôpitaux et, finalement, se voit formellement identifié par un chirurgien.

Son défenseur imaginera bien sûr de plaider la folie et une déficience génétique que l'absorption de grosses quantités d'alcool et de drogues aurait agravées. Mais les faits sont là, incontestable : non seulement Speck a prémédité son infraction mais surtout, pendant la nuit de la tuerie, il prend soin de violer et d'assassiner chacune de ses victimes dans une chambre isolée, porte soigneusement close. De plus, avant de passer à la suivante, ce maniaque de la propreté se lave les mains et change de T-shirt à la moindre tache (il en a emporté une réserve avec lui).

Comment concilier un pareil sang-froid avec l'idée d'une crise de folie tapie dans les gènes du meurtrier et provoquée par l'absorption de drogues ?

En définitive, l'avocat de Speck tentera donc de prouver que Corazon Amurao se trompe lorsqu'elle identifie Speck comme l'assassin. Mais les jurés ne se laissent pas faire et le reconnaissent coupable avec préméditation. Quant au juge, il le condamne à la chaise électrique.

Speck fait alors appel et, de procédure en procédure, il verra sa peine commuée en plus de 500 années de prison. Il mourra d'une crise cardiaque dans l'établissement où il purgeait sa peine.

Au mur de sa cellule, il avait accroché les photos de ses huit victimes.

Pour le lecteur, la culpabilité de Speck ne fait évidemment aucun doute. Comme il n'y a aucun doute qu'il était parfaitement conscient de ce qu'il faisait quand il est passé à l'acte. Ces huit meurtres ne peuvent par exemple se comparer à la dernière "descente" meurtrière de Ted Bundy dans un foyer d'étudiantes - "descente" qui, parce qu'il y laissa une trace très nette d'empreintes de dents, allait sceller son destin. Bundy était au paroxysme du mal qui le rongeait tandis que, chez Speck, on ne sent rien de tout cela. Chez cet homme quasi mutique sauf s'il a bu, tout est prémédité. Contrairement à ce qu'il s'est fait tatouer sur un bras, il n'est pas "né enragé" : comme un enfant de douze ans, il voulait encore, à près de trente ans, faire ce qu'il voulait, au moment où il voulait et sans se soucier des autres.

Et puis, comme il l'avoua lui-même, il voulait aussi "avoir son nom en gros titres dans les journaux."

Il l'a désormais dans les archives criminelles internationales. Ses huit victimes, hélas ! aussi.