Le sentiment de tendresse qu'inhale ce texte est très troublant chez le lecteur. Evidemment, certains pourraient le considérer comme insupportablement crados, mais ce serait qu'ils ne comprennent rien à rien. Non, vraiment, le mot qui convient le mieux pour qualifier ce texte, c'est celui de "tendresse". Il est difficile parfois d'évoquer les sentiments intimes sans faire dans l'ambiguité ou le crados. Ce texte me rappelle la chanson que Gainsbourg chante avec sa fille, Lemon Incest, qui évoque l'affection toute particulière existant entre un père et sa fille (ou entre une fille et son père) ; chanson très émouvante que beaucoup de personnes à l'époque n'avaient pas comprise, accusant Gainsbourg de prôner l'inceste ou la pédophilie. Gainsbourg s'était insurgé : ""L'amour que nous ne ferons jamais ensemble est le plus beau le plus émouvant"; ça veut dire ce que ça veut dire, non ? Merde !". Ce que Gainsbourg avait fait là c'est de parler d'un sentiment particulier, plus qu'intime, qui appartient à l'inconscient, quelque chose qui n'a aucune incidence sur la vie ni du père ni de la fille, qui se retrouve "socialement" parlant uniquement dans certains clichés (la jalousie d'un père envers le petit copain de sa fille, par exemple). De même, Le Petiot paraît crade a priori, mais il ne fait que raconter les sentiments particuliers (appartenant au non dit, à l'inconscient, à la velléité) ressentis par un petit garçon envers sa maman. Kundera considère la littérature comme l'exploration de la "mathématique existentielle", c'est-à-dire tout ce qui fait les comportements humains, les sentiments humains, les émotions humaines, etc. Eh bien, Le Petiot, simplement, explore l'un de ces éléments de la mathématique existentielle, mais un élément très difficile à exprimer, qui appartient pratiquement au domaine de l'indicible. D'où le tour de force, et le courage d'avoir osé le faire. "Le petiot" est à retrouver sur le blog du Merdier.