Guy Sembic écrit des textes courts qui appartiennent au genre du conte ou de la nouvelle, mais aussi qui sont parfois de simples pensées constituant, en s'accumulant, une sorte d'autobiographie mentale. Le Chien Vert contient quelques-uns de ces textes, dont "Il n'y a pas de miracle". L'ensemble de l'oeuvre, ensuite (tout texte compris), met en lumière (et ce sera certainement l'un des objectifs peu à peu de ce site que de la définir) une philosophie de la vie, ce que l'on pourrait appeler (le nom n'engage que moi) le "yugcibinisme" (Yugcib étant le pseudo de Guy Sembic sur le web). Définir une philosophie peut apparaître comme la réduction d'une oeuvre pour qu'elle prétende influencer le monde, ce qui ne plaîrait pas forcément à l'intéressé : nous n'en sommes donc pas là. De ce point de vue, toutefois, "Il n'y a pas de miracle" pourrait être un texte clé révélant le profond humanisme de Guy Sembic qui prend appui, pourtant, sur une idée de base fondée sur l'absurdité, voire la médiocrité du monde que par ailleurs il fustige. En un mot, il n'existe pas de vérité, les combats sont voués à l'échec, rien n'est jamais acquis, mais l'important demeure la révolte : il faut croire en ces hommes en particulier que l'on croise au cours de notre route, s'enrichir de nos différences ; mais surtout, les moments partagés (avec des amis de longues dates ou des rencontres furtives), les relations entre les individus, constituent la seule vérité "imputrescible" (je reprends le mot utilisé par l'auteur), du berceau à la tombe. Guy Sembic est aussi l'inventeur du terme "s'exister" les uns les autres, terme très évocateur s'il en est. "Il n'y a pas de miracle" est un petit caillou apporté à l'immense édifice que constitue cette oeuvre riche et cohérente, ou le scatologique pourfendeur de médiocrité se mêle à une non résignation fondamentale : l'espoir poétisé d'un humanisme qui empêche de tomber dans le cynisme ou le renoncement.