28 avril 2006.

Pour le profane, l'autiste est celui qui se replie sur lui-même, n'admet pas qu'on le touche et, bien entendu, ne prononce pas un seul mot. L'individu a refusé de naître au monde et ce refus est si prononcé qu'un autiste pur n'est jamais malade. __ Mais auprès d'eux, se tiennent tous ceux qui se sont contentés de manifester des troubles à tendance autistique. Il y a une vingtaine d'années, ces enfants-là, on les cataloguait facilement : on leur collait l'étiquette passe-partout "psychose infantile" bien entre les deux yeux et hop ! le tour était joué.

Il y a vingt ans aussi, l'autisme et les troubles s'y référant étaient dûs à la Mère. La mère d'un autiste (ou supposé) tel était fatalement une "mauvaise" mère. Soit elle ne s'occupait pas de son enfant, soit elle le surprotégeait. En bref, c'était elle la fautive, elle avait toujours tort. Un peu comme Eve, en somme : les clichés religieux ne sont jamais bien loin des pires saloperies que l'individu mâle est capable de concevoir pour se donner bonne conscience.__

Aujourd'hui, l'autisme ne s'explique plus par la Mère seule. Le père - et les autres ascendants - sont désormais de la partie. Il était temps ... __ Mon fils n'est pas autiste au sens premier du terme.__ Il aurait pu se fermer complètement à une certaine époque mais il a été rattrapé à temps par un médecin extraordinaire dont j'avais fait la connaissance dans l'Eure. A partir de là, il s'est réveillé au monde.

Son handicap premier, c'est le retard de langage. Il comprend les choses et encore mieux les émotions. Mais il est incapable de les restituer toutes dans leur complexité. D'où frustration immense - et inconcevable pour quelqu'un qui, de tous temps, comme moi, comme vous, a pu parler.

Même s'il ne peut les exprimer comme il le faudrait, il subit des émotions, comme tout un chacun. Mais de façon beaucoup plus intense que vous ou moi. A tel point que la chose l'effraie : ça monte, ça monte dans sa gorge, il ne sait que faire, alors, il crie.

C'est d'autant plus affreux que, en quatre ans, il a tout de même fait d'énormes progrès au point de vue de l'expression orale. Il fait désormais des phrases pour demander des choses basiques comme du pain, de la soupe, du jambon, tel ou tel jeu sur l'ordinateur (Pas de problème avec les jeux-vidéos : Flavien les comprend vite.)

En fait, j'ai l'impression qu'il régresse et cela me fait mal. Pourtant, tout saut en avant s'accompagne toujours d'une petite régression - c'est ce que le proverbe "reculer pour mieux sauter" symbolise dans la sagesse populaire ...

Les problèmes de santé qui m'accablent depuis fin 2005 et quelques soucis auxiliaires aggravent le phénomène parce que l'enfant ressent ma lassitude et l'interprète comme un désintérêt à son égard. Avec ce genre d'enfants, c'est tout ou rien et Maman, bien sûr, c'est tout. Maman doit tout comprendre, tout savoir faire, tout deviner, compatir à tout et ne s'énerver jamais.

Epuisant ...